Et si les poursuites engagées contre les responsables de l'Etat, dans le cadre des affaires liées à la corruption, finissaient par toucher et rattraper l'ex-président déchu, Abdelaziz Bouteflika, comme le réclament la rue et une grande partie de l'opposition ? Dans son discours, hier à Tindouf, le chef d'état-major de corps d'armée, Ahmed Gaïd Salah, a laissé la porte ouverte à un éventuel procès contre Abdelaziz Bouteflika, à la tête du pays, vingt ans durant, et responsable des désignations des responsables en charge des affaires de l'Etat et dont certains sont aujourd'hui traduits devant les tribunaux. "(…) Il y a lieu d'affirmer, encore une fois, la détermination de l'institution militaire à accompagner la justice, avec une ferme conviction et un sens élevé du devoir, ainsi que de la protéger de façon à lui permettre d'exécuter convenablement ses missions et s'acquitter judicieusement de son rôle de moralisateur, en déterrant tous les dossiers et en les traitant en toute équité quelles que soient les circonstances, de façon à faire comparaître devant la justice tous les corrompus quels que soient leur fonction ou leur rang social", a insisté Gaïd Salah. "Partant du fait que la lutte contre la corruption n'admet aucune limite et qu'aucune exception ne sera faite à quiconque, cette voie sera celle que l'institution militaire veillera à entreprendre avec détermination, posant ainsi les jalons de l'affranchissement de l'Algérie du vice de la corruption et des corrupteurs avant la tenue de la prochaine élection présidentielle", a-t-il promis. Même s'il s'agit à l'évidence de poursuites à l'encontre des "corrompus" et des "corrupteurs", il demeure entendu que la précision "aucune exception ne sera faite à quiconque" peut être déclinée comme une suggestion à poursuivre tous ceux qui ont couvert, qu'ils soient responsables politiques ou cadres gestionnaires, tout acte de prévarication. Et Abdelaziz Bouteflika, même s'il n'a pas trempé dans les affaires, se voit désormais politiquement engagé, étant le premier responsable des nominations. Tayeb Louh épinglé Le vice-ministre de la Défense a tiré à boulets rouges sur l'ancien ministre de la Justice, Tayeb Louh, qu'il ne cite pas au demeurant, accusé d'avoir mis en place, derrière un prétendu chantier de réformes, un cadre juridique qui a encouragé la corruption. "Il apparaît clair aujourd'hui au peuple algérien à travers tous ces dossiers présentés devant la justice qu'il a été procédé par le passé et de manière délibérée à la mise en place de conditions propices à la pratique de la corruption. Il apparaît également à travers cela que ce qu'on appelait à l'époque réforme de la justice n'était malheureusement que des paroles en l'air et des réformes creuses qui, bien au contraire, ont encouragé les corrompus à persister dans leurs méfaits et ont été parrainés pour empiéter les droits du peuple et enfreindre les lois délibérément sans crainte et sans aucune conscience", s'est insurgé Gaïd Salah. Faut-il en conclure que l'ex-ministre est également dans le collimateur ? Si la présomption d'innocence est de mise, il reste que cette charge n'augure rien de bon pour l'ex-ministre de la Justice, responsable de l'amendement de la loi sur la corruption de 2006 que l'opposition avait vivement critiquée. "L'heure des comptes est arrivée et le temps d'assainir notre pays de toute personne malhonnête qui s'est laissée tentée de troubler la vie quotidienne du peuple algérien par de telles pratiques et de tout ce qui a obstrué les horizons face aux Algériens et semé la peur, voire le désespoir en l'avenir", soutient le chef d'état-major de l'armée.