Fait marquant de ce 21e vendredi : l'attachement des Algériens à l'idéal consigné dans la plateforme de la Soummam : "Dawla madania, machi âaskaria", "Pour un Etat civil et non un Etat militaire", ont-ils scandé. Ils étaient un peu moins nombreux que lors de la marche du 5 juillet. Et c'était prévisible. Mais ni la chaleur suffocante, ni les manœuvres et les menaces, encore moins l'euphorie qui a accompagné la qualification de l'équipe nationale la veille au dernier carré de la Coupe d'Afrique que beaucoup avaient célébrée jusqu'au petit matin dans les rues de la capitale n'ont dissuadé des milliers de personnes de descendre de nouveau, hier, dans les rues de la capitale pour battre le pavé et réitérer leur détermination à changer le système et écarter la "bande". Fait sans doute marquant de cette journée particulière que beaucoup appréhendaient : l'attachement des Algériens à l'idéal consigné dans la plateforme de la Soummam : "Dawla madania, machi âaskaria", "Pour un Etat civil et non un Etat militaire". Durant toute la durée de la marche, les manifestants n'ont cessé de scander à tue-tête que l'Algérie est "une République, pas une caserne". "Y en a marre des généraux", entonnaient-ils sur un air d'une célèbre chanson patriotique. Si le chef d'état-major de l'armée a, cette fois encore, été la cible des manifestants, la revendication phare, à côté de l'exigence de la libération des détenus d'opinion, dont celle de l'ancien maquisard Lakhdar Bouregâa dont des portraits ont été brandis, reste, sans conteste, celle portant sur l'avènement d'"un Etat civil". Des pancartes le suggéraient aussi à travers l'écriteau : "Etat civil accompagné des articles 7 et 8 de la Constitution disposant que le pouvoir constituant revient au peuple." On ne peut valablement ne pas y voir dans cette insistance des manifestants à l'avènement d'un Etat civil une réponse aux derniers propos d'Ahmed Gaïd Salah qualifiant cette demande de "slogan mensonger" et comme émanant de milieux hostiles à la tenue de l'élection présidentielle. "Ces présidentielles que nous considérons réellement comme la clé pour accéder à l'édification d'un Etat fort avec des fondements sains et solides. Un Etat que le Commandement de l'Armée nationale populaire œuvre résolument à atteindre dans des conditions de sécurité et de stabilité, en dépit des embûches que sèment sur son chemin certains de ceux qui répugnent le bon déroulement de ce processus constitutionnel judicieux, à l'instar des slogans mensongers, aux intentions et objectifs démasqués, comme réclamer un Etat civil et non militaire", a-t-il dit. "Ce sont là des idées empoisonnées qui leur ont été dictées par des cercles hostiles à l'Algérie et à ses institutions constitutionnelles. Des cercles qui vouent une haine inavouée à l'ANP, digne héritière de l'Armée de libération nationale, et à son Commandement national qui a prouvé par la parole puis par les actes qu'il demeure au service de la ligne de conduite nationale du peuple algérien et qu'il nourrit un dévouement inébranlable au serment qu'il a fait devant Allah, le peuple et l'histoire", a-t-il ajouté. Même combattue depuis l'assassinat de l'architecte du congrès de la Soummam, en l'occurrence Abane Ramdane, l'idée de la "primauté du politique sur le militaire" n'a jamais été posée avec autant d'acuité que depuis ces dernières semaines. Encore plus depuis que certaines décisions ont été prises et attribuées par la "rue" à l'institution militaire. Il faut dire que la crise de confiance est tellement abyssale que tout ce qui est entrepris ou initié par les dirigeants encore en poste suscite la méfiance. Ce n'est sans doute pas sans raison que les manifestants ont scandé plusieurs fois qu'ils réclament l'indépendance. Comprendre : la souveraineté doit être rendue au peuple qui en a été spolié depuis 1962.