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La tentation assidue du mal totalitaire
CONTRIBUTION
Publié dans Liberté le 16 - 01 - 2022


Par : MYASSA MESSAOUDI
ECRIVAINE ET MILITANTE POUR LES DROITS DES FEMMES
Les pays musulmans, dans leur majorité, adoptent la charia dans le droit qui régit la famille et le statut personnel. La charia soustrait les citoyens-croyants aux concepts libertaires modernes. Les régimes des pays dits arabes, majoritairement dictatoriaux, montrent un zèle particulier dans l'application des lois coraniques, car les interprétations qui en sont faites scellent toute aspiration liée aux libertés rattachées à l'individu.
La philosophe politique H. Arendt disait que la dictature est limitée dans le temps, mais pas la tyrannie. Pour s'imposer, la dictature prétexte des conflits et des guerres pour suspendre les lois et bafouer les droits. Elle disait aussi que pour venir à bout des tyrans, il faut détruire l'admiration et la légende de grandeur dont ils aiment s'autogratifier. Qu'il faut retirer aux gens cette fascination pour le mal et les criminels politiques. Mettre à nu les dictateurs en disséquant leurs bilans, qui, le plus souvent, sont dénués de substantielles réalisations et surtout de "grandeurs". Puis les livrer au ridicule.
Brecht disait que si les classes dirigeantes permettaient à un petit escroc de devenir un grand escroc, celui-ci ne pouvait prétendre à une place privilégiée dans l'histoire.
Les deux attestaient que le plus souvent, dans l'histoire, les sociétés ont très peu connu la pratique réelle de la politique. Car, le plus souvent, on confond le pouvoir et l'exercice politique. Cette dernière, c'est-à-dire la politique, requérant pour sa viabilité la sacro-sainte liberté. Or, la liberté est souvent confisquée aux peuples. Ce qui explique pourquoi la politique n'a été effective qu'à de rares moments dans l'histoire, et uniquement dans certains endroits.
Et cette pratique authentique de la politique, il ne faut pas la chercher forcément dans les temps contemporains, mais quelque cinq cents ans avant Jésus-Christ. Plus précisément dans la Grèce antique.
Nous allons remonter ensemble ce fil pour comprendre pourquoi la célèbre philosophe attestait que les Grecs avaient inventé la politique, bien que des civilisations bien plus puissantes les aient précédés.
En fait, la civilisation hellénique, qui a inventé la démocratie, la philosophie, les sciences, le sport et le théâtre, avait aussi inventé la liberté. Et l'invention de la liberté a été concomitante à l'invention de la politique.
Les Grecs ont été les premiers hommes libres de l'histoire. Les premiers à comprendre l'importance de la pluralité des avis et des egos. Ils ont inventé l'espace de l'expression libre de la parole, à savoir l'agora, mais aussi l'ostracum. En effet, la privation de l'accès à cet espace et donc à ses pairs rendait invisible, et donc inopérant, celui qui était frappé d'ostracisme.
En outre, ce noble exercice de la liberté chez les Grecs supposait que l'ont n'était soumis à aucun autre homme, détaché des obligations d'ordre privé, considérées comme tâches ingrates et non valorisantes. Et surtout prêt à mourir pour ses convictions. L'agora était un lieu public d'échange qui rassemblait les citoyens hommes. Seuls habilités à voter. Elle était dans un premier temps investie par le théâtre. On y venait pour se penser et penser à plus grand que soi. Les Athéniens s'y régénéraient intellectuellement et s'y dotaient d'un savoir et de moyens juridiques capables d'éjecter du pouvoir les rois les plus puissants quand ils se muaient en tyrans. Thémistocle, l'homme politique qui fut l'artisan de la victoire de Salamine contre les Perses, en fit les frais.
Mais, peu à peu, la place publique fut récupérée par le pouvoir pour casser l'élan de réflexion et de solidarité populaires qui la caractérisaient.
Un fait qui n'est pas sans nous rappeler le fonctionnement des systèmes totalitaires actuels, œuvrant à nos jours à diviser et à laminer la capacité de l'individu à se réinventer. À envisager des solutions originales, à réfléchir par lui-même et à s'interposer efficacement contre toute tentative de le soumettre à l'arbitraire de la tyrannie idéologique ou religieuse.
Les dictatures, en traquant la liberté, vont jusqu'à la démolition de l'individu libre. Elles anéantissent l'homme dans sa profonde essence et aptitude à la réflexion. En atomisant la société, elles la condamnent à l'inertie et la privent du renouvellement nécessaire à la survie des peuples comme êtres pensants.
Les dictatures ne dépossèdent pas seulement les hommes de leurs droits humains, elles oblitèrent leur mémoire ou la réinventent artificiellement. Elles instillent la terreur à travers la répression et remplissent les prisons de ceux qu'Arendt appelait les victimes sans crimes.
La sécurité nationale, découlant de cette vieille maxime qu'est la raison d'Etat, sert, bien souvent, de paravent aux dépassements et crimes d'Etat. Elle est évoquée, à nos jours, pour pulvériser verticalement toute objection. Et ce, sans avoir à rendre des comptes.
