Ces traditions qui ont longtemps caractérisé cette région du pays ne sont désormais qu'un vague souvenir et une simple nostalgie. Aïn Fakroun, Ifker en chaoui, une agglomération située à 25 km du chef-lieu de wilaya (axe Oum El Bouaghi - Constantine) s'est toujours distinguée par au moins une particularité par rapport aux autres agglomérations de la wilaya. Actuellement comptoir commercial d'envergure nationale du prêt-à-porter, Aïn Fakroun a été aussi pionnière dans l'enseignement de tamazight à travers la wilaya d'Oum El Bouaghi. Conservant farouchement ses racines et ses repères identitaires, l'agglomération se distingue même par certains us et coutumes qui lui sont propres, à l'exemple de Bessegrou : une sorte de touiza, genre d'entraide et de solidarité pour la concrétisation d'un bienfait social, qui consistait en la plantation d'arbres, nettoyage de quartiers, stockage de produits… dans une ambiance conviviale animée par des discussions et chansons du terroir local. L'occasion est aussi marquée par un repas copieux fait à partir d'ingrédients, déposés d'une façon anonyme par les participants, quel que soit leur niveau social et ce, pour ne pas gêner les pauvres et les démunis. Alors que la marmite bouillonne, surveillée généralement par des jeunes filles en âge de se marier, des groupes mixtes jouent Thacourth, un genre de hockey se jouant à l'aide d'un bâton, pendant une heure trente à deux heures. Une fois le repas prêt, tous les participants y prennent part dans une ambiance très conviviale où l'esprit de solidarité est plus qu'exemplaire. L'occasion demeure aussi propice pour réconcilier des antagonistes ayant eu des rixes et histoires entre eux et permet aussi de tisser des relations entre les participants, qui se fructifient souvent par des rapprochements, tels les mariages. Demeurant un moyen rassembleur, Bessegrou, cette coutume typique à Aïn Fakroun est aussi une occasion économique permettant aux commerçants de vendre leurs produits. Symbole de l'union, de la fraternité et de bon voisinage, fêté chaque fois au début du printemps à Aïn Fakroun, Bessegrou a tendance, malheureusement, à disparaître et, avec lui, une bonne partie de la mémoire collective de la région. K. MessAâd