La classe politique a proposé plusieurs pistes de sortie de crise. Les unes comme les autres se rejoignent à quelques détails près sur l'impératif d'un consensus autour des personnes censées manager la transition, la nomination d'un gouvernement de technocrates et de compétences et la mise en place d'une commission indépendante de préparation des élections, excluant, bien entendu, les individus issus de l'ancien régime de la gestion de la transition. Les propositions ne manquent pas. Le problème, c'est que les décideurs actuels semblent ne vouloir agir que selon leurs propres initiatives, ce qui ne sera, certes, pas sans risque, notamment en ce qui concerne l'impératif d'un consensus politique autour de la gestion actuelle et prochaine de la crise. Tout en dénonçant l'obstination des décideurs actuels "à exécuter et à imposer leur propre feuille de route", le Front des forces socialistes (FFS) estime que "seule l'amorce d'un véritable processus démocratique de transition est à même de réunir les conditions d'un vrai consensus national". La semaine dernière, le FFS a réitéré sa disponibilité et son engagement à "construire avec d'autres énergies et d'autres acteurs un vrai rapport de force politique, éviter l'alternance clanique et permettre de construire l'alternative démocratique". Le nœud du problème est de parvenir, selon le FFS, à créer un rapport de force afin de faire admettre la possibilité d'une solution à la crise en dehors des pistes suggérées par le régime. Même son de cloche chez Mouwatana. Ou presque. Ce mouvement a appelé la classe politique à "s'unir autour de propositions minimales pour engager la période de transition politique", suggérant "le recours à des personnalités nationales" pour dialoguer avec le pouvoir. Dans un communiqué posté mercredi dernier, Mouwatana estime que pour organiser le changement, la solution est plutôt politique. "Elle passe par le dialogue, afin de mettre en place le mécanisme de la transition démocratique." Le RCD (Rassemblement pour la culture et la démocratie) propose, quant à lui, l'élection d'une haute instance de transition qui sera composée d'un magistrat, d'un universitaire et d'un syndicaliste. Cette composition est à même de donner "un minimum de légitimité à l'instance qui va gérer la transition". Le PT (Parti des travailleurs), fidèle à ses positions d'avant la révolution du 22 février, suggère une Assemblée constituante qui, aux yeux de sa secrétaire générale, Louisa Hanoune, est "la seule garante de la souveraineté populaire". Cette Constituante que propose le PT aura pour mission de "rédiger une nouvelle Constitution ou réviser l'actuelle, définir la nature du régime, assurer l'indépendance de la justice, la séparation des pouvoirs, la liberté de la presse, l'égalité entre les deux sexes…". En deux mots, l'Assemblée constituante proposée par le PT "va permettre la reconstruction politique et concrétiser la refondation politique et institutionnelle nationale". D'autres acteurs politiques, à l'instar d'Ali Benflis, président de Talaie El-Houriat, conditionnent l'amorce d'une véritable transition par la démission des responsables actuels, dont Abdelkader Bensalah et Noureddine Bedoui, et l'installation d'un gouvernement de compétences nationales. D'aucuns pensent, pour ainsi dire, que la solution suggérée par le strict respect de l'article 102 de la Constitution ne pourrait être en soi le compromis idoine pour la sortie de crise. Encore moins cet acharnement à maintenir les têtes d'affiche de l'ancien régime pour la gestion d'une transition vers un nouveau modèle de gouvernance. C'est dire que sur ce chemin difficile de transition, plusieurs pistes de travail sont suggérées par une classe politique qui craint, désormais, que la pensée unique puisse prendre à nouveau le dessus sur le débat démocratique.