À l'instar des personnels médical, de la Protection civile, des services de la police et de la Gendarmerie nationales, les éboueurs sont fortement sollicités en cette période de pandémie. Bien qu'ils soient souvent confrontés aux pires difficultés socioprofessionnelles, les travailleurs communaux d'Oran chargés de la collecte des ordures ménagères continuent d'accomplir leur travail non sans pousser des coups de gueule, à la fois contre leurs responsables et contre les citoyens indélicats. "Les salaires ne suffisent pas, ils nous sont versés avec de gros retards, en plus les citoyens sortent leurs sacs de détritus n'importe comment et à n'importe quelle heure !", les a-t-on souvent entendu pester. Ces difficultés se sont compliquées depuis l'apparition du coronavirus et les risques de contracter le Covid-19 dans l'exercice d'un travail devenu à haut risque, puisqu'il met quotidiennement les éboueurs face aux foyers de microbes, au moment où les spécialistes appellent au confinement pour éviter la propagation de l'épidémie. Si de rares communaux sont équipés de gants et de masques de protection, la grande majorité évolue le visage nu et les mains recouvertes de gants de fortune. "Il faut quand même avoir de la reconnaissance pour ces hommes qui continuent de ramasser nos ordures malgré le manque de moyens", salue un citoyen de Belgaïd (est d'Oran), en regrettant que le ramassage ne se fasse pas très régulièrement. Contrairement à d'autres zones mieux dotées, les équipes de ramassage de Belgaïd ne disposent pas des moyens matériels leur permettant de s'acquitter convenablement de leur tâche. "Les camions sont en panne et il faut souvent que nous en louions pour parvenir à nettoyer toutes les rues", a dénoncé un des éboueurs en signalant que, souvent, seuls les points noirs de la grande avenue (bordée par les commerces) sont éradiqués : "Faute de moyens, nous ne pouvons pas pénétrer dans les quartiers résidentiels." Résultats, les nouvelles cités de la zone est d'Oran restent parfois des jours dans l'attente de l'enlèvement de la multitude de bacs à ordures qui défigurent le paysage urbain et menacent la santé publique. Malgré tout, les éboueurs de la wilaya d'Oran font leur possible pour s'acquitter d'une tâche aussi vitale pour la cité qu'ingrate pour eux et leurs familles. "Nous avons observé des grèves, organisé des manifestations, mais rien n'y fit. Nous sommes toujours aussi démunis, et avec cette épidémie, la tâche s'est sérieusement aggravée", a déploré un éboueur. La situation déplorable des communaux d'Oran doit beaucoup à la mauvaise gestion des pouvoirs publics et leur imprévoyance. Le constat a été fait il y a plusieurs années, à la fois par des experts algériens que des instituts spécialisés étrangers. Avec un schéma directeur de gestion de déchets, dont il était question il y a une dizaine d'années, la conjugaison des efforts des services communaux et des e ntreprises privées (une centaine dont certaines créées grâce au dispositif Ansej), Oran aurait pu régler la problématique du ramassage des ordures et mis à la disposition des éboueurs les moyens d'accomplir leur travail, tout en se protégeant convenablement contre le coronavirus.