Nullement impressionnés par la violence qu'ils ont subie la semaine dernière, les Oranais ont tenu promesse, ce mardi, en investissant la rue en réponse à ceux qui veulent étouffer le mouvement populaire du 22 février. Le 45e mardi de contestation de la communauté universitaire soutenue par les citoyens avait valeur de test, encore une fois, pour la solidité et l'abnégation du hirak oranais, trois jours après les agressions physiques et verbales dont ont été victimes les manifestants vendredi dernier. Le choc émotionnel étant toujours présent, les appels au meurtre résonnant encore, ceux qui se sont retrouvés mardi dernier sur la place du 1er-Novembre ont eu le courage de braver l'inconnu d'autant plus qu'aucune arrestation dans les rangs des baltaguia n'a été signalée bien que leurs identités soient connues des services de sécurité et que des vidéos circulent sur les réseaux sociaux les montrant à visage découvert, certains poursuivant les manifestants avec différentes armes à la main. Même si le nombre des présents n'était pas très important comparé à celui des dernières semaines, vacances universitaires et veille du réveillon obligent, les manifestants ont tenu à battre le pavé et reprendre l'itinéraire qu'ils parcourent depuis le 22 février dans une marche pour briser le mur de la peur. En effet, l'appréhension était au rendez-vous et beaucoup craignaient un remake de vendredi dernier et on pouvait entendre, de surcroît, des remarques désobligeantes reprenant la terminologie nauséabonde des trolls qui sévissent sur la Toile. Deux mots d'ordre ont accompagné ce 45e mardi estudiantin : "Chaâb chaâb, khawa khawa, lidarou fitna, maâ lkhawana" (Tous les Algériens sont frères et les tenants de la sédition sont avec les traîtres) et l'éternel et indémodable "Dawla madania machi aâskaria" (Etat civil et non militaire). D'autres slogans appelant à la libération des détenus d'opinion ont été scandés par la foule. Si vendredi, les manifestants étaient livrés aux bandes de voyous qui se sont attaquées aux femmes et aux enfants, ce mardi, on a remarqué une présence policière visible à la place des Victoires, à la jonction avec Saint-Pierre. Dès que la procession des marcheurs a dépassé ce point, un 4X4 et un fourgon de la police se sont mis sur leurs pas. L'appel citoyen et les condamnations de ce qui s'est passé à Oran, dénonçant la passivité des services de sécurité ont eu apparemment un effet bénéfique sur la sécurité des manifestants.