Torture, exécutions sommaires, charniers, l'inéluctable chute de Haftar révèle peu à peu les horreurs auxquelles était prêt ce général, à la tête de l'autoproclamée Armée nationale libyenne, pour prendre le pouvoir à Tripoli. L'ONG Human Rights Watch (HRW) a réclamé hier une enquête urgente sur de possibles "crimes de guerre" commis en Libye par l'autoproclamée Armée nationale libyenne (ANL), dirigée par le général à la retraite Khalifa Haftar. Dans un rapport publié sur son site, HRW, citant des "preuves apparentes", a précisé que les forces de Haftar, liguées contre le Gouvernement d'union nationale (GNA) reconnu par la communauté internationale, ont "torturé" et "exécuté sommairement" des Libyens et des combattants du GNA. L'ONG de défense des droits de l'homme a appelé à cet effet à une enquête urgente pour mettre la lumière sur ces cas de "crimes de guerre". "Les Forces armées arabes libyennes (FAAL, pro-Haftar) devraient enquêter de toute urgence sur les preuves apparentes de torture, d'exécutions sommaires et de profanation de cadavres (...) commis par des combattants qui lui sont affiliés", écrit Human Rights Watch dans son communiqué. Selon HRW, des vidéos, "enregistrées et partagées sur les réseaux sociaux en mai 2020", montrent des combattants, que "HRW a identifiés comme liés au général Haftar", se livrant à de tels actes. "La torture des détenus et l'exécution sommaire des combattants capturés ou qui se sont rendus sont des crimes de guerre", rappelle l'ONG dans son document. Dimanche, le Gouvernement d'union nationale, dirigé par Fayez Al-Serradj, a saisi le Conseil de sécurité de l'ONU, réclamant une enquête sur au moins 11 charniers découverts dans la ville de Tarhouna (80 km de la capitale), reprise le 5 juin par les forces loyales au gouvernement de Tripoli. Plusieurs ONG ainsi que la mission de l'ONU en Libye, horrifiées par l'ampleur des crimes contre l'humanité commis par les troupes de Khalifa Haftar, ont demandé une enquête sur ces charniers où étaient entassés femmes et enfants, parfois "enterrés vivants", selon le ministre des Affaires étrangères du gouvernement de Tripoli, Mohammed Seyyale. Dans sa lettre adressée dimanche à l'ONU, le ministre libyen a appelé à ce que le Conseil de sécurité traduise devant la Cour pénale internationale (CPI) les responsables de ces crimes, imputés à Khalifa Haftar. "Nous demandons au Conseil de sécurité d'assumer pleinement ses responsabilités conformément à la Charte des Nations unies", a-t-il fait savoir, en réclamant à l'ONU de "renvoyer la question de ces tombes à la Cour pénale internationale pour traduire les criminels en justice et veiller à ce qu'ils ne restent pas impunis". Après avoir lancé en avril 2019 une offensive sur Tripoli, siège du GNA, les troupes du général Haftar ont dû battre en retraite à la suite d'une série de revers ces dernières semaines. Ces combats aux portes de la capitale, dans un pays en proie au chaos depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011, ont fait des centaines de morts, dont des civils, et plus de 200 000 déplacés. Dans leur retraite vers l'est et le sud, les pro-Haftar ont été accusés par le GNA d'avoir posé des champs de mines. K. Benamar