Abdelhamid Debeïbah dénonce une campagne féroce contre son pays. Le Premier ministre libyen désigné, Abdelhamid Debeïbah, a dénoncé hier une "campagne féroce" visant à "détruire" le pays, faisant vraisemblablement référence aux soupçons de corruption pesant sur le processus ayant permis sa désignation. M. Debeïbah s'exprimait devant plus de 130 députés sur 188, réunis à Syrte (Est), les appelant par la même occasion à accorder la confiance à son gouvernement afin d'unifier la Libye, meurtrie par des années de conflits et de luttes de pouvoir. C'est un "complot" et une "campagne" menés par "ceux qui veulent détruire notre pays, qui veulent l'occuper (...) Nous n'avons d'autres choix que de nous entendre", a-t-il lancé. D'après le comité d'experts de l'ONU dans l'annexe d'un rapport encore confidentiel, le dialogue interlibyen, parrainé par l'ONU et ayant permis la désignation de M. Debeïbah, a été entaché de faits de corruption. Le rapport doit être remis formellement aux 15 membres du Conseil de sécurité de l'ONU d'ici à la mi-mars. Il est possible que l'annexe 13, qui parle de corruption, ne soit pas rendue publique. La diffusion d'extraits a suscité un tollé en Libye. Abdelhamid Debeïbah a, en outre, défendu hier la composition de son gouvernement qui fait l'objet de critiques des députés, qui relèvent notamment le nombre de portefeuilles jugé trop élevé par rapport à la période relativement courte qu'il doit assurer, jusqu'aux élections prévues fin décembre. Certains députés ont aussi appelé au report du vote jusqu'à la publication d'un rapport du groupe d'experts onusien attendue mi-mars sur des allégations de corruption pesant sur le processus parrainé par l'ONU. D'autres ont au contraire demandé à soutenir M. Debeïbah afin qu'il puisse "unifier le pays" au plus vite. "Mon premier objectif a été de choisir des personnes avec lesquelles je serai en mesure de travailler, peu importe d'où elles viennent." Elles "doivent être capables de travailler pour tous les Libyens", a-t-il martelé, avant de laisser la parole aux députés. Le gouvernement proposé par M. Debeïbah est composé de deux vice-Premiers ministres, de vingt-six ministres et de six ministres d'Etat. Deux ministères régaliens, les Affaires étrangères et la Justice, ont été attribués à des femmes, une première en Libye. Il a jusqu'au 19 mars pour être approuvé par le Parlement, qui s'est très rarement réuni ces dernières années. Une première séance du Parlement, qualifiée d'"historique" par l'ONU, a rassemblé lundi plus de 130 députés sur 188 en vue d'un vote de confiance. Après plus de trois heures de débats, la séance a été levée jusqu'à mardi afin que M. Debeïbah puisse venir répondre aux questions des parlementaires, notamment à propos de la composition de son gouvernement. La Mission d'appui de l'ONU en Libye (Manul) a félicité les députés d'avoir "convoqué une session réunifiée après de nombreuses années de divisions et de paralysie", saluant une "session historique" et une "étape cruciale" pour l'unification du pays. C'est dans ce contexte qu'est intervenue hier la reprise des liaisons aériennes entre les villes libyennes de Benghazi et de Misrata, contrôlées par des autorités rivales, après sept ans d'interruption. Ce qui est un nouveau signe d'un début de normalisation dans un pays en quête de stabilité. Pour rappel, l'accord de cessez-le-feu entre les deux autorités rivales conclu en octobre 2020 prévoit la réouverture des principales voies terrestres et des liaisons aériennes internes. Des discussions sont désormais en cours pour la réouverture de la route terrestre reliant l'Ouest à l'Est. Des opérations de déminage ont été menées ces dernières semaines, notamment autour de Syrte, où se situe la ligne de front. R. I.