Faut-il saluer la décision du FFS de geler toutes ses activités parlementaires ou s'interroger sur la posture des autres partis d'opposition qui continuent à travailler avec un parlement «illégal» et «illégitime» au regard des lois de la République ? La question est devenue kafkaïenne, car autant le premier parti d'opposition algérien a pris la ferme résolution de geler ses activités parlementaires, et au-delà dénoncer le coup de force contre une des institutions élues de l'Etat algérien, autant la majorité des partis au sein de l'Assemblée nationale semblent ne pas être incommodés de travailler avec un président illégitime, élu au forceps et, surtout, imposé de force avec une violente charge contre le règlement de l'APN. Le FFS a en réalité exprimé tout haut ce que les partis représentés au Parlement en dehors de la majorité (FLN, RND, MPA et Taj) pensent tout bas, si l'on excepte le PT de Louisa Hanoune et Hamas, une formation politique qui a toujours cultivé le flou. Sinon, comment interpréter la décision de son président, Abdelaziz Mokri, de continuer à travailler avec un président de l'APN «illégitime» ? Et il l'affirme lorsqu'il dit que «nous allons travailler avec lui, car nous devons faire avec le fait accompli, comme l'ont fait plusieurs partis avec plusieurs institutions de l'Etat et avec les deux chambres du Parlement à la légitimité entachée depuis le début de la fraude électorale en 1995''. Ailleurs au sein des autres partis, et si l'on met entre parenthèses le parti de Louisa Hanoune, c'est un peu la résignation devant un «putsch» parlementaire, selon la belle formule d'un défenseur des droits de l'homme. Une politique du fait accompli qui a, ultime humiliation pour les légalistes, reçu le soutien du gouvernement pour qui la désignation d'un nouveau président de l'APN s'est déroulée «conformément aux procédures légales». Maintenant, la vraie question qui se pose sur l'inertie des partis d'opposition devant une manœuvre politique scandaleuse, est de savoir si vraiment les députés sont les représentants du peuple qui les a mandatés, en leur accordant sa voix, à le représenter au sein du Parlement, ou de simples militants de partis détachés au Parlement. Pour le reste, le plus important en fait est de relever que depuis le début de la crise provoquée par les partis de la majorité au sein de l'Assemblée nationale, les jeux étaient déjà faits pour le départ de Saïd Bouhadja qui n'a pas vu venir sa destitution. D'autant que l'opposition a de son côté joué une mauvaise partition en ne gelant pas ses activités parlementaires, ce qui aurait fatalement bloqué le Parlement et nécessité l'intervention du président Bouteflika pour sa dissolution et l'élection démocratique d'un nouveau président de l'Assemblée nationale. Cela ne s'est pas fait, dommage pour la démocratie et la crédibilité des institutions élues, et il est dorénavant inutile et fastidieux de revenir sur la légitimité ou non de ces institutions. Toutes les lois, des plus impopulaires comme les hausses de prix des produits de première nécessité aux plus scandaleuses comme le retrait du projet d'impôt sur les grosses fortunes, seront votées sans état d'âme par des parlementaires plus soucieux de leurs intérêts partisans que de ceux qui les ont mandatés. La notion de député, qui a cessé d'avoir un sens depuis un moment pour les Algériens, a montré avec la désignation illégale d'un nouveau président de l'APN que les assemblées élues où clanisme et populisme s'entrechoquent, se sont irrémédiablement écartées de leurs missions au service du peuple. De la démocratie.