Comment un candidat à la députation peut-il mettre sur la table jusqu'à 60 millions de dinars pour espérer figurer en bonne place dans une liste électorale aux législatives, alors que toute la mandature ne peut rapporter à son récipiendaire tout au plus que la moitié de ce montant ? C'est la question que l'on est tenté de se poser à la lecture des révélations faites, tour à tour, par l'ex-député du FLN et, néanmoins, ex-vice-président de l'Assemblée populaire nationale, Bahaeddine Tliba, et l'ancien secrétaire général du FLN, Djamel Ould Abbes, sur les conditions de préparation des candidatures du parti aux législatives de 2017. Alors qu'est-ce qui faisait courir les prétendants à la députation ? Que cachait la guerre larvée, à l'époque, pour occuper une place de choix dans le listing des candidats ? Il doit y avoir, en tout cas, de bonnes raisons pour engager un tel investissement. C'est que l'enjeu devait certainement en valoir la chandelle. Comment ? Outre assurer une meilleure ascension sociale, la députation garantit un meilleur accès au centre du pouvoir. Et c'est ce qui explique la féroce compétition des hommes d'affaires pour une place à l'APN. Il est connu, ensuite, qu'un député bénéficie de l'immunité parlementaire. Cette disposition légale garantit aux concernés la liberté de mouvement, mais surtout une protection, le cas échéant, contre les ennuis judiciaires. Le député devient un intouchable. Du moins jusqu'à la fin de son mandat. En plus de cette immunité, un député évolue à la périphérie du pouvoir exécutif. Informé en temps réel des grandes décisions et des projets, "l'élu du peuple" est proche du centre de décision auquel il est soumis, de par son objectif au sein de l'institution élue. Un député peut même s'opposer à des projets que soumet l'Exécutif s'ils ne cadrent pas avec ses propres intérêts. L'APN a connu cet épisode avec le vote sur les vêtements usagés importés lorsque la disposition de la loi portant suppression de l'importation de la fripe avait été bloquée. Un des députés les plus en vue du FLN, connu pour être un grand importateur de ces vêtements usagés, avait été derrière cette campagne pour le blocage de la loi. Indépendamment de cet aspect lié principalement "aux affaires" des élus, le volet politique de la domination de l'Assemblée par des gens cooptés et désignés mérite également d'être soulevé. Ainsi, aucun Exécutif n'a trouvé du mal à passer ses décisions. Jamais une Assemblée ne s'était opposée aux projets du pouvoir. Appelée Assemblée croupion ou boîte d'enregistrement, l'APN n'a jamais assumé sa mission de contre-pouvoir, notamment sous le règne du président déchu, Abdelaziz Bouteflika.