Des milliers de citoyens venus des quatre coins de l'Algérie ont afflué, hier, à Taourirt Moussa, pour prendre part à l'habituel pèlerinage sur la tombe du chanteur et chantre de l'amazighité et de la liberté. Très tôt le matin, les citoyens commençaient à converger, en premier lieu, vers l'endroit de son assassinat, à Thala Bounane, où ils s'arrêtaient par petits groupes pour prendre des photos de ce lieu qui garde encore le secret d'un meurtre qui n'est toujours pas élucidé puisque la famille du Rebelle demande toujours la vérité sur la mort de son fils. Au chef-lieu d'Ath Douala, les élus locaux, en collaboration avec la fondation portant le nom du Rebelle et l'association culturelle Imache-Ammar, ont procédé à la pose de la première pierre pour la réalisation de deux stèles à l'effigie de deux figures de la lutte identitaire, tous deux natifs de la région, en l'occurrence Lounès Matoub et Imache Ammar. La cérémonie s'est déroulée en présence de plusieurs présidents d'APC, de figures politiques, d'anciens joueurs de la JSK et de nombreux citoyens de la région. S'exprimant à l'ouverture de la cérémonie, le président de l'APC d'Ath Douala, Fekhar Ammar, a rappelé le rôle de ces deux personnes dans la lutte identitaire et l'importance d'un tel projet dans la réhabilitation de leurs images notamment Imache Ammar qui demeure encore oublié et méconnu de la nouvelle génération. Présent à cette cérémonie, le maire de Tizi Ouzou, Ouahab Aït Menguellet, néanmoins fils d'un autre militant de la cause identitaire M'barek Aït Menguellet, a profité de l'occasion pour dénoncer "l'interdiction du drapeau amazigh et l'arrestation des jeunes porteurs de drapeaux lors de la marche de vendredi dernier" estimant que "c'est une décision aberrante". Le président de l'APW, Youcef Aouchiche, a, quant à lui, déclaré : "Nous sommes là pour nous recueillir à la mémoire du chanteur Lounès Matoub et dire que nous sommes toujours là pour continuer son combat, et exiger que justice soit faite quant à son assassinat." Et d'ajouter : "Une occasion aussi pour poser la première pierre pour la réalisation d'une stèle à l'effigie de cet artiste, mais aussi d'un autre qui a marqué le mouvement nationaliste algérien, en l'occurrence Ammar Imache, et ce, tout en témoignant notre reconnaissance pour le combat, qu'ils ont mené, chacun à son époque". À Taourirt Moussa, il était très difficile de se frayer un chemin afin d'accéder à la tombe de Lounès Matoub ainsi qu'au siège de la fondation qui abrite un musée dédié à sa mémoire. Moment intense de la journée, celui du recueillement et du dépôt d'une gerbe de fleurs sur la tombe du Rebelle. À cet instant, des milliers de voix fusent et scandent :"Pouvoir assassin", "Ulac smah ulac", et ce, sur un fond infini et bariolé de drapeaux amazighs. Lors de la prise de parole, la sœur du Rebelle, Malika Matoub, a expliqué que la justice n'a toujours pas fait toute la lumière sur l'assassinat de son frère ni d'ailleurs sur celle des jeunes tués lors des émeutes qui ont suivi la mort du chantre de la chanson kabyle, à savoir Aït Idir Rachid, Salhi Redouane et Ouali Hemza, mais aussi sur les victimes des événements du Printemps noir de 2001. Tout en dénonçant l'arrestation des jeunes porteurs de drapeaux amazighs lors de la marche de vendredi dernier, Malika Matoub a également appelé à continuer la lutte pacifiquement et à rejoindre massivement la marche du 19e vendredi afin de demander la vérité sur l'assassinat de Lounès. Par ailleurs et dans la même dynamique de rendre hommage à Lounès Matoub, l'association Tarwa n'Gaya d'Ardjaouna devait inaugurer hier soir une grande fresque représentant le portrait du Rebelle. La cérémonie d'inauguration devait être suivie par des activités artistiques alors qu'à l'université Mouloud-Mammeri, le mouvement des artistes Révolte'Arts compte célébrer aujourd'hui cette date par une série d'activités dont des chants, de la poésie, du théâtre, une exposition de photos, un débat ouvert et la réalisation d'un portrait de Lounès Matoub par des tagueurs.