L'actualité judiciaire d'Oran a été marquée, à la fin de semaine dernière, par l'interpellation de Nouasri Salah, ancien contrôleur de police et chef de la sûreté de wilaya, un des frères d'Abdelghani Hamel, l'ancien DGSN, et de Yahia Bounaka, président de l'APC de Sénia, dans le cadre des enquêtes menées par les services de sécurité sur la dilapidation du foncier à Oran. Au cœur de ces investigations, Mohamed Mebarki, directeur de l'agence foncière de wilaya, interpellé pour être entendu par la brigade économique et financière de la sûreté mais aussi d'actuels ou anciens responsables qui devraient être convoqués pour être interrogés. Et selon toute vraisemblance, d'autres arrestations pourraient intervenir dans les prochaines semaines, voire les prochains jours tant le foncier a toujours attisé les convoitises et nourri les appétences. Les citoyens et les médias ont régulièrement dénoncé le détournement de terres de leur vocation, le partage de lots de terrains entre puissants et toutes sortes de forfaitures opérées sous la protection d'amis bien placés. "Le pillage du foncier à Oran est un dossier qui fera d'énormes vagues si la justice suit son cours. Beaucoup de responsables, à tous les niveaux et dans tous les secteurs d'activité, seront traînés devant les tribunaux", prévoit un observateur averti. Selon les informations dont nous disposons, cette vague d'arrestations concernerait le détournement du foncier destiné à des projets d'utilité publique et la cession à un prix symbolique d'assiettes de terrain situées dans des zones huppées. En juin dernier, le maire RND d'El-Kerma (APC relevant de la daïra de Sénia) et une dizaine de personnes avaient déjà été arrêtées et placées sous mandat de dépôt pour plusieurs griefs, dont l'attribution irrégulière d'assiettes foncières. Aujourd'hui, l'ancien chef de la sûreté de wilaya et le président de l'APC de Sénia sont interpellés pour des dossiers liés au trafic du foncier et les investigations menées sur l'accaparement de lots de terrain dans la daïra de Bir El-Djir pourraient remonter jusqu'à Abdelghani Zaâlane — ancien ministre des Transports et directeur éphémère de campagne de Bouteflika pour un 5e mandat — qui se trouve déjà en détention provisoire pour dilapidation de deniers publics et abus de fonction du temps où il était wali d'Oran. Depuis que la justice a ouvert les dossiers de corruption et procédé aux nombreuses arrestations que l'on sait, notamment à Alger, les Oranais scrutent les instances judiciaires oranaises. Il n'est un secret pour personne que plus d'une affaire de corruption mène à la capitale de l'Ouest, tant les responsables impliqués ont, à un moment de leur carrière, exercé quelque fonction à Oran et y ont tissé leurs réseaux d'influence. D'ailleurs, leurs noms, ceux de leurs enfants ou de leurs proches et alliés ont toujours été associés aux scandales qui ont éclaté ces dernières années à l'Ouest (trafic de drogue, détournement de foncier, trafic d'influence…). Mais devant le mutisme du parquet général d'Oran et son refus de communiquer, il a été impossible de confirmer la moindre information sur l'ouverture d'enquête sur des personnalités politiques et hommes d'affaires régulièrement vilipendés par la rue. Il reste à espérer que l'installation du nouveau procureur général — elle est prévue en milieu de semaine avec la visite du ministre de la Justice — ouvrira une nouvelle page dans les relations entre la justice et la presse et que le magistrat sera plus sensible au droit du citoyen d'être informé et à la nécessité de communiquer avec les médias.