Résumé : Meriem n'avait pas le choix. Elle était contrainte à arracher la bénédiction de son mari Fayçal pour son fils. Ce ne fut pas facile au début, mais elle finit par le convaincre. Norredine qui avait tout entendu, ne cacha pas sa joie. Meriem était peinée à l'idée qu'il parte si loin. Djamel, son fils cadet, espérait pouvoir se rapprocher de sa mère après le départ de son frère. Norredine était son préféré. Même si cela prit quelques mois, il finit par partir à Paris avec un visa d'études. Si toute la famille était en pleurs, le seul à ne pas avoir versé une seule larme était bien Djamel. Il avait du mal à cacher sa joie et sa satisfaction. Depuis toujours, il avait le sentiment de ne pas compter en présence de son frère aîné. Maintenant qu'il était parti, il espérait avoir leur attention. Ils n'avaient d'yeux que pour Norredine, parfait en tous points. Le terme "irremplaçable" qu'employait sa mère, l'avait peiné au début, mais maintenant, il voulait œuvrer pour le devenir aussi. La réalité fut bien dure à accepter. L'adolescent se rendit compte que Norredine était encore plus présent que jamais. Les discussions à la maison ou dehors ne tournaient qu'autour de lui. On parlait de lui en bien et tous lui souhaitaient de réussir. Il inspirait les jeunes du quartier à suivre son exemple. Djamel adorait son frère et lui souhaitait non seulement de réussir, mais aussi de faire sa vie là-bas, pour pouvoir enfin exister aux yeux de leur famille et des autres. Il était aux petits soins de ces sœurs et de leur mère. Celle-ci ne sortait presque plus. Elle ne voulait pas rater les appels de Norredine. On était en 1992. À part le courrier et le téléphone fixe, à la maison ou à la poste, il était impossible d'avoir des nouvelles. Djamel finit par se lasser. Heureusement pour lui, c'était la rentrée des classes et il allait retrouver ses camarades le jour des inscriptions. -Je n'en pouvais plus, lâcha-t-il à son ami qu'il n'avait pas vu durant les grandes vacances. Tu ne peux pas t'imaginer, Norredine est à des milliers de kilomètres et on ne parle que de lui. Ma mère ne cesse de se demander s'il dort bien, s'il mange bien, s'il a lavé son linge... C'est trop, mon ami. Zaher lui donna un coup d'épaule alors qu'ils marchaient dans la cour. -Ma parole, tu es jaloux de ton frère. Jamais, je n'aurais cru cela de toi. C'est de ton frère dont tu parles, lui rappela-t-il. C'est normal qu'elle s'inquiète pour lui. C'est le grand, parti à l'aventure. Qui sait ce qui peut lui arriver là-bas ? Loin de la famille et du bled. Ya khoya, même toi, si tu partais, ils seraient aussi inquiets, rak ghalet. -Ils n'aiment que lui. Je n'existe pas pour eux. Pourquoi ? Je n'en sais rien, dit Djamel. Mes sœurs, ma mère pleurent encore. Mon père a emprunté de l'argent pour financer ses études. Son projet lui a coûté cher. Figure-toi qu'il lui a promis de lui envoyer de l'argent régulièrement. Ils ne pensent qu'à lui. -Et alors ? C'est tout à fait normal. Il tient à ce qu'il ne tourne pas mal, car quand on est sans argent, on peut faire des conneries et les payer toute la vie, dit l'ami. Moi, pendant les vacances, j'ai travaillé dur dans un champ de patates. -Oui, je sais... -Tu as la chance de vivre à l'aise. Je crois que c'est l'ennui qui te donne ces pensées négatives, dit Zaher en tenant de lui remonter le moral. La prochaine fois que tu as du temps libre, au lieu d'écrire des poèmes ou des histoires, viens travailler avec moi. Les week-ends, je serais manœuvre dans un chantier. -Je te souhaite bon courage. Je viendrais, mais ma famille n'acceptera jamais de me laisser sortir en dehors du quartier. -Si tu ne comptais pas pour eux, ils ne te l'interdiraient pas. N'essaie pas de prendre la place de ton frère, conseilla l'ami. Sois juste toi. Attire leur attention intelligemment. Pas leur colère...
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