Les capacités d'hospitalisation dédiées aux patients atteints de Covid dans la wilaya, et qui sont de 1 145 lits, se rapprochent de manière inquiétante de leurs limites. Le taux d'occupation qui était de 42%, il y a dix jours, est aujourd'hui de plus de 72%. Le nombre de patients hospitalisés et placés sous oxygénothérapie dans les différentes structures de santé de la wilaya de Tizi Ouzou a quasiment doublé en l'espace de dix jours, donnant ainsi un aperçu assez inquiétant non seulement de l'ampleur prise par la pandémie, mais aussi de la vitesse de propagation du virus au sein de la population. En effet, alors que le 14 juillet dernier, le directeur de la santé publique de la wilaya, Mohamed Mokhtari, annonçait qu'ils étaient au nombre de 421 dans les hôpitaux de la région, et le lendemain, le wali Mahmoud Djamaa affirmait qu'ils étaient 481, voilà qu'avant-hier soir, soit 10 jours après, le Dr Nadia Bekri, membre du comité de suivi de la pandémie dans la wilaya, annonce que le nombre de patients hospitalisés a atteint les 800 à Tizi Ouzou, puis, encore hier, Chekroun Sadjia, chef de service chargée de la vaccination à la DSP, annonçait que leur nombre avait atteint 830. L'hospitalisation de ces patients pour détresse respiratoire due au virus, et nécessitant donc d'être placés sous oxygénothérapie, ne reflète pas l'ampleur de la pandémie dans cette région vu que de nombreux autres patients ne présentant pas de formes graves sont en confinement à domicile. Des cas qui échappent totalement aux statistiques, à l'instar de ceux qui sont consultés par les médecins privés. Mais au-delà de la question d'ordre statistique, avec ce nombre de 830 patients hospitalisés, qui n'est pas loin du nombre enregistré durant la première vague, de mars à juin 2020, dans la wilaya, les capacités totales d'hospitalisation dédiées aux patients atteints de Covid dans la wilaya, et qui sont de 1 145 lits, se rapprochent de manière inquiétante et fulgurante de leurs limites. Leur taux d'occupation qui était de 42%, il y a dix jours, est aujourd'hui de plus de 72%. Hier, les autorités ont commencé, selon des sources sanitaires, à mobiliser des places de réserve, notamment à l'EHS de cardiologie de Drâa Ben Khedda où les premiers malades y ont été hospitalisés. Désormais, quatre EPSP sont également mobilisés pour accueillir de nouveaux patients. Dans les sept EPH que compte la wilaya ainsi qu'au CHU Nedir-Mohamed, la situation est déjà des plus critiques. Le Dr Bacha, pneumologue à Tizi Ouzou, a décrit, jeudi dernier, des scènes qualifiées d'horribles de patients alignés les uns à côté des autres dans des couloirs, utilisant à tour de rôle un seul masque d'oxygène. Mais au-delà de la saturation des hôpitaux, c'est aussi l'épuisement du personnel médical qui inquiète. "De nombreux médecins et infirmiers sont contaminés et le peu qui est resté en activité est épuisé à force d'enchaîner les gardes et les services", alerte une infirmière sur les réseaux sociaux. Avec ce nombre effarant de patients nécessitant de l'oxygénothérapie, la disponibilité de l'oxygène médical continue de poser épisodiquement problème même si d'importantes quantités sont quasi quotidiennement livrées dans la région. L'alerte a été donnée par la direction du CHU Nedir-Mohamed depuis le 17 juin dernier à travers un communiqué où elle a appelé à "une reprise de conscience de la population" suite à la hausse des cas qui avait déjà atteint 85 patients en observation ce jour-là. Il aura fallu attendre que les hôpitaux soient saturés, pour que les sirènes d'ambulances retentissent sans cesse partout, que les réseaux sociaux soient réduits à un espace nécrologique, pour qu'un sursaut de mobilisation soit enregistré. Ainsi, du côté des pouvoirs publics, l'on a procédé à la généralisation de la vaccination qui a débuté à pas de tortue et qui atteignait hier 89 000 personnes vaccinées, soit 7,5% de la population totale de la wilaya, et plus de 10% si l'on tient compte des moins de 18 ans qui ne sont pas concernés par la vaccination, alors que du côté de la population, les communes et villages ont commencé, depuis le week-end dernier, à l'initiative des seuls maires, à prendre les mesures de prévention et à fermer, partiellement pour certains, et totalement pour d'autres, pour éviter le pire. À ce titre, le Dr Chahed, pneumologue à Tizi Ouzou, estime que "l'heure est grave, la situation s'aggrave de jour en jour, des mesures urgentes doivent être prises, la collaboration de tous est indispensable, mais il n'est pas convaincu que le confinement total soit la bonne solution". "Le confinement, qui ne doit pas être une fuite en avant, obéit à des règles et à des objectifs et, de ce fait, nécessite une organisation et une logistique. L'Etat doit s'impliquer et prendre des mesures exceptionnelles, à savoir : ouvrir les salles de sport (gymnases) et les doter de moyens (lits d'hospitalisation et personnels soignants), augmenter la capacité en lits de réanimation, favoriser les passerelles entre le libéral et le public jusque-là absentes, fermer les commerces non essentiels, limiter les horaires d'ouverture pour les commerces indispensables et veiller scrupuleusement à l'application stricte et rigoureuse des gestes barrières au risque de pénalités conséquentes pour les contrevenants", a-t-il préconisé.