L'Assemblée nationale, qui confirme à chaque mandature son statut de chambre d'enregistrement des lois, consolide la désaffection des électeurs. La huitième législature de l'Assemblée populaire nationale, issue des élections législatives du 4 mai, sera installée officiellement mardi prochain. Il sera procédé ce jour-là à l'appel des députés, proclamés élus à la chambre basse par le Conseil constitutionnel, à la validation de leur mandat puis à l'élection du président de l'institution parlementaire. Pour la nouvelle mandature, les 462 sièges sont répartis entre 34 partis politiques, 2 alliances d'essence islamiste et des indépendants. L'Assemblée nationale demeure dominée, après la proclamation des résultats définitifs par le Conseil constitutionnel, par le FLN et le RND qui ont obtenu respectivement 161 et 100 sièges. Le FLN perd ainsi du terrain par rapport à 2012, scrutin législatif à l'issue duquel, il avait obtenu 220 sièges. L'alliance MSP-Front du changement est arrivée en troisième position avec 34 élus. Elle est talonnée par Taj (20 députés) puis par l'alliance Adala-Ennahda-Bina (15 élus). Cette législature est marquée par une légère percée des islamistes qui ont obtenu, toutes formations politiques confondues qui se revendiquent de cette mouvance, 68 sièges contre une soixantaine, lors du mandat précédent. Ce rebond demeure faible en réalité, par rapport aux ambitions des uns et des autres. Le résultat atteint par les islamistes reste largement en dessous des scores réalisés en 1990. En sus, 120 parlementaires sortants ont été réélus. Ils sont issus majoritairement du FLN et du RND qui n'ont pas vraiment renouvelé leurs effectifs à la chambre basse. Viennent ensuite les deux alliances islamistes (HMS-FC d'un côté et Adala-Ennahda-Bina de l'autre) et le Parti des travailleurs qui a aussi gardé ses députés les plus actifs dans l'hémicycle. La proportion des députés réélus aurait pu être nettement plus grande si le FLN n'avait pas perdu une soixantaine de sièges sur le score qui lui a été adjugé à l'issue du scrutin législatif de 2012. Une Assemblée mal élue et vieillissante L'Assemblée nationale ne parvient plus à se départir d'une réputation qui lui colle durement : être au service de l'Exécutif. La législature, qui vient de s'achever, n'a pas dérogé à cette règle. Les parlementaires ont souvent poussé le zèle jusqu'à adopter, dans la version établie par le gouvernement, des projets de lois qui ont conduit à la détérioration des conditions de vie des citoyens, à la réduction drastique des budgets sectoriels, au gel des salaires, au gel des recrutements dans la Fonction publique et à la suppression de la retraite proportionnelle sans condition d'âge. Ils ont voté aussi sans amendement des projets à connotation politique, comme la loi portant régime électoral, ou celle imposant aux militaires à la retraite l'obligation de réserve à vie. L'APN, qui confirme à chaque mandature son statut de chambre d'enregistrement des lois, consolide la désaffection des électeurs avec les scrutins, en particulier législatif. L'abstention massive du scrutin du 4 mai dernier exprime un désintérêt avéré pour le vote, mais aussi une répugnance de l'immobilisme des députés dans leur majorité et de la politique régressive sur le plan social mise en œuvre par le gouvernement. En mal de légitimité, l'APN, qui s'apprête à entamer son premier jour d'activité, ne s'est guère offerte une nouvelle jeunesse. Près de 200 députés sont âgés de plus de 50 ans, 133 ont entre 41 et 50 ans, et uniquement une quarantaine de trentenaires. Le reste est largement au stade de la retraite. Intrusion des hommes d'affaires La huitième législature marque aussi l'intrusion en force des hommes d'affaires. 79 chefs d'entreprise, affiliés dans leur majorité au FCE dirigé par le patron du groupe ETRHB Ali Haddad, siègent, désormais, à l'hémicycle Zighoud-Youcef. Certains ont été portés sur les listes FLN, RND et Taj, d'autres se sont présentés au scrutin sur des listes indépendantes. En 2002 déjà, les patrons ont commencé à investir timidement l'APN avec l'entrée en scène de Djilali Mehri, propriétaire de l'usine Pepsi-Cola en Algérie, et Mohamed Djemaï, représentant de LG à l'époque. À partir de 2012, Abdelaziz Belkhadem, alors secrétaire général du FLN, a ouvert les portes du parti à des personnages comme Baha Eddine Tliba. Mais sans atteindre ce degré de présence des affaires au temple du Parlement. Plusieurs ministres et personnalités élus À une exception près (la ministre déléguée chargée de l'Artisanat n'a pas été élue), tous les ministres candidats à la députation ont gagné les élections. Le FLN en compte quatre : Boudjema Talaï qui a quitté le département des Transports et des Travaux publics pour mener la bataille électorale à Annaba ; Ghania Eddalia qui était en charge des Relations avec le Parlement ; Abdelkader Ouali qui était ministre des Ressources en eau et Tahar Hadjar à la tête du ministère de l'Enseignement supérieur et la Recherche scientifique. Il y a aussi des anciens membres du gouvernement sous la tutelle du vieux parti, à l'image de Sid Ahmed Ferroukhi, qui administrait le département ministériel de l'Agriculture ; Nadia Labidi, ancienne ministre de la Culture, Mohamed Djellab, ex-ministre des Finances ; Tahar Khaoua, ancien ministre des Relations avec le Parlement. Au RND, Tayeb Zitouni, ministre des Moudjahidine, a été élu à Oran. Des chefs et cadres de partis politiques ont été réélus encore une fois, à l'image de Louisa Hanoune, secrétaire général du PT, Mohcine Belabbas, président du RCD, Seddik Chihab, porte-parole du RND, Mohamed Nebbou, ex-premier secrétaire du FFS, Baha Eddine Tliba, ancien vice-président de l'Assemblée sortante, et Ahcène Aribi, cadre du parti El-Adala d'Abdallah Djaballah. Au niveau de l'alliance du MSP, c'est l'ancien ministre de l'Industrie et de la Restructuration, Abdelmadjid Menasra, qui a été élu dans la circonscription électorale d'Alger. Reste à savoir si toutes ces personnalités vont réellement exercer leur mandat ou briller par leur absence à l'hémicycle, comme ce fut le cas pour nombre d'entre eux lors des précédentes législatures.