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Le show cathartique de Djamel Ould-Abbès
Deux familles victimes de la “tragédie nationale” réconciliées devant les caméras
Publié dans Liberté le 19 - 09 - 2005

Un vrai spectacle a été servi, hier, à la presse nationale et internationale par le ministère de la Solidarité en conciliant en grande pompe deux familles des deux bords.
11h21mn. Siège du ministère de la Solidarité nationale, quartier Les Vergers. Birkhadem.
M. Djamel Ould-Abbès vient de faire une entrée fracassante dans une salle pleine comme un œuf. Des youyous fusent du fond de la salle. Le “gourou” est entouré d'un parterre d'associations triées sur le volet. L'événement draine caméras et reporters, et pour cause : on annonce à cor et à cri que le ministre allait réconcilier deux familles “des deux bords” : l'une victime du terrorisme, l'autre ayant produit des terroristes. Le voici d'ailleurs qui se met entre elles. Toutes des femmes. Des femmes au visage labouré par une profonde détresse. Dans une allocution de quelque 25 minutes, Ould-Abbès prêchera la bonne parole avec une profusion (et une effusion) de bons sentiments.
Qualifiant cette cérémonie d'“historique”, il rend d'entrée un vibrant hommage à “toutes les familles victimes de la tragédie nationale, à leur tête les victimes du terrorisme” (applaudissements). Le médecin-ministre exhorte très vite les présents à regarder vers l'avenir en investissant dans les vivants, “et plus particulièrement, les enfants”, dira-t-il. Opérant une véritable “thérapie de groupe” aux accents de transe cathartique, l'orateur joue avec brio la partition de la “moussalaha”. “Je ne distingue pas entre les veuves et les enfants de l'un et de l'autre bord. Celui dont le père a levé les armes contre sa patrie n'y est pour rien. On ne lui a pas demandé son avis avant de prendre le maquis”, argue-t-il, avant de confier, empathique : “En écoutant leurs histoires, j'ai envie de pleurer.” Il cite ainsi un cas édifiant : “Il y a deux enfants, deux frères, l'un a 10 ans, l'autre 12. Ils sont nés au maquis, de parents terroristes. Ils n'ont pas de patronyme. Leurs parents sont morts et l'Etat les a pris sous sa coupe. Est-il juste de les abandonner ? Non. À Sétif, il y a six frères et sœurs dont le père est mort au maquis et la mère est en prison. Devions-nous les abandonner ? Non !” Et de conclure : “Si on ne prend pas en charge ces jeunes, dans dix ans, nous allons revivre le même scénario.” Pendant qu'il parle, distribution d'un curieux livre de couverture bleue aux journalistes. “Contribution pour une réconciliation nationale globale. Une sortie de crise”, lit-on sur la page de garde. C'est le “Livre Bleu” de Ould-Abbès. De fait, voilà qu'il le saisit pour lire des extraits où il est question de réconciliation dans le Livre Saint. “Les mots “solh”, “islah”, “moussalaha” sont cités 180 dans le Coran”, précise-t-il. Un livre fort des avis d'imams orthodoxes mais aussi de celui de personnalités comme Abderrahmane Chibane, Boualamallah Gholamallah ou encore…Ahmed Ben Bella. M. Djamel Ould-Abbès revient pour insister sur la suprême nécessité de faire un travail d'intégration des franges marginales de la société en martelant : “Kifaya dem ! Plus jamais ça !” Il prévient : “Le 29 septembre, ce n'est pas leilat el qadr mais le début du vrai travail.” Tonnerre d'applaudissements. Place au show proprement dit. Deux femmes s'embrassent. Echange de bouquets de roses. Accolades. Drapeau. Youyous. Les voici drapées ensemble de l'emblème national et posant la main dans la main devant les caméras (dont celles d'Abu Dhabi TV et d'Al-Hurra). Les deux familles (qui ont requis l'anonymat) ont chacune son drame. La femme assise à gauche du ministre est venue avec sa mère. Elle a perdu deux des siens. C'était le 25 novembre 1995, près de Koléa. “J'ai perdu mon mari et mon frère. Majzara fi dari. Une boucherie dans ma maison. Nous demandons la paix et la réconciliation ou tahya Bouteflika !” lance la femme, laconique.
Micro pour la dame de droite. Celle-ci a eu deux de ses enfants au maquis et un mari disparu. L'un de ses fils, voulant lui imposer le régime de vie ayant prévalu au 7e siècle, avait arraché le carrelage de la maison et détruit le poste de télévision. La malheureuse maman finit par prendre la fuite. Elle continue à errer à ce jour quelque part, dans la wilaya de Tipasa. “Il me reste cinq enfants. Nous vivons dans une grande misère. Nous habitons dans un gourbi. Nous n'avons pas de logement. Tahia Boutefika et inchallah bladna tesseguem !” lâche la bonne femme. À un moment donné, les trois femmes joignent leurs mains les unes aux autres, puis, toutes trois portent leurs mains unies à celle de Bouteflika déployée sur une grosse affiche, le tout face aux caméras et aux crépitements des flashs des photographes. On frise la mise en scène. On frôle le ridicule. Décidément, le folklore frappe très fort. Le spectacle finit par outrer Fathia, sœur d'une victime du terrorisme. Ils ont fait des terroristes des stars, s'indigne-t-elle. Vêtue d'une robe noire, Fathia porte toujours le deuil de sa soeur, Nour-El-Houda, assassinée en 1994 à Larba. “Elle avait à peine 12 ans. Elle a été sortie de force de l'école et sauvagement égorgée. Il y a eu trois chats à son enterrement tellement les gens avaient peur. Comment voulez-vous qu'on pardonne ? Le comble est que celui qui a égorgé ma sœur se pavane en toute impunité dans les rues de Larba. C'est scandaleux !”
Plusieurs familles de victimes du terrorisme voulaient voir le ministre. Elles avaient le cœur gros. Elles ne savaient pas pourquoi on les avait ramenées. Certaines étaient venues en toute bonne foi, pensant qu'on allait leur verser une pension ou distribuer un logement. Un groupe de femmes sont assises à la sortie de la salle de conférences. Persona non grata. Elles ont les yeux rouges de larmes.
Une vieille femme nous parle de sa fille Hafidha, assassinée en 1997 à Larba. “Ils ont brûlé la maison et maintenant, je n'ai pas où aller”, dit-elle. “Nos enfants sont morts et ils veulent prendre aussi nos droits. Qu'est-ce que c'est que ça ?” fulmine-t-elle. Une autre femme renchérit : “J'ai perdu toute ma famille. Ils ont tué mon fils, mes parents, dix personnes en tout de la famille Zermani, à Larba. Je n'ai rien, ni pension, ni personne. Rien !” affirme-t-elle. Les familles continuent à se bousculer devant les journalistes. Qui va les écouter ? Pourtant, elles crient toutes : “El moussamih karim”, “tayhia Bouteflika”. Elles s'en retourneront comme elles sont venues : le cœur gros et les mains vides…
mustapha benfodil


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