Réagissant au dernier discours du vice-ministre de la Défense, Ahmed Gaïd-Salah, Saïd Sadi, ancien président du RCD, n'y est pas allé de main morte pour fustiger le général de corps d'armée et lui demander, tout bonnement, de partir. Dans sa lettre, l'ancien chef du RCD a estimé qu'"en ces moments décisifs pour la patrie, chaque Algérien est mis face à ses responsabilités. Vous tout particulièrement". "Il est temps de partir. Parce que vous êtes âgé, parce que le système que vous avez soutenu a échoué et, surtout, parce qu'il est condamné par l'exceptionnelle mobilisation citoyenne qui fait renaître la nation depuis le 22 février", a souligné le Dr Sadi. Rappelant les différentes prises de positions de Gaïd Salah, le Dr Sadi a souligné que "depuis le début de ce mouvement, votre discours a beaucoup varié. Vous fûtes un partisan du cinquième mandat. Vous avez accusé les manifestants d'être manipulés en vue de déstabiliser leur pays pour, enfin, admettre, formellement, que le peuple avait raison, quitte à donner une interprétation opposée à ses revendications". La solution constitutionnelle défendue par le chef d'état-major est, de l'avis de Saïd Sadi, contraire aux aspirations de la rue. "Il n'est, en conséquence, pas judicieux de se référer à cet artifice pour justifier l'injustifiable qui se prépare et dont les premiers signes sont des plus préoccupants", accuse-t-il, ajoutant que "continuer d'ignorer le sens profond d'un mouvement déjà inscrit dans l'histoire du monde, et ce, quelle que soit son issue immédiate, c'est prendre le risque personnel de rester comme l'un des sombres repères de notre mémoire et, plus grave, d'entraîner l'armée dans une aventure où elle connaîtra la pire des épreuves : affronter ses concitoyens. En outre, l'ancien maquisard que vous êtes sait que nul n'a gagné contre un peuple qui se lève". "L'Algérie asservie, étouffée, humiliée et pillée revient de loin. Elle a su retrouver vigueur, honneur et dignité à travers un mouvement miraculeux inspiré et animé essentiellement par une jeunesse à laquelle, pourtant, on n'avait laissé aucune chance", considère le Dr Sadi, estimant que "tout appelle au retrait" de Gaïd Salah. "Il est temps de laisser la place aux nouvelles générations. L'époque des diktats militaristes est révolue. Ce serait une faute de jugement grave de ne pas comprendre qu'aujourd'hui, en Algérie aussi, le cri d'un citoyen est plus audible que le bruit d'un canon", estime l'ancien président du RCD. Concernant la réouverture des dossiers de corruption et la saisine de la justice sur d'autres affaires similaires, Saïd Sadi a mis en garde contre tout recours "aux règlements de comptes (…) surtout quand les investigations ciblent certains acteurs et en épargnent d'autres". "La justice à la carte est l'une des facettes les plus insupportables de l'injustice", estime-t-il, ajoutant qu'il faudra "récupérer le maximum de ce qui a été détourné dans le cadre d'un Etat de droit qui reste à construire". "Ce qui se passe actuellement en Algérie est un événement planétaire", a-t-il encore estimé, indiquant, toujours à l'adresse de Gaïd Salah : "Vous avez une occasion unique de clore votre carrière par une décision patriotique qui pourrait transcender ou, du moins, relativiser ses points de faiblesse : faire rentrer l'armée dans les casernes et laisser l'Algérien inventer le grand destin que le militarisme lui a interdit depuis le premier jour de son indépendance."