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"Nos médecins sont très demandés dans les pays développés"
PR Kamel Djenouhat, ancien chef de département à la faculté de médecine d'Alger
Publié dans Liberté le 02 - 09 - 2020

Le Pr Kamel Djenouhat, actuellement chef du service "Laboratoire" de l'hôpital de Rouiba et ancien chef de département à la Faculté de médecine d'Alger, aborde dans l'entretien qu'il nous a accordé la refonte des études médicales. Il a également évoqué le profil du médecin qu'on veut former selon la carte sanitaire.
Liberté : Comment se porte la formation des médecins dans les facultés ?
Pr Kamel Djenouhat : La formation des médecins appartenant à la génération (née entre 1980 et 2000) qui a grandi avec le numérique et en partie avec l'internet, qu'on appelle aussi génération de transition, n'est pas du tout une tâche facile. La tâche sera encore plus laborieuse avec l'arrivée de la génération née à partir de l'an 2000, et ce, par rapport aux exigences de cette génération sur le plan pédagogique.
D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle les enseignants hospitalo-universitaires constatent avec regret que quelques semaines après chaque rentrée universitaires, les amphithéâtres sont de plus en plus désertés par les étudiants, témoignant de leur "mécontentement" par rapport aux méthodes d'enseignement classiques utilisées à ce jour au sein de nos facultés.
La quantité a pris donc le dessus sur la qualité de la formation. Ne serait-il pas temps de revoir cette équation complexe ?
Effectivement, la formation de la quantité se fait souvent, malheureusement, au détriment de la qualité. Néanmoins, il faut toujours relativiser le problème selon son contexte, et ce, pour ne pas tomber dans le piège de plusieurs pays occidentaux où les études de santé sont réglementées et soumises à un numerus clausus à l'origine d'un déficit profond en matière de personnel médical les obligeant souvent à faire appel aux médecins étrangers.
En effet, juste après l'indépendance, le souci primordial des autorités de la santé était de former un nombre suffisant de médecins pour assurer la couverture sanitaire de nos citoyens à travers le territoire national. Cet objectif, à mon avis, était largement atteint entre 2005 et 2015, et c'est le moment maintenant d'inverser l'équation où la qualité doit prendre le dessus sur la quantité.
Les enseignements et les programmes dispensés en graduation généraliste n'ont jamais été revus. Cela ne risque-t-il pas d'influer sur la qualité de la formation, notamment celle du médecin généraliste ?
Je pense que le fait que nos médecins continuent à trouver leur place dans les pays développés nous donne une idée sur la qualité de la formation médicale. Néanmoins, le profil du médecin qu'on veut former aujourd'hui est un peu différent par rapport à ce qu'on formait auparavant.
Ce profil dépend de la carte sanitaire actualisée où on doit passer d'une formation qui était axée beaucoup plus sur les maladies infectieuses et tropicales à un profil qui doit avoir plus de connaissances sur les maladies chroniques et les pathologies cancéreuses (maladies émergentes), où le médecin généraliste doit jouer un rôle non négligeable dans la prise en charge de ce type d'affection.
La refonte des programmes de formation est plus que nécessaire aujourd'hui, avant même le lancement du chantier de la réforme hospitalière...
En effet, le terme de refonte des études médicales est plus approprié que celui de réforme. Le chantier de la refonte des programmes a déjà démarré en 2014. Il est dirigé par la conférence nationale des doyens des différentes facultés de médecine, en étroite collaboration avec le comité pédagogique national de la refonte des études médicales.
Lequel comité est composé d'enseignants des différentes facultés de médecine, le tout travaillant sous l'égide du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. Le nouveau programme a commencé à être enseigné depuis deux ans et connaîtra sa troisième année durant la rentrée universitaire 2020-21.C'est un programme qui devrait être évalué chaque année pour d'éventuels changements et/ou améliorations.
Malgré ces quelques lacunes en graduation, l'université algérienne continue à former des spécialistes de haut niveau...
La formation d'un spécialiste passe par l'étape de résidanat où le résident possède un statut un peu particulier, positionné entre l'étudiant et le fonctionnaire à la fois.
Et, comme déjà mentionné, la qualité ne peut pas aller dans le même sens que la quantité, dans ce cas le besoin ou le nombre de résidents à former est souvent exprimé par le chef de service lui-même en fonction de ses capacités de formation sur le plan espace, équipements et ressources humaines. En plus, le terrain de stage ou de formation du résident doit être validé par le comité pédagogique national de la spécialité.
Le nombre de médecins formés chaque année est-il suffisant pour continuer à assurer le fonctionnement du système national des soins, quand on voit le nombre de médecins qui partent à l'étranger ?
Le nombre de médecins formés chaque année est largement suffisant, et je pense qu'il va tendre à la baisse durant les années à venir. Honnêtement, je n'ai pas les statistiques exactes concernant le nombre de médecins qui partent chaque année vers l'étranger mais, à mon avis, en tant qu'ancien chef du département de médecine au niveau de la Faculté de médecine d'Alger, ce pourcentage ne doit pas dépasser 10 à 15% de l'effectif formé.

Entretien réalisé par : HANAFI H.


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