L'Exécutif semble ignorer les cris de détresse des organisations patronales quant à l'état de la trésorerie de plusieurs petites et moyennes entreprises. Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a annoncé, avant-hier en début de soirée, dans son discours à la nation, douze nouvelles mesures pour faire face au coronavirus. Alors que beaucoup de pays ont annoncé des plans de soutien au profit de leurs entreprises, impactées par l'épidémie de coronavirus, en Algérie, le gouvernement semble ignorer les cris de détresse des organisations patronales quant à l'état de la trésorerie de plusieurs petites et moyennes entreprises. Les seules mesures économiques annoncées, à juste titre, certes, par le président Tebboune, concernent "l'interdiction d'exportation de tout produit stratégique, qu'il soit médical ou alimentaire jusqu'à la fin de la crise, à l'effet de préserver les réserves stratégiques nationales" et la lutte contre "les spéculateurs qui exploitent, sans scrupule, l'état de panique générale pour stocker les produits de base dans le but de susciter une pénurie et augmenter les prix". Il y a quelques jours, le Cercle d'action et de réflexion autour de l'entreprise (Care) et le Centre des jeunes dirigeants algériens (CJD), accompagnés par une dizaine d'organisations professionnelles et patronales, avaient tiré la sonnette d'alarme sur la situation des PME en difficulté. "La crise économique que vit le pays depuis 2014 s'est aggravée durant l'année 2019 au point de mettre les entreprises, en particulier les plus petites d'entre elles, les PME, en sérieuses difficultés de trésorerie", relevaient les signataires du plaidoyer. La baisse de la commande publique et le blocage de certains budgets ont entraîné des crises de liquidités en cascade. En l'espace de quelques mois, tous les secteurs de l'économie se sont trouvés affectés par une baisse d'activité. "La baisse de l'activité, les retards de règlement des clients et des organismes étatiques, l'alourdissement des charges fiscales et sociales sur les entreprises, l'absence de flexibilité et de dialogue de la part des autorités fiscales et sociales (Cnas et Casnos), tout cela entraîne, pour les entreprises, des difficultés de trésorerie telles, qu'elles risquent de disparaître purement et simplement", avertissent le Care et le CJD. Sur le court terme, ces organisations patronales et professionnelles évoquent le risque de disparition d'un grand nombre d'entreprises et la hausse du chômage. De nombreuses entreprises ont été contraintes à la réduction, voire à la cessation d'activité, ce qui se manifeste par des compressions d'effectifs. Une estimation du Care, sur la base des chiffres de l'emploi de l'ONS et des déclarations de baisse d'activité des différents représentants des secteurs économiques, table sur "une perte potentielle d'emplois entre 714 000 et 1 490 000", rappellent les signataires du plaidoyer. Le président de l'Association générale des entrepreneurs algériens (Agea), Mouloud Khelouf, avait indiqué, au début du mois en cours, qu'entre 20 000 et 25 000 sociétés du secteur du bâtiment, des travaux publics et de l'hydraulique (BTPH) sont à l'arrêt technique. 150 000 à 200 000 travailleurs ont été mis au chômage. "L'Etat doit faire un effort vis-à-vis des entreprises de réalisation", a-t-il estimé, ajoutant que la crise du secteur du BTPH a impacté, également, l'industrie des matériaux de construction. Beaucoup de signaux indiquent que la machine économique nationale est à l'arrêt. Compte tenu de l'urgence de la situation, les organisations patronales demandent, notamment, la mise en place d'un moratoire fiscal et parafiscal à destination des entreprises en difficulté. Elles appellent également les banques à proposer le plus largement possible un rééchelonnement de la dette sur des périodes en rapport avec la situation de crise dans laquelle se trouve l'entreprise.