Nommé à la tête de la commission des cérémonies d'ouverture et de clôture et des activités culturelles des Jeux méditerranéens Oran 2022, le musicien et compositeur Salim Dada est prêt à relever le défi ! Dans cet entretien, il revient sur les grandes lignes de cet événement qui "représentera dignement le patrimoine culturel national et le génie créatif algérien exprimés dans les différentes disciplines artistiques". Liberté : En tant que président de la commission des cérémonies d'ouverture et de clôture et des activités culturelles des Jeux méditerranéens Oran 2022, quel sera votre apport pour cet événement d'envergure ? Salim Dada : En décembre dernier, le commissaire des JMO22, M. Aziz Derouaz, m'avait proposé la présidence de la commission des cérémonies d'ouverture et de clôture et des activités culturelles au niveau du comité d'organisation des JM, demande que j'aie acceptée non sans appréhension, sachant la difficulté de la tâche et la limite des échéances. La mission n'est pas de tout repos, ni simple. Il y a des considérations socioculturelles, géopolitiques et touristiques qu'il ne faut pas perdre de vue, même si l'événement demeure essentiellement sportif. Dans ce contexte, mon premier rôle tel que je l'ai défini en acceptant cette responsabilité est de donner une direction artistique claire au volet culturel de l'événement, de concevoir des cérémonies d'envergure et d'envisager un programme culturel riche et national. Pour cela, j'ai entamé plusieurs visites et séances de travail afin de coordonner entre le COJM et les différents secteurs concernés par la culture (Culture et Art, Tourisme et Artisanat, Jeunesse et Sports, Communication, Affaires étrangères, Moudjahidine...) dans le but d'optimiser les différentes propositions sectorielles et de créer des partenariats dans l'organisation du programme culturel qui sera varié et de qualité, et qui représentera dignement le patrimoine culturel national et le génie créatif algérien exprimés dans les différentes disciplines artistiques. Suite à cela, nous compléterons cet agenda culturel par des propositions qui émaneront des artistes, des représentants de la société civile et des entreprises culturelles privées. Nous venons d'annoncer le concours du meilleurs "Jingle musical" qui accompagnera les cérémonies de remise des médailles durant les JM. Très prochainement, nous procéderons à l'appel à projets artistiques, toutes disciplines confondues. Mon slogan dans cette mission est que l'image de l'Algérie et de sa culture soient à la hauteur des aspirations de nos concitoyens et des attentes de nos invités. Les spectacles d'ouverture et de clôture représentent la vitrine du pays hôte. À quoi pourront s'attendre les Algériens et les invités lors de ces cérémonies ? Dès qu'on a fait appel à moi en décembre dernier, mon idée était claire sur ce que doivent ressembler ces cérémonies : scénario original, riche et attrayant ; réalisation artistico-technique de haute facture ; usage intelligent des technologies modernes. Je voudrais offrir aux Algériens l'occasion d'être émerveillés, d'être émus, d'être fiers et d'être joyeux en suivant ces spectacles. Je veux que ces cérémonies donnent l'occasion aux 25 pays invités de connaître plus l'Algérie à travers sa diversité naturelle, historique, culturelle et sociale, de voir l'ancrage méditerranéen de notre pays et son apport aux différentes civilisations. Ces spectacles seront l'occasion de montrer la culture algérienne dans toutes ses dimensions : patrimoniale matérielle et immatérielle millénaire, voire préhistorique, et celle créative contemporaine, ce que j'appelle le génie algérien, dans toutes ses formes d'expression artistique. C'est ce qui me motive et occupe mes jours et nuits depuis que j'ai accepté ce défi (suicidaire) à moins de six mois de l'événement. Avez-vous lancé des appels à projets ? Et de quelle manière seront sélectionnés les artistes ? Bien sûr, un appel à projets a été lancé en décembre dernier par M. Derouaz, commissaire des Jeux, lors d'une conférence de presse au Forum d'El-Djoumhouria à Oran ; suite à cela, le comité d'organisation a reçu