D'aucuns s'attendent à un taux d'abstention relativement élevé alors qu'on est quasiment sûr, selon de nombreux observateurs, que les formations politiques classiques, à l'instar d'Ennahda et des partis du courant moderniste, seront sanctionnées lors de ce scrutin. Entre deux tours d'une élection présidentielle inédite, les électeurs tunisiens sont appelés de nouveau à l'urne pour élire aujourd'hui leurs députés à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP). Les élections législatives auront lieu à une semaine du second tour de l'élection présidentielle anticipée. Il s'agit du deuxième scrutin législatif depuis l'adoption de la nouvelle Constitution en 2014. 15 000 candidats se sont présentés pour cette élection qui, selon la presse tunisienne, n'a pas suscité beaucoup d'intérêt contrairement au scrutin présidentiel. Les enjeux de ce scrutin sont pourtant importants du fait notamment que la Constitution de 2014 place le Parlement au cœur du pouvoir. C'est un instrument incontournable dans la prise de décision. Mais selon des observateurs, le manque d'engouement pour ce scrutin s'explique en grande partie par la désaffection quasi générale des Tunisiens vis-à-vis d'une classe politique traditionnelle qui a montré ses limites. Sur ce plan, les électeurs tunisiens retiennent plusieurs griefs contre les partis politiques ayant exercé le pouvoir lors de la première législature (2014/2019) menée par le tandem Nida Tounes du défunt président Béji Caïd Essebsi et le Mouvement Ennahda de Rached Ghannouchi. Ni les grandes attentes socioéconomiques n'ont été satisfaites ni le saut qualitatif en termes de gouvernance démocratique n'a été franchi. D'une part, le chômage a atteint des proportions inquiétantes, en dépassant la barre des 15%, alors que les moyens pour faire baisser l'inflation (elle oscille entre 6 et 7%) sont très insuffisants pour espérer renverser cette tendance. D'autre part, la Tunisie assiste impuissante à l'émergence de certaines pratiques qui ont beaucoup nui à la crédibilité de la fonction politique, à l'image de la corruption qui a dangereusement progressé ces dernières années. Les Tunisiens commencent sérieusement à douter de la crédibilité des institutions de leur pays. Première sanction : d'aucuns s'attendent à un taux d'abstention relativement élevé alors qu'on est quasiment sûrs, selon de nombreux observateurs, que les formations politiques classiques, à l'instar d'Ennahda et des partis du courant moderniste soient punis lors de ce scrutin. La surprise pourrait par contre venir des nouvelles figures qui ont émergé récemment à la faveur de l'effacement des formations traditionnelles. Les candidats dits "populistes" risquent fort bien de rafler la mise lors de ce vote. Ils ont gagné du terrain en s'attaquant d'abord à une classe politique classique éprouvée ensuite, en véhiculant un discours articulé essentiellement autour des questions d'ordre sociales. Les résultats du premier tour de l'élection présidentielle sont à ce propos un indicateur fiable. Nombre d'observateurs s'attendent à ce que la dynamique du vote sanction qui a écarté de la course à la présidence des figures politiques connues, se poursuive lors de ces législatives, dont les résultats préliminaires sont attendus le 9 octobre. Les indépendants pourraient ainsi se tailler la part du lion au Parlement au même titre que le parti créé en juin par Nabil Karoui, Qalb Tounes. Ce dernier ayant fait campagne en proposant un plan de lutte contre la pauvreté, pourrait être le premier parti au Parlement, selon plusieurs sondages officieux.