Des milliers de citoyens sont descendus dans la rue pour réitérer leur refus de la feuille de route du pouvoir et leur détermination à imposer leur propre volonté conformément aux articles 7 et 8 de la Constitution. Près d'un mois après la constitution du panel de Karim Younès, les Oranais continuent de s'opposer à tout dialogue avec un pouvoir conduit par le trio Ahmed Gaïd Salah, Abdelkader Bensalah et Noureddine Bedoui, et restent fermes sur leurs revendications. "Il n'y aura pas de dialogue tant que les représentants du système restent en place, que les détenus politiques et d'opinion ne sont pas libérés, que le peuple n'a pas reconquis sa souveraineté et que des partis, comme le FLN et le RND, continuent d'exister. Nous l'avons dit en février, nous le rappelons aujourd'hui : notre mot d'ordre, c'est yetnahaou gaâ", a résumé hier un manifestant alors que des dizaines d'autres scandaient des slogans hostiles au FLN devant le siège de la mouhafadha d'Oran, boulevard Emir-Abdelkader. Ce 26e vendredi de la révolution, des milliers d'Oranais sont descendus dans la rue pour réitérer leur refus de la feuille de route tracée par le pouvoir et leur détermination à imposer leur propre volonté conformément aux articles 7 et 8 de la Constitution. "Ya hna, ya n'touma, wallah mana habsine" (c'est nous ou vous, nous ne nous arrêterons pas), "Chaâb yourid el-istiklal", (le peuple veut l'indépendance), "Makanch el vote mâa el-îssaba", (pas de vote avec la bande) ont-ils crié tout au long de la marche pour exprimer leur détermination à prendre leur destinée en main et à construire la nouvelle république "à l'exclusion du pouvoir actuel, ses soutiens et relais, et tous ceux qui ont participé au pillage de l'Algérie". Ce vendredi encore, les manifestants s'en sont violemment pris à Gaïd Salah, dont l'attachement à l'organisation de l'élection présidentielle est considéré comme une volonté de sauvegarder le pouvoir en place. "Gaïd Salah, voté wahdek" (Gaïd Salah, vote tout seul) pouvait-on entendre parmi quelques slogans aussi virulents les uns que les autres qui lui ont été adressés. "Le rôle de l'armée et de son chef d'état-major n'est pas de s'immiscer dans les affaires politiques. Et d'ailleurs, nous répétons chaque vendredi que nous ne voulons pas d'un Etat militaire", a-t-on encore souligné. Une pancarte brandie par un jeune homme rappelant opportunément que "l'armée ne doit être que le bras du peuple, jamais sa tête". À un homme qui, provocateur, exprimait son attachement à Gaïd Salah, des manifestants ont répondu : "Engage-toi dans l'armée". Scandant inlassablement leur désir d'une Algérie libre et démocratique, les manifestants ont organisé le traditionnel rassemblement devant le siège de la wilaya, "siège de la îssaba et de la fraude", ont-ils encore répété, et appelé la justice à se pencher sur "les enfants de Gaïd Salah qui s'enrichissent sur le dos des Algériens". Avec l'interpellation, cette fin de semaine, de l'ancien chef de la sûreté de wilaya d'Oran, un P/APC et l'un des frères d'Abdelghani Hamel, beaucoup espèrent que la justice s'intéressera de près aux différents trafics enregistrés à Oran. "Les enfants des hauts responsables, dont ceux de Hamel et de Gaïd Salah, se sont beaucoup servis à Oran. Un jour, il faudra que la justice ouvre des dossiers, pour autant qu'elle soit réellement indépendante", a souhaité un des manifestants. Les manifestants ont, par ailleurs, abondamment fustigé les médias audiovisuels, qualifiés de "chiatine" à Gaïd Salah et au pouvoir, et rendu hommage à la chaîne El-Magharibia qui, par ses couvertures ininterrompues sur l'évolution du hirak, a réussi à arracher quelque crédit auprès d'une partie de la population.