Chelsea, après avoir brisé l'an passé le règne sans partage exercé, depuis près d'une décennie, par Manchester United et Arsenal sur le Championnat d'Angleterre de football, s'impose comme le prétendant majeur à sa succession, devant ses deux rivaux traditionnels et Liverpool. Avec l'alliance de la fortune du milliardaire russe Roman Abramovitch et du génie technico-tactique du Portugais Jose Mourinho, Chelsea a conquis en mai son premier titre depuis 50 ans. Avec une seule défaite en 38 matches, les Blues ont relégué au rang de vassaux Manchester United et Arsenal. La précédente équipe à s'être ainsi immiscée en haut du palmarès était Blackburn en 1995. Mais si les Rovers n'avaient tenu qu'une très courte régence, Chelsea semble prêt à bâtir une authentique dynastie. Après avoir dépensé 123 millions d'euros l'été passé, le club londonien s'est fait tout juste un peu plus raisonnable cette fois-ci. Pour 43 millions d'euros, sont arrivés l'attaquant anglais Shaun Wright-Phillips (ex-Manchester City) et le défenseur espagnol de l'Athletic Bilbao, Asier Del Horno. Mais, ce montant pourrait être quasiment doublé si les Blues arrachaient, finalement à Lyon, le milieu ghanéen Michael Essien. Avec son effectif extrêmement cohérent, Chelsea a indéniablement les armes pour réussir le doublé, ce que Manchester United est le dernier à avoir achevé (1998-1999, 1999-2000, 2000-2001). Cependant, les Blues devront tout de même méditer l'exemple d'Arsenal, invaincu lors de son titre en 2004, mais trop juste l'année suivante. “Nous perdrons des matches, perdrons des compétitions. Nous ne pouvons pas tout gagner, dans le football moderne c'est impossible”, reconnaît Mourinho, dont la Ligue des champions sera un autre objectif majeur, Chelsea ayant échoué en demi-finale ces deux dernières années. “Je pense simplement qu'il est normal que la deuxième saison soit meilleure que la première”, enchaîne cependant le manageur portugais, alors que Chelsea a montré ses ambitions en dominant dimanche Arsenal lors du Community Shield (2-1). Auteur d'une saison 2003-2004 époustouflante, avant d'être coupé dans son élan à Manchester United, en octobre dernier, après 49 matches sans défaites en Championnat, Arsenal n'a pas les mêmes certitudes que son voisin. Les Gunners ont perdu leur capitaine Patrick Vieira, parti à la Juventus Turin pour 20 millions d'euros. Avec le départ, à 29 ans, du milieu de terrain français, arrivé à Arsenal en 1996, le club londonien tourne une page dorée de son histoire. “Patrick laissera un vide immense et je ne vois pas qui sera capable de le remplacer”, reconnaît le défenseur français Pascal Cygan. Les Gunners, qui auront pour capitaine Thierry Henry, meilleur buteur du championnat l'an passé (25 buts), ont toujours pour eux leur jeunesse et l'attrait de leur jeu collectif. La pression est peut-être plus vive encore à Manchester United, seulement troisième ces deux dernières années. Il faut remonter 14 ans en arrière pour retrouver trace de deux saisons aussi catastrophiques pour les Red Devils, qui n'ont pu gagner que la Coupe d'Angleterre en 2004. L'hostilité des spectateurs au rachat du club par le milliardaire américain Malcolm Glazer a avivé la tension, même si aucun bouleversement n'a encore eu lieu. Alex Ferguson, le manageur historique, a conservé la confiance du nouveau pouvoir et sait disposer d'un potentiel offensif intéressant. Enfin, Liverpool a changé de statut, après son inattendu titre de champion d'Europe. Il est maintenant attendu sur la scène nationale. Avec leur capitaine magique Steven Gérard, resté après avoir longuement hésité, et leur manageur espagnol Rafael Benitez, qui a mieux intégré les spécificités du jeu anglais, les Reds s'imaginent fêter leur premier sacre depuis 15 ans.