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L'opposition dénonce l'immixtion de l'armée dans la politique
Au lendemain du discours de GaId Salah
Publié dans Liberté le 25 - 04 - 2019

Des partis, qui avaient fait, avant-hier, l'objet d'une attaque frontale de la part du chef d'état-major de l'ANP, Ahmed Gaïd Salah, pour avoir boycotté les consultations pour la présidentielle menées par le chef de l'Etat, Abdelkader Bensalah, dénoncent l'immixtion de l'armée dans les affaires politiques. Ces formations se sont aussi déclarées surprises par le nouveau discours d'hier du premier responsable de l'ANP.

Hakim Belahcel, premier secrétaire du FFS
"Le chef d'état-major de l'ANP doit se retirer des affaires politiques"
"Pour nous, un militaire restera un militaire. Ahmed Gaïd Salah est en train de manœuvrer encore une fois. Il refuse d'écouter le peuple qui exige un changement total du système. Le général de corps d'armée refuse d'admettre que les destinées politiques du peuple algérien doivent être décidées par la volonté populaire. Il s'entête, hélas, à vouloir tout régenter et tout orienter comme il lui arrive de le faire avec une région militaire ou une division de soldats. Pourtant, le peuple algérien lui a clairement signifié son refus de voir l'état-major de l'armée s'ingérer dans les affaires politiques du pays. Le Front des forces socialistes considère qu'à travers son discours d'aujourd'hui (ndlr mardi) le général a fait un pas de plus dans sa démarche autoritaire et hégémonique. Apparemment, rien ne semble pouvoir arrêter son avidité à tout contrôler et à tout décider comme s'il était le seul et unique maître à bord, balayant d'un revers de la main les interpellations venant de l'opposition et aussi les exigences populaires qui aspirent à un changement radical du régime. Le pouvoir réel représenté aujourd'hui par le chef d'état-major et secondé par un chef de l'Etat illégitime et désavoué, n'a affiché aucun signe sincère et crédible allant dans le sens de la satisfaction des préalables politiques exigés par la quasi-totalité du peuple algérien. Parmi ces exigences, le départ immédiat de l'oligarchie, de la mafia politico-financière prédatrice de manière intégrale. Depuis plus de deux mois maintenant, que des millions d'Algériennes et d'Algériens demandent d'une manière pacifique et résolue de leur permettre de disposer d'eux-mêmes. Le FFS considère qu'aucune force ne pourra freiner ou arrêter la marche de tout un peuple pour reconquérir sa liberté. Le FFS appelle aussi l'état-major de l'armée à se retirer des affaires politiques."

Djelloul Djoudi, Parti des Travailleurs
"L'armée n'est pas un parti politique"
"Dans son discours prononcé mardi, le vice-ministre de la Défense nationale reprochait aux partis politiques de persister à écouter le peuple. Le chef d'état-major est allé alors dans une attaque frontale contre ces mêmes formations politiques qui ont boycotté la consultation de Bensalah. En fait, l'Armée nationale populaire est tenue aujourd'hui de respecter d'abord les termes de la Constitution, surtout que le premier responsable de l'ANP ne cesse d'insister sur le respect de la loi fondamentale du pays, à chaque occasion. Pourtant, au même moment, Gaïd Salah se permet le luxe de s'immiscer dans les affaires politiques qui, bien entendu, ne relèvent pas de ses attributions telles que prévues dans la Constitution puisque cette même loi fondamentale résume bien les nobles missions de l'Armée nationale populaire qui consistent principalement en la protection du territoire national. En un mot, il faut savoir que l'ANP n'est pas un parti politique. Cela étant, le peuple ne cesse, depuis le 22 février à travers des marches de millions de citoyens, de réclamer dans toutes les régions du pays le départ, de tout le système et de ses symboles. Les Bensalah et les Bedoui sont massivement rejetés par le peuple, notre mission consiste à ne pas se mettre en porte-à-faux avec la légitimité populaire. Par conséquent, c'est aux militaires de respecter la Constitution. Les articles 7 et 8 sont clairs là-dessus, à savoir que le peuple a le droit de décider du régime qu'il veut. Le Parti des travailleurs considère que le discours de Gaïd Salah prononcé mardi constitue une menace directe au multipartisme. Je dirai qu'à la lumière des propos de Gaïd Salah, les partis sont carrément menacés d'existence. Cela veut dire qu'on n'a pas respecté la mémoire des martyrs d'Octobre 1988 qui se sont sacrifiés pour amorcer l'ère du multipartisme en Algérie. On ne peut jamais tourner le dos au peuple qui demande carrément le départ de Bensalah et le reste des symboles du régime, alors que notre position est claire, nous sommes toujours prêts et nous nous sommes rangés du côté du peuple. Quant à l'invitation de Gaïd Salah à formuler des propositions, le PT estime qu'il faudra d'abord respecter la volonté du peuple qui réclame le départ de tous les symboles du système."

