Avec le rejet du peuple et le refus de l'implication des juges et des P/APC, le gouvernement est face à de grandes difficultés quant à l'organisation de l'élection présidentielle. Après les magistrats qui ont exprimé leur refus de s'impliquer dans la supervision de l'élection présidentielle, annoncée pour le 4 juillet prochain, contre la volonté populaire, par le chef de l'Etat par intérim, Abdelkader Bensalah, c'est au tour d'élus locaux et d'exécutifs communaux d'annoncer leur boycott du processus électoral. Hier, des P/APC ont fait part de leur refus d'ouvrir, au niveau de leurs communes, les guichets dédiés aux élections pour la révision des listes électorales. Cette opération, qui intervient systématiquement au lendemain de la convocation du corps électoral, a pour objectif d'assainir le fichier électoral national à la veille de chaque élection. La réaction des maires fait suite au courrier que le ministère de l'Intérieur leur a envoyé pour ce faire. Se rangeant du côté de leurs administrés qui rejettent cette élection, les P/APC concernés, notamment ceux issus des partis de l'opposition, ont aussitôt fait savoir qu'ils ne cautionnent pas cette élection décidée par le système, malgré son rejet par le peuple. Ils font ainsi fi de la loi les obligeant à le faire. C'est le cas, entre autres, du P/APC de la commune de Tinebdar relevant de la wilaya de Béjaïa, élu du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Mustapha Hadjal, qui a posté une vidéo accompagnée d'un écrit sur la page Facebook officielle de sa commune, "Bibliothèque de Tinebdar", dans laquelle il a fait part de son opposition à la révision des listes électorales. "Voilà, comme vous le voyez, nous venons de recevoir un fax du ministère de l'Intérieur nous enjoignant de procéder à la révision des listes électorales, mais comme nous avons décidé, depuis la première marche du 22 février dernier, de rejoindre le mouvement populaire, nous rejetons cette demande des autorités. Nous sommes et resterons toujours avec le peuple. Donc, j'ai personnellement décidé, en mon âme et conscience, de ne pas ouvrir le service des élections en prévision de la présidentielle que le système compte organiser contre la volonté du peuple", a-t-il tranché. Et d'expliquer : "Nous allons continuer à travailler, pendant vingt-quatre heures s'il le faut, pour l'intérêt de la commune, mais pas pour cette élection que le peuple rejette. Le peuple dit, depuis le 22 février, aux représentants de ce gouvernement et à tous les représentants du système de dégager, et ce n'est donc pas à nous de le respecter. Nous sommes aussi des enfants du peuple. Donc, nous refusons aussi cette élection et nous refusons donc d'ouvrir les bureaux des élections au niveau de notre commune avant que les revendications du peuple ne soient satisfaites." Le P/APC de Yakouren a, lui, fait savoir son boycott de la révision des listes électorales par un courrier officiel adressé au wali de Tizi Ouzou. Ses collègues du RCD dans d'autres communes observent également la même attitude, eux qui avaient auparavant décidé de ne pas organiser l'élection présidentielle avortée du 18 avril. D'autres P/APC, d'autres partis de l'opposition devront faire de même. Ce qui rendra, du coup, impossible l'organisation du vote pour la présidentielle annoncée par le pouvoir à travers plusieurs communes du pays. Cette révolte des élus locaux, incontournables dans l'organisation des élections, compromet sérieusement le scrutin présidentiel du 4 juillet, d'autant plus qu'il est rejeté par le peuple et les partis de l'opposition. Tout indique que ce sera une élection sans candidat et sans électeur. Aussi, le chef de l'Etat par intérim, le gouvernement et le chef d'état-major de l'ANP, qui ont décidé de faire valoir l'article 102 contre la volonté des Algériens, sont face à une vraie quadrature du cercle. Mis devant une telle impossibilité pratique à organiser la présidentielle, se résigneraient-ils à rectifier leur feuille de route ? La pression sur eux est trop forte. Mais oseront-ils pour autant ? Si le pouvoir avait pu surmonter pareille situation lors des législatives de 2002, boycottées dans trois wilayas représentant la Kabylie (Béjaïa, Tizi Ouzou et Bouira), pour cause du Printemps noir, en recourant à des élections partielles trois ans plus tard (2005), cette fois-ci, il s'agit d'une élection présidentielle dont le scrutin concerne l'ensemble du pays. Ce qui rendra, donc, impossible l'organisation de la présidentielle annoncée pour le 4 juillet prochain, sans l'implication des APC à travers les 1 541 communes que compte le pays.