La petite-fille d'Eugène Scheur, précurseur de l'école laïque sous Jules Ferry, tente de relancer “l'enseignement des indigènes" et de poursuivre ainsi la voie de son grand-père. Elle débarque alors de Miliana où elle apprit l'arabe et découvre pour la première fois la Kabylie, Aït Hichem, en 1937. Germaine n'a pas tardé à s'imprégner de la situation de la société kabyle en général et de celle des femmes d'Aït Hichem en particulier. Ces prédécesseurs avaient déjà formé des instituteurs musulmans dont Saïd Boulifa, Bensdira Belqacem… Construite en 1892, l'école d'Aït Hichem, parmi les rares écoles laïques de jeunes filles, avait déjà 45 ans en 1937. Les sœurs Abdeslam (Taos et Ouardia) furent les précurseuses de cette école, filles du Bachagha Moh Ath Abdeslam qui favorisait l'instruction avant tout. C'est d'ailleurs lui qui construisit l'école et la zaouïa de Koukou où il fut enterré. Kabylie côté femmes restitue à la mémoire collective, avec un matériel “iconographique d'une rare éloquence” : photos, dessins, témoignages… une époque déjà révolue. Germaine ou Lalla Tamazouzt (dame aimée) pour les intimes a su s'intégrer en élément très indispensable dans la société kabyle, dans la dynamique féminine d'Aït Hichem. Kabylie côté femmes retrace tous les épisodes d'un processus de développement psychosociologique des femmes, de la naissance à la mort, en passant par les travaux domestiques, les fêtes et les divertissements. L'image et l'illustration photographique demeurent encore vivantes ; elles pourront s'étirer en longs métrages. Elle écrit en p.26 : “Il serait intéressant, certes, de tracer le chemin parcouru depuis lors, mais ceci est une autre histoire… Nous avons dû nous arrêter au début d'un chapitre et le livre est resté ouvert sur une page déjà jaunie… " En effet, chaque chapitre renferme un bon document concis. Le lecteur ne sera pas dérouté, car la transcription phonétique kabyle est plus élaborée. En outre, Kabylie côté femmes est présenté par une autre grande dame ethnologue, en l'occurrence C. L. Dujardin. Un livre à (re)découvrir, sans nul doute, avec beaucoup d'émotion. LIMARA B.