L'ONG allemande Sea-Eye a pu sauver samedi dernier en Méditerranée 90 migrants qui dérivaient dans un canot de sauvetage, et a accusé une "milice libyenne" de l'avoir menacée avec des armes. "Nous avons pu faire monter à bord les 90 personnes, dont deux femmes", a déclaré hier le porte-parole de l'ONG, Gorden Isler. "Mais nous sommes sous le choc : nous n'avons jamais été menacés de la sorte !", a-t-il ajouté, accusant "les pays de l'Union européenne de laisser agir de telles personnes armées au comportement brutal". Après avoir reçu un appel de détresse venant de personnes à bord d'un canot de sauvetage au large des côtes libyennes mais qui se trouvait à ce moment-là, selon l'ONG, dans les eaux internationales, le navire Alan Kurdi a pu localiser l'embarcation à la dérive pour lui porter secours. "Alors que nous avions déjà pu récupérer 10 personnes à bord, notre bateau a été entouré par trois vedettes rapides sur lesquelles se trouvaient des gens masqués et lourdement armés", a expliqué M. Isler. Celles-ci, surmontées "d'un drapeau libyen", ont effectué des tirs de prévention en l'air et dans l'eau dans laquelle étaient tombés plusieurs migrants, selon Sea-Eye. L'ONG estime qu'elle ne se situait pas dans les eaux territoriales libyennes et a précisé se diriger désormais vers l'île italienne de Lampedusa. L'équipage du Alan Kurdi a cependant demandé aux autorités maltaises et italiennes de procéder à l'évacuation d'urgence d'une femme enceinte dont la petite équipe médicale à bord redoute qu'elle ait perdu son enfant. Cette opération de sauvetage est intervenue une semaine après celle de 104 personnes par le navire Ocean Viking de l'ONG SOS Méditerranée, qui avait récupéré des occupants d'un bateau pneumatique en détresse à 50 milles nautiques des côtes libyennes. Le chaos qui a suivi la chute de l'ancien dirigeant Mouammar Kadhafi en 2011 a fait de la Libye la voie privilégiée pour les migrants originaires d'Afrique de l'Est, du Sahel et du Moyen-Orient, cherchant à rejoindre l'Europe. Selon l'agence de l'ONU pour les réfugiés (HCR), plusieurs milliers de migrants se trouvent bloqués en Libye, dans des conditions déplorables. Un "pré-accord" a été trouvé à La Valette (Malte) le 23 septembre entre la France, l'Allemagne, l'Italie et Malte, ces deux derniers pays étant en première ligne pour les arrivées de migrants. Cette initiative doit permettre d'éviter que les bateaux humanitaires restent bloqués en mer pendant des semaines en attendant que des pays acceptent, au cas par cas, d'accueillir les migrants secourus.