Soufiane Djilali, président de Jil Jadid
"Nous sommes habitués aux louvoiements du pouvoir"
"Le chef d'état-major de l'ANP, Ahmed Gaïd Salah, a tenu mardi un discours extrêmement dur et virulent à l'égard de la classe politique qui avait refusé de participer à la conférence de consultation qu'Abdelkader Bensalah a organisé. Mieux, le vice-ministre n'a pas manqué de s'attaquer frontalement à la population qui rejette massivement le gouvernement de Noureddine Bedoui. En fait, et pour recentrer le débat, le général de corps d'armée, Ahmed Gaïd Salah, a tenté de faire accepter sa feuille de route par le peuple et ce, en se projetant dans la perspective de l'élection présidentielle du 4 juillet prochain. Aujourd'hui (hier, ndlr), il revient, à travers un nouveau communiqué publié par le ministère de la Défense nationale, sur ses propos en assouplissant sa position. Une sorte de nouveau discours. Le chef d'état-major de l'Armée nationale populaire a donc fini par revoir sa copie. Le parti Jil Jadid estime tout de même que c'est une bonne chose. En analysant bien ses propos, nous estimons que Gaïd Salah s'est finalement aperçu que l'opinion publique n'a pas accepté ses propos. Il a lâché du lest. Les nouveaux propos de Gaïd sous-entendent qu'il y a même une proposition de collaboration pour sortir de cette impasse politique. C'est une amorce à une nouvelle perception, puisqu'il s'est dit prêt à écouter toute proposition. Cela étant, nous restons dubitatifs, puisqu'on nous a habitués par le passé à ce genre de discours d'un pas en avant et deux pas en arrière. Autrement dit, nous sommes habitués aux louvoiements du pouvoir, reste à savoir à quel degré. On attendra encore pour voir et discuter d'une feuille de route tout en trouvant la formule et la forme pour amorcer ce dialogue."

Lakhdar Belkhellaf, PJD-Adala
"Le vice-ministre de la Défense nationale a voulu rectifier le tir"
"Dans le discours prononcé mardi lors de sa visite à la 1re Région militaire à Blida, le chef d'état-major de l'ANP s'adressait, en fait, aux partis qui persistaient dans la position de rejet de toute initiative de dialogue. S'agissant des attaques frontales du chef d'état-major à l'égard de la classe politique qui a préféré boycotter une rencontre de concertation organisée par une personne qui se trouve être rejetée massivement par le peuple, le vice-ministre de la Défense nationale a évoqué, en réalité, un dialogue qui n'a pu drainer que des représentants des micro-partis politiques, par conséquent on ne peut parler de dialogue à ce titre, d'autant que l'initiateur, Abdelkader Bensalah, a, lui-même, boudé la rencontre. Ce qui explique, de notre point de vue, la mise au point qu'il a faite aujourd'hui (ndlr hier mercredi) où il a annoncé ‘'l'engagement de l'Armée nationale populaire à préserver les nombreux acquis de la nation. Par la même occasion il a approuvé toute proposition constructive et initiative utile allant dans le sens du dénouement de la crise pour mener le pays vers la paix''. Pour nous, cette nouvelle sortie qui s'apparente bien à une invitation directe au dialogue, est adressée à toutes les forces politiques du pays. Le PJD estime néanmoins qu'il n'y a pas d'autre issue à l'impasse politique du pays qu'un vrai dialogue constructif entre le peuple et la seule institution de la République encore valable, l'ANP en l'occurrence. Le PJD estime dans le même ordre d'idées qu'avec l'appui de l'armée, on parviendra à concrétiser les revendications du peuple. La mise au point de Gaïd se veut, sur un autre plan, un appel à une solution politique où toutes les forces doivent être conviées pour sortir de cette crise qui n'a que trop duré. Nous saluons cette initiative politique, si c'en est une. L'on peut dire enfin que le chef d'état-major a voulu rectifier le tir."

Mohamed SaId, président du PLJ
"Appel aux décideurs réels pour revoir leur position"
"Le PLJ qui a boycotté la conférence initiée par la présidence de l'Etat, réaffirme que la revendication du changement radical exprimée crescendo depuis l'élan du 22 février par les voix des millions d'Algériens qui retentissent de tous les milieux, de tous les âges et à travers tout le territoire national, ne peut être satisfaite sous l'autorité d'un pouvoir synonyme de continuation du 5e mandat et de confiscation de la volonté populaire. Rassurer le peuple comme il est souligné dans le discours du chef d'état-major, implique nécessairement l'application immédiate des articles 7 et 8 de la Constitution, seule voie permettant au peuple la réalisation des aspirations légitimes auxquelles il manifeste son attachement quotidiennement et avec détermination. Cette mesure ne saurait certainement s'accommoder de l'existence de symboles du pouvoir dont l'entêtement constitue désormais une menace pour la stabilité et la sécurité du pays. Le PLJ lance un appel aux décideurs réels pour revoir leur position afin d'éliminer tout risque d'être en contradiction avec l'une ou l'autre des revendications populaires légitimes dont d'ailleurs seule une partie limitée a été réalisée à ce jour."
Hanafi H.


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