À Beni Douala, de nombreux villages ont été évacués à temps, abandonnés à des incendies qui ont tout détruit sur leur passage. Ceux qui ont fui ont trouvé refuge dans les villages voisins, qui, eux aussi, guettent inquiets d'éventuelles étincelles dans leurs champs dominant le barrage, à sec, de Taksebt. Sur le chemin menant à Ath Douala, située à 17 km au sud-est de la wilaya de Tizi Ouzou, en proie aux flammes depuis mardi, apparaît de loin la fumée blanche couvrant les villages agrippés aux collines. L'ascension vers Ath Douala a commencé du village Tizi Ntelaght, du côté Est, qui donne sur le barrage de Taksebt, qui garde encore les séquelles des flammes qui ont frôlé le village, détruisant le centre de santé et causant des dégâts à quelques habitations. De part et d'autre du village, dressé telle une forteresse, la nature qui l'entoure est réduite à un amas de cendres. Kader, un jeune du village, garde encore l'image des flammes qui arrivaient à une vitesse hallucinante. "L'apocalypse", a-t-il décrit. "L'incendie avait commencé de Takhoukht, aux environs de midi avant d'atteindre les forêts environnantes puis, notre village à 20h", raconte-t-il, expliquant que quelque heures auparavant, les habitants du village étaient allés de l'autre côté du barrage de Taksebt pour assister des familles du village d'Ath Frah, de Larbâa Nath Irathène, qui ont fui leur maison à cause de cet incendie. "Ces familles étaient regroupées à Sidi Ahmed et c'est depuis cet endroit que nous avons vu l'ampleur du danger qui guettait nos propres maisons", poursuit-il, la voix nouée, expliquant encore que pour faire face à cette situation, "les habitants de notre village ont dû, à leur tour, demander de l'aide". "C'est grâce au soutien des nombreux automobilistes qui étaient de passage par Taksebt qu'on a pu sauver nos familles. Des habitants de villages voisins sont aussi venus pour nous aider à évacuer nos familles, surtout les enfants et les personnes âgées, étouffés par la fumée", relate Kader, tout en admettant qu'il n'a pas fermé l'œil depuis trois jours. "La peur de revivre un tel scénario ne quitte pas mon esprit. Je surveille la moindre fumée autour de ma maison", enchaîne-t-il. Ceux qui ont fui leurs maisons ont été accueillis par les villages voisins d'Ath Khelfoun, de Thala Khellil, d'Ath Bouyahia, d'Ath Sema et de Taderth Oufella. À Taguemount Azzouz, la mobilisation battait son plein, constate-t-on. Dans ce village, la population s'est mobilisée tel un seul homme pour aider les villages voisins en proie aux flammes. Dans l'urgence, et pour faire face aux SOS, le comité de village a ouvert un centre d'accueil pour les familles à la salle des fêtes "Chez Kader", du village. "Au village, nous avons enregistré un incendie que nous avons vite maîtrisé. Cependant, nous avons ouvert nos portes aux familles en détresse notamment celle du village d'Ath Mesbah, qui a été touché par un violent incendie, jeudi", explique d'emblée Nacer, membre du comité de village de Taguemount Azouz, tout en soulignant que même une infirmerie a été ouverte pour donner les premiers soins aux blessés. "Nous préparons aussi chaque jour plus de 800 sandwichs destinés aux pompiers et aux volontaires engagés dans la lutte contre ces incendies", affirme la même source. Ath Mesbah cerné par les flammes Le village d'Ath Mesbah vit depuis jeudi une situation exceptionnelle. Cernés par les flammes, les villageois ont dû fuir leurs maisons, laissant tout derrière eux. Sur le chemin, l'odeur de la fumée et des arbres calcinés agresse les narines. Au village, une cellule de crise a été installée pour gérer entre autres les incendies et les aides qui affluent de partout. "Telle une avalanche rouge, les flammes sont arrivées d'Ath Zmenzer, avant d'arriver dans notre village pour atteindre les villages voisins d'Ath Abdelmoumen et de Taguemount Lejedhid, à côté", se rappelle un villageois. Ce décor de désolation est celui d'Icherdhiwen aussi, où rien n'a été épargné. Arbres, maisons, voitures et câbles électriques : tout a cramé. "Je ne sais pas comment les flammes sont arrivées chez moi. Pourtant j'avais défriché tout autour de la maison. Malgré tout, ma maison a été touchée et six véhicules, garés à l'intérieur du garage, sont complètement carbonisés !", s'exclame Khifer, ne parvenant plus à cacher ses émotions et à admettre ce qui lui arrive. "Comme tombé du ciel, le feu a touché même la toiture, au 7e étage", ajoute-t-il, les yeux embués de larmes. Sur place, un groupe de bénévoles du Croissant-Rouge algérien (CRA), venu d'Alger, constate l'ampleur des dégâts. "Avant de revenir à Ath Douala, nous sommes passés par Larbâa Nath Irathène où nous avons pu retrouver une personne carbonisée dans la forêt de Tadmimt", raconte Mohand, un membre du groupe, venu avec trois ambulances, suffisamment équipées pour prodiguer aux blessés les premiers soins. "Il y a aussi 12 médecins venus d'Alger et une autre équipe médicale de Tizi Ouzou qui sont venus nous aider dans la prise en charge des quelques blessés légers enregistrés", explique-t-on encore sur place.