Résumé : Djamel se mit à fréquenter les mosquées et sympathisa avec des jeunes de son âge. Il se plaignit du manque de travail. L'un d'eux lui proposa de travailler chez un poissonnier. Djamel s'y rendit à la première heure, il eut beaucoup de succès auprès des clientes qui se bousculaient pour acheter du poisson chez lui. -Tu t'es bien débrouillé, ta voix porte loin. Et tu attires les femmes, dit Krimo. Tu devrais tenir un stand de sous-vêtements. Tu auras beaucoup de succès. Djamel toussota en rougissant. Il le regarda compter plusieurs billets qu'il lui remit. -Tu les mérites. Ce sera tous les jours comme ça si Allah le veut. -Alors à demain, dit le jeune homme en se débarrassant de son tablier. Je file, j'ai cours dans une heure. -Bon courage ! Djamel le remercia avant de partir à une douche publique. Il ne pouvait pas aller en cours avec cette odeur. Mais même douché et parfumé, il eut l'impression que l'odeur ne partait pas. Il ne traîna et se rendit à la fac. Il arriva légèrement en retard, mais satisfait. Il allait pouvoir économiser et aider sa famille même si elle n'attendait rien de lui. L'appât du gain le fit déserter les bancs de la fac. Le poissonnier lui offrit du thé à un moment où les clients se faisaient rares. -Je pense que tu pourrais vendre des cailloux. Tu présentes bien et tu sais parler aux gens, tu devrais arrêter tes études et te lancer dans les affaires. Tu pourrais tenir une petite table de cosmétiques, de parfum bon marché... Tout partira comme des petits pains. -Je n'ai pas d'argent pour me lancer. Ce n'est pas avec ce que je gagne ici que je pourrais lancer ma propre affaire, lui rappela le jeune homme. Je n'ai jamais eu idée d'abandonner mes études. Je décevrais ma famille et, franchement, elle a traversé des moments durs. Ce n'est pas le moment pour n'en faire qu'à ma tête. Je tiens à réussir et à leur faire plaisir. Vous me décevez... Je ne m'attendais pas à ce que vous m'encouragiez à abandonner alors que j'ai du potentiel. Si j'avais été votre fils, vous m'auriez mieux conseillé. -Filou ! Je t'ai donné du travail au moment où tu en avais besoin. Maintenant que tu t'es rempli les poches, tu te permets de me manquer de respect. Pour qui tu te prends ? -Je ne voulais pas vous manquer de respect, j'ai travaillé dur pour décrocher le bac. Même si je m'absente, je révise les cours le soir avec mes camarades, lui confia Djamel. Ce n'est pas parce que je travaille chaque matin que je vais abandonner mes rêves. -Pour les réaliser, il faut de l'argent et tu es sans le sou. Tu sais, dans le fond, je t'aime bien, dit Krimo. Moi, je trouve mon compte, à être poissonnier, mais ce n'est pas une vie pour un garçon comme toi. -Je m'en sortirais un jour, avec l'aide d'Allah, j'irais loin, jura Djamel qui s'apprêtait à partir, mais Krimo le retint par le bras. -Attends, j'ai une proposition à te faire. J'ai un ami qui a besoin d'un coursier, d'un homme de confiance. Si tu veux, je te mets en contact avec lui. -Je devrais livrer quoi ? -Je l'ignore, mais si tu es intéressé, je vais lui parler de toi, proposa Krimo. J'ignore si tu devras travailler de jour ou de nuit. Je sais seulement que cela rapporte beaucoup. Djamel haussa les épaules. -Pourquoi pas ? Mais pourquoi moi ? Qui va vous aider le matin ? -Il y a toujours des jeunes qui ont besoin de travailler. Ne t'inquiète pas pour moi, dit Krimo. Va prendre un bon bain. Fais-toi beau aussi. Je te donne l'adresse de son bureau, présente-toi à son secrétaire comme étant mon ami, il t'arrangera un rendez-vous. Djamel le remercia tout en prenant le papier. Il quitta le marché, remarquant que les gens s'éloignaient de lui. Il avait fini par s'habituer à l'odeur du poisson. À la pensée que la chance était en train de tourner, il pressa le pas. Il ne devait pas rater l'occasion. Coursier était mieux que poissonnier. Il avait hâte d'apprendre la nouvelle à sa mère. Il tenait à sortir sa famille de la misère...
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