Ce roman "se démarque par une brillante maîtrise stylistique et une vision à plusieurs niveaux de l'occupation historique de l'Algérie (…). Avec sa structure narrative profonde et historique, le récit ne vit pas dans le passé, mais il invite plutôt le lecteur à remettre en question la réalité présente". Pour la première fois de l'histoire du prestigieux prix britannique Booker Prize Foundation et du prix international de la fiction arabe, un roman algérien est le lauréat de la meilleure fiction en langue arabe pour l'année 2020, apprend-on des organisateurs qui ont annoncé les résultats avant-hier en live stream sur les réseaux sociaux. Publiée aux éditions Dar Mim, l'œuvre du jeune écrivain Abdelhouahab Aïssaoui, intitulée La cour de Sparte (Diwan Isparti), est un roman historique, chevauchant réalité et fiction. Il relate le vécu de cinq personnages ; trois Algériens et deux Français, dont on suit les parcours respectifs alors que l'empire ottoman décline et l'invasion française s'organise, entre 1815 à 1833. Chacun des trois Algériens a sa propre conception de l'indépendance, vis-à-vis à la fois des Ottomans et des Français. Pour Ibn Mayyar par exemple, la survie dépend des liens qu'il pourrait tisser, grâce à la politique, avec les deux occupants. Hamma en revanche réitère que le seul moyen de se libérer du joug colonial reste la révolution. Douja, seul personnage féminin du roman, est tiraillée entre ces visions radicales. Dans son commentaire à l'issue de l'annonce du lauréat, Mouhssine El- Massawi, président du jury et professeur de littérature arabe à l'université de Columbia, a soutenu que le roman "se démarque par une brillante maîtrise stylistique et une vision à plusieurs niveaux de l'occupation historique de l'Algérie et, de là, des conflits de toute la région méditerranéenne, avec des personnages incarnant des intérêts différents et des visions croisées. Le roman invite le lecteur à mieux comprendre (...) les différentes formes de résistance qui s'opposent. Avec sa structure narrative profonde et historique, le récit ne vit pas dans le passé, mais il invite plutôt le lecteur à remettre en question la réalité présente". Pour le professeur Yassir Suleiman, membre du jury, la force de La cour de Sparte s'exprime à travers sa capacité à remonter aussi loin dans le temps et ses récits entrecroisés qui construisent les strates du roman. À noter également que l'écrivain recevra une récompense financière de 50 000 dollars, attribuée par le département de la culture et du tourisme d'Abu Dhabi, en sus d'une traduction en langue anglaise du roman. Originaire de Djelfa,Abdelhouahab Aïssaoui,ingénieur en électromécanique de formation, a déjà plusieurs romans en langue arabe, entre autres Le Cinéma de Jacob (2012) et Sierra Del Muerte,son deuxième roman qui est détenteur du grand prix Assia-Djebar en 2015.