Tandis que le Maroc — en proie depuis quelques semaines à un problème de flux migratoire —, par la voix de son ministre à la Communication, Nabil Benabdellah exhortait l'Algérie, considérée comme un pays de transit, à “assumer sa part de responsabilité” en participant notamment aux opérations de lutte contre l'immigration clandestine, Alger se dit “suivre avec préoccupation la situation”. Hier, le ministère des Affaires étrangères, après un silence jugé incompréhensible, a réagi aux informations données par de nombreuses agences étrangères et selon lesquelles près d'un demi-millier d'immigrants clandestins a été “abandonné” à son sort dans le désert marocain, dans la région de El-Aouina-Souatar (600 km au sud de Oujda), près de la frontière algérienne. Ces immigrants ont été expulsés des abords des enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla (nord du Maroc), où ils souhaitaient pénétrer pour y trouver asile. Abandonnés, sans nourriture et sans eau, au nombre de 500 - 2400, selon une ONG espagnole, convoyés par les autorités marocaines de nuit, ils ne savent plus à quel saint se vouer, les autorités algériennes leur refusant toujours l'accès. “Cette situation grave souligne la nécessité d'une action collective et résolue pour faire face à ce problème tant dans ses manifestations immédiates que dans ses causes”, a indiqué le ministère des Affaires étrangères, cité par l'agence officielle. S'il est entendu que l'Algérie demeure un pays de transit pour de nombreux immigrants en dépit des efforts déployés par les autorités algériennes pour endiguer ce phénomène — près de 6 000 immigrés clandestins ont été refoulés d'Algérie en 2004 —, il reste que le drame humanitaire dont le Maroc vient d'être le théâtre ne peut être imputé au voisin de l'Est, comme le suggérait en demi-mot les Marocains. C'est un drame qui interpelle toute la communauté internationale et qui transcende les considérations politiciennes. “Dans cette perspective, souligne la source, la lutte contre l'immigration illégale ne saurait être limitée à des opérations ponctuelles de police qui, pour nécessaires qu'elles soient, n'en sont pas moins insuffisantes au regard d'une situation d'une telle sensibilité et d'une telle complexité”. “Il est nécessaire, à cet effet, que s'instaure une coopération internationale efficace pour dégager des solutions satisfaisantes aussi bien pour les pays d'origine et les pays de transit que pour les pays d'accueil, dans le respect de la dignité humaine et des valeurs morales partagées par l'ensemble de la communauté mondiale”. Alger rappelle enfin qu'elle a déjà présenté pour la résolution du problème de l'immigration clandestine une initiative dans le cadre des “5+5”. Evalués à plusieurs centaines, les immigrants, issus pour la plupart de l'Afrique sub-saharienne, après une odyssée à travers de nombreux pays ont échoué dans leur tentative, ultime étape, de rejoindre l'Espagne. Si certains ont trouvé la mort, d'autres ont été reconduits, alors que d'autres enfin ont été abandonnés aux confins désertiques du Maroc livrés à leur triste sort. KARIM KEBIR