Malgré leur discours rassurant et conciliant, les talibans n'ont rien perdu de leur comportement guerrier. Et belliqueux. Pourraient-ils d'abord déclencher un conflit avec les partisans d'Ahmad Massoud dans la vallée du Panchir et avec les Américains qui entendent retarder leur retrait pour achever l'évacuation des étrangers et des "alliés" ? Un garde afghan a été tué et trois autres blessés dans un échange de tir près de l'aéroport de Kaboul où des soldats allemands et américains ont participé, plus tard, à un autre échange de tirs avec, selon les médias, des assaillants non identifiés. Ce qui va compliquer davantage l'opération d'évacuation des ressortissants étrangers pour lesquels les Etats-Unis ont réquisitionné même les appareils des compagnies aériennes privées. Quelque 30 300 personnes ont été évacuées par les Américains depuis le 14 août, a indiqué dimanche la Maison-Blanche, alors que Washington espère exfiltrer jusqu'à 15 000 Américains mais aussi 50 000 à 60 000 Afghans et leurs familles. Et devant le risque de l'impossibilité de mener à son terme cette opération, le président américain a enfin laissé entendre qu'il pourrait retarder le retrait de ses troupes, le temps de terminer cette dernière mission qui se déroule dans des conditions chaotiques. Face aux difficultés rencontrées, M. Biden a ouvert la porte à une extension de la présence américaine sur place après la fin août. "Il y a des discussions en cours entre nous et l'armée au sujet de la prolongation. Nous espérons ne pas avoir à prolonger, mais il y aura des discussions, je suppose, sur l'état d'avancement du processus" d'évacuation, a déclaré le président Biden dimanche soir. Ce qu'a plaidé d'ailleurs le ministre de la Défense du Royaume-Uni qui assure cependant que les opérations d'évacuations que mènent les Anglais prendront fin avec le retrait américain. Les talibans ont vite réagi à cette éventualité en menaçant les Américains si d'aventure ils retardent leur retrait. Sur le terrain, par ailleurs, les talibans ont dépêché des éléments armés pour encercler le Panchir où se sont rassemblés des "soldats" qui soutiennent Ahmad Massoud fils de Shah Massoud assassiné en 2001, et d'Amrullah Saleh, vice-président du gouvernement déchu, qui ont constitué un Front national de résistance (FNR). "Nous sommes prêts à défendre l'Afghanistan et nous mettons en garde contre un bain de sang", a déclaré dimanche M. Massoud à la chaîne Al-Arabiya. Le soir même, les talibans ont annoncé avoir envoyé des combattants et encerclé ceux de la résistance autoproclamée à leur pouvoir dans le Panchir, une province enclavée au nord-est de Kaboul, tout en ajoutant vouloir négocier avec eux plutôt que combattre. "Nos combattants sont stationnés près du Panchir" qu'ils encerclent, a déclaré sur Twitter un porte-parole des talibans, Zabihullah Mujahid, tout en ajoutant que son régime "tente de résoudre cette affaire pacifiquement". Une semaine après avoir conquis Kaboul et le pouvoir lors d'une offensive éclair, les talibans poursuivent leurs discussions avec des personnalités afghanes, en vue de former un gouvernement qu'ils disent vouloir ouvrir à d'autres factions. Un vœu émis hier par le voisin iranien qui a souhaité la formation d'un gouvernement représentatif de la diversité du pays. "Il n'y a pas de solution militaire à la crise" que traverse l'Afghanistan depuis la prise du pouvoir des talibans à Kaboul le 15 août à la faveur du retrait progressif des troupes américaines du pays, a déclaré le porte-parole des Affaires étrangères iranien, Saïd Khatibzadeh. "Tous les groupes et tous les camps politiques doivent s'abstenir de recourir à la force et s'engager dans la voie de la négociation et du dialogue", a ajouté le porte-parole, selon qui "la République islamique d'Iran maintient un canal de communication permanent avec tous les camps politiques en Afghanistan".