Les députés que nous avons interrogés, hier, sur la légitimité de l'Assemblée populaire nationale, après les fracassantes révélations de l'ex-député FLN Bahaeddine Tliba, plaident tous pour la dissolution d'un Parlement qu'ils jugent "illégitime". Les avis divergent, certes, sur le timing à choisir pour cette opération lourde sur le plan politique. Même un député du FLN dit assumer, publiquement, la revendication de la dissolution de cette Assemblée "mal élue", mais, dit-il, pas dans l'immédiat. Tout en joignant sa voix à ceux qui désapprouvent l'actuelle APN, cet élu du Sud-ouest préfère nuancer ses propos, tout en appelant à sa disparition après le référendum du 1er Novembre. Il estime que la dissolution de l'APN ne devra pas intervenir avant l'adoption de la nouvelle Constitution et de la nouvelle loi électorale. Pour lui, le timing est très important. "Si on la dissout aujourd'hui avant le vote, on retombera dans le même problème de légitimité. Il va y avoir une nouvelle Assemblée élue sur la base des lois héritées de l'ancien régime. C'est un mal obligatoire ou inévitable. On doit donc réviser la loi selon la nouvelle vision. Une fois, la nouvelle loi fondamentale adoptée, les parlementaires rentreront à la maison", expliquera encore le député du FLN. Pour étayer le bienfondé de sa position, Slimane Saâdaoui ne manquera pas de rappeler que "les parlementaires n'ont aucune crédibilité, encore moins une légitimité". "Le peuple nous déteste. Nous sommes catalogués comme les disciples et les résidus de la îssaba de Bouteflika. C'est pourquoi nous réclamons haut et fort la dissolution impérative de cette Assemblée. Celui qui cherche à se présenter une nouvelle fois à la députation n'a qu'à aller composter sa candidature chez le peuple. Et le peuple aura ainsi une grande responsabilité s'il accepte d'élire une nouvelle fois des représentants corrompus", affirme l'élu FLN. Un parlementaire du parti Adala n'y est pas allé par quatre chemins pour appeler, pour sa part, au départ imminent de l'ensemble des députés des deux Chambres du Parlement, sans attendre la fin du processus du vote du projet de Laraba. Pour lui, le "hold-up" électoral de 2017 n'a que trop duré. "Nous réclamons depuis 2017 la dissolution pure et simple de l'APN. Cette revendication dure depuis plus de 3 ans. L'actuelle Assemblée, qui ne dispose d'aucune crédibilité, n'a pas le droit de voter ce projet de Constitution. La dissolution du Parlement avant le vote du texte de Laraba est une urgence absolue réclamée par le peuple algérien et le Hirak", défendra-t-il. Il ne manquera pas de s'exprimer, au passage, sur la teneur de la mouture de la Constitution. "Le texte de Laraba renforce davantage les pouvoirs du chef de l'Etat plus que celle de Bouteflika de 2016. On nous propose aujourd'hui une Constitution corona, en nous mettant devant le fait accompli", dénoncera, sans ambages. Les députés du FFS restent fidèles à la position politique historique du parti cher à Hocine Aït Ahmed. En effet, un de leur député rappellera, pour la circonstance, que "la solution consiste en l'élection d'une Assemblée constituante ou bien en la mise en place d'un processus constituant où le peuple doit être impliqué". "La dissolution de l'APN ne règle en rien les problèmes qui rongent le pays. Elire une nouvelle Assemblée avec les mêmes pratiques ne sert absolument à rien. Il ne faut pas oublier que l'actuel président de l'APN, qui représente un parti minoritaire, a soutenu le 5e mandat de Bouteflika, et aujourd'hui, il se permet de critiquer. Il faut plutôt commencer par ouvrir le champ politique et médiatique pour réhabiliter les institutions de l'Etat". Quant à l'ouverture du procès de l'ex-député Tliba, le député estime que "les Algériens savent tous que des députés ont été élus avec de l'argent sale. En fait, pour être député du FLN en 2017, il fallait avoir soit de bonnes relations directement avec Saïd Bouteflika et Tayeb Louh, soit avoir de l'argent sale", conclura le député du FFS. De so côté un parlementaire du RCD soutiendra que les révélations faites par l'ex-député Tliba relatives à "l'achat" des sièges de députés pour la Chambre basse, n'ont rien d'étonnant. "Les sièges de députés du FLN sont le fruit de la corruption. Cela n'est pas nouveau et nous l'avons dénoncé à maintes reprises. Ces pratiques ne peuvent avoir de solutions qu'à travers une justice indépendante et libre. Et ce n'est pas avec une justice soumise et aux ordres que nous pouvons espérer des enquêtes pour confirmer tout un système frauduleux sur lequel est construit tout l'édifice institutionnel du pays", déplorere-t-il.