En visite depuis hier en Algérie, le ministre croate des Affaires étrangères et des Affaires européennes, Gordan Grlic Radman, est accompagné par une délégation d'hommes d'affaires et d'investisseurs. Outre sa rencontre avec son homologue algérien, Ramtane Lamamra, un forum d'affaires est prévu en marge de cette visite de deux jours, dont l'objectif principal est le renforcement de la coopération économique entre les deux pays, notamment dans les domaines de la pêche, de la construction navale et du tourisme. Liberté : Votre visite a pour but le renforcement des relations économiques avec l'Algérie. Comment les évaluez-vous ? Gordan Grlic Radman : L'un des principaux objectifs de ma visite officielle en Algérie est de renforcer nos relations économiques. C'est pourquoi nous avons organisé – en collaboration avec la Chambre de commerce croate – un forum d'affaires qui réunira des hommes d'affaires croates et algériens. Il s'agit d'un important pas dans la bonne direction. Afin de faire progresser la coopération bilatérale, nous avons encouragé ces dernières années la conclusion d'une série d'actes bilatéraux qui créeront un cadre pour la coopération de nos institutions dans un certain nombre de domaines d'intérêt commun. Peut-on savoir le volume des échanges économiques entre l'Algérie et la Croatie ? La valeur des échanges entre l'Algérie et la Croatie fluctue considérablement d'année en année. Le plus fort montant d'échanges de ces vingt dernières années a été enregistré en 2018 lorsque, selon le Bureau croate des statistiques, il s'élevait à environ 77 millions de dollars. En 2020, il s'élevait à environ 42 millions de dollars, les importations et les exportations ayant fortement augmenté par rapport à l'année précédente. Il est intéressant de mentionner que l'Algérie, selon le niveau des exportations croates, était, en 2020, le deuxième partenaire le plus important de la Croatie à travers le continent africain. L'Algérie occupe la cinquième place selon le montant des importations. S'agissant du commerce total (importations et exportations), il se situe à la troisième place, derrière l'Egypte et le Maroc. À l'avenir, eu égard aux potentialités que présentent nos deux pays, nous avons des raisons de croire que notre partenariat pourra se hisser à des niveaux encore plus importants, en établissant un cadre juridique adéquat et en intensifiant les contacts entre nos entreprises et nos institutions. Par conséquent, je me réjouis qu'une délégation économique visite l'Algérie avec nous et que l'accord portant création d'un Conseil d'entreprise conjoint entre la Chambre de commerce croate et la Chambre de commerce et d'industrie algérienne soit signé lors du forum économique. L'un des principaux objectifs de ce Conseil est d'offrir une plateforme d'échange d'informations et d'interaction entre nos entreprises, afin de stimuler les échanges commerciaux et les investissements mutuels. Combien d'entreprises croates activent en Algérie ? Quels sont leurs domaines d'intervention ? Les entreprises croates sont présentes en Algérie depuis plusieurs décennies. L'Ingra, par exemple, est présente en Algérie depuis 1976, et a mis en œuvre un grand nombre de projets. C'est une entreprise particulièrement active dans la construction de barrages. Pomgrad, pour sa part, a participé à la construction et à la reconstruction de plusieurs ports algériens. Le dernier projet en date était la construction d'un port de pêche dans la wilaya de Skikda. L'entreprise fait partie de la société Strabag depuis 2018 et a un grand intérêt à participer à de nouveaux projets similaires. Présente aujourd'hui sur le marché algérien, Koncar est la plus grande entreprise croate dans le secteur de l'industrie électrique ; elle est spécialisée dans la production de dispositifs et de composants hydrauliques et pneumatiques. D'autres entreprises comme Hidraulika Kutina, producteur de radiateurs en aluminium ou encore Lipovica, pour n'en citer que quelques-unes. Certaines entreprises du secteur agricole, comme les exportateurs de bétail, trouvent également, depuis peu, leur place sur le marché algérien. Y a-t-il un secteur particulier dans lequel la Croatie voudrait investir ? Cela se ferait-il en partenariat avec des entreprises algériennes ? La Croatie et l'Algérie, en tant que pays méditerranéens, partagent des intérêts communs, mais aussi des défis. À travers l'échange d'expériences, nos deux pays peuvent ouvrir de nouveaux domaines de coopération, en parallèle avec ceux ayant déjà une tradition de présence commerciale sur le marché algérien. Je signalerais ici particulièrement la possibilité de coopération en matière de construction navale et de refonte des savoir-faire pour développer la construction navale en Algérie, ainsi que pour introduire la formation du personnel algérien dans ce secteur. Les chantiers navals croates se sont spécialisés ces dernières années dans la construction de navires d'une complexité technologique plus élaborée. Ils peuvent également proposer la construction de bateaux de pêche plus petits et un programme naval. Nous pouvons, en outre, offrir une coopération dans le développement de la mariculture, la construction de ports de pêche et de marinas. Et aussi dans le secteur de l'hôtellerie, en particulier dans l'industrie hôtelière. Le secteur informatique à grand potentiel peut également faire partie des nombreux domaines où nous pouvons coopérer, compte tenu du nombre considérable d'entreprises d'informatique croates ayant des performances de pointe et une grande expérience de travail à l'étranger. Les sociétés d'informatique proposent des solutions dans divers segments : par exemple, pour le système de santé publique, les finances, les services publics, la cybersécurité, la criminalistique numérique, la protection des micrologiciels, etc. Il existe également des possibilités de coopération dans le secteur ferroviaire, c'est-à-dire à travers la coopération dans la production de locomotives électriques et à moteur, ainsi que dans les équipements de sécurité en termes de signalisation, dans l'industrie spéciale ou encore l'industrie alimentaire. Comment comptez-vous renforcer la coopération algéro-croate dans le secteur du tourisme ? Comme la Croatie et l'Algérie n'ont signé aucun accord bilatéral dans le tourisme, nous avons lancé une initiative pour conclure un protocole d'accord dans ce domaine et nous espérons qu'il sera bientôt achevé. Je tiens à souligner que nous coopérons et souhaitons renforcer la coopération au niveau multilatéral par le biais de notre adhésion à l'Organisation mondiale du tourisme, en particulier à la Commission du tourisme et de la durabilité, dont l'Algérie est également membre. En outre, la Croatie et l'Algérie coopèrent à travers l'adhésion à l'Union pour la Méditerranée. Les opportunités de renforcer la coopération touristique sont également reconnues dans l'échange de savoir-faire dans le domaine du suivi des données statistiques, où nous avons développé un excellent outil appelé eVisitor, à travers l'échange de connaissances et d'expériences dans les domaines du tourisme rural et de l'enseignement du tourisme et de la gestion hôtelière. C'est précisément pourquoi je me réjouis particulièrement de la proposition de conclusion de l'accord de coopération entre la faculté de gestion du tourisme d'Opatija et l'Ecole supérieure de tourisme d'Algérie. De plus, nous sommes particulièrement intéressés par la coopération concernant les défis de la Covid-19 et son impact sur le secteur du tourisme.