Au milieu d'un crépitement de balles et des cris "Allah Akbar", le soldat se trouve comme perdu et tenaillé par la peur. Le militaire n'a pas eu le temps de prendre soin d'une plante qu'il arrose chaque matin avec le peu d'eau dont il dispose dans cette contrée algérienne gagnée par le stress hydrique en pleine décennie noire. Il sera vite "braqué" par un terroriste à la barbe hirsute. Mais celui-ci se trouve à court de munitions. S'ensuit alors un duel qui a permis au soldat de prendre le dessus. L'islamiste armé, maintenant désarmé, fait semblant de répondre à l'appel à la prière diffusé à forts décibels. Faute d'eau, il entame le cérémonial avec "taymoum", cette façon de faire ses ablutions avec une pierre. Le soldat se met lui aussi à prier. Devant eux, un autre militaire blessé lors de l'accrochage assiste au spectacle. Lorsque le terroriste remarque que le militaire l'accompagne dans sa prière, il reprend son arme et la pointe sur le militaire plongé dans sa méditation. Coup de chance, le soldat a gardé sur lui la seule balle encore non utilisée. C'est ce spectacle fait de sang et de bigoterie religieuse qui s'offre au militaire qui gît dans un coin. Entre deux chahada, il baragouine cette promesse lourde de sens : "Je vais tout raconter à Dieu." Le court métrage de Mohamed Abdallah nous replonge dans le feu de la décennie noire qu'il restitue avec des images sans dialogues pour dire la douleur de cette séquence de notre histoire récente. Un autre court métrage algérien a été projeté à l'ouverture du festival. Il s'agit du film de Foued Mansour, Le Chant d'Ahmed, qui met le focus sur une rencontre inattendue entre Ahmed, un employé d'un bain maure sur le point de fermer, et un jeune adolescent plutôt marginal. Une amitié se noue entre les murs humides du hammam. Comment va évoluer cette amitié ? Intrigue. Pour aujourd'hui, c'est le documentaire long métrage de la scénariste Sara Nacer, Qu'ils partent tous (Yetnehaw gaâ !) qui est programmé. La scénariste algéro-canadienne documente la révolution du sourire du 22 Février, en donnant la parole aux jeunes acteurs du Hirak, les artistes et les étudiants notamment. Nacer explore en profondeur le mouvement pacifique inédit qui a émerveillé le monde. Tenue virtuellement en dehors des salles obscures, pour cause de confinement et de la fermeture des établissements culturels et de loisirs, la 36e édition du festival international "Vues d'Afrique" se poursuivra jusqu'au 26 avril, jour des délibérations à distance.