Le pire est cette fabrique de la passivité. L'indifférence au mal que crée l'ordre tyrannique. En perdant la capacité de réfléchir par soi-même, l'individu rompt avec la pensée. Il devient un être vide, dépourvu d'univers propre, et donc réceptif aux pires déviations de ceux qui le dirigent. Dès lors, l'homme perd son libre arbitre, sa conscience et sa capacité à s'indigner des abus qui le touchent, ainsi que ses semblables. Bref, il dépérit, quand il ne se transforme pas en fier exécutant des ordres les plus vils et parfois assassins.
La bureaucratie aussi participe à cette aliénation. L'homme est constamment baladé d'un service à l'autre. D'une administration à l'autre. Tout participe à l'étourdir et à ôter tout sentiment de responsabilité directe à ceux qui se le renvoient comme une vulgaire balle de ping-pong. Il n'est pas difficile de constater ce fait autour de soi.
S'ajoute à la fin un culte de la personnalité du dictateur qui confine au burlesque. Qui ne se souvient pas de ces zaïms provocateurs chapeautés qui, colt à la main, tiraient des balles dans l'air, convoquaient des opposants dans l'assemblée pour les trucider, puis faisaient asseoir un enfant intimidé sur les genoux pour s'affubler du bon rôle de père de la nation ? Ou cet autre dictateur, vêtu d'une chapka et d'un survêtement, qui s'était, un bon matin, autoproclamé roi des rois ? Ils ont fait de leurs pays des Etats parias, puis des contrées de désolation noyées dans le chaos. Les religieux qui leur ont succédé, parce que, contrairement à ce qu'ils prétendent, ils ont exercé leur part de responsabilité et de règne, ont fini par reléguer toute une région, toute une religion et des millions d'hommes et de femmes au ban abject de l'histoire. Nous leur devons l'obscurité et une épouvantable image parmi les peuples.
Revenons à cette notion de liberté si indispensable à la politique ; comment la voyons-nous en tant que pays musulmans ? À quoi la rattachons-nous ? Et ne l'avons-nous jamais connue ?
Les pays musulmans, dans leur majorité, adoptent la charia dans le droit qui régit la famille et le statut personnel. La charia soustrait les citoyens-croyants aux concepts libertaires modernes. Les régimes des pays dits arabes, majoritairement dictatoriaux, montrent un zèle particulier dans l'application des lois coraniques, car les interprétations qui en sont faites scellent toute aspiration liée aux libertés rattachées à l'individu.
Ainsi, la seule liberté permise est celle de se soumettre à Dieu et au dictateur. Dans ce domaine, l'alliance sacrée s'opère entre tyrannie religieuse et régimes liberticides. Les deux ordres se complètent et agissent comme des geôles mentales et physiques. L'une bâillonne la sphère privée en s'immisçant dans les moindres recoins de l'individu. L'autre le prive de toute contribution publique rattachée à son sort de citoyen. Une embuscade qui ne laisse aucune possibilité d'indépendance à l'individu. Et, par conséquent, condamne toute une société à un désert d'idées et de possibles. Le pays peut compter toutes les richesses du monde, il restera tributaire, jusqu'à sa défense nationale, de l'apport étranger.
À cet effet, il est intéressant d'évoquer les deux guerres médiques dont étaient sorties vainqueurs les cités grecques de l'Antiquité face à leur ennemi traditionnel, l'Empire perse. Ils avaient tout pour perdre face à une puissance qui comptait environ 300 000 soldats, quand les Grecs ne comptaient que 7 000 hoplites pour repousser l'assaut. En sus, un territoire sans continuité et des moyens indéniablement moindres. Pourtant les Athéniens avaient mis en déroute leur ennemi. Et par deux fois ! Comment l'expliquer ?
L'attachement des Grecs à leur mode de vie, et surtout à leur liberté, en a fait des soldats invincibles face à leur ennemi. Ils n'avaient aucune envie de se soumettre à un autre peuple, car ils étaient authentiquement libres. Une liberté individuelle pleine qui les rendait profondément conscients des périls de la soumission. Ils défendaient la liberté comme partie intégrante de leur personne. Les Grecs n'étaient pas gouvernés par des tyrans, et donc l'idée de s'allier avec un étranger pour les chasser ne les avait pas tentés. La victoire ne pouvait qu'être au rendez-vous. Même miraculeuse.
Pourrait-on en dire autant des pays gangrenés par le totalitarisme ? De ceux qui avaient infesté l'Europe dans les années trente, à ceux qui sévissent encore dans les pays arabo-musulmans ? Le danger de l'extinction d'une nation vient avant tout de sa gestion intérieure. De la privation de liberté.
Une anecdote et une citation pour finir. Pour l'anecdote : les autorités syriennes viennent de décréter que pour publier la photo de leur plat favori sur les réseaux sociaux, les Syriens devraient obtenir une autorisation spéciale de plusieurs instances ! Le mal est assidu.
La citation, celle de René Char, fréquemment évoquée par H. Arendt : "Notre héritage n'est précédé d'aucun testament." En d'autres termes, nous avons tous les droits du monde d'examiner les différentes expériences humaines et de s'en inspirer. Il n'y a pas de frontières quand il s'agit de se livrer à l'exercice de la raison.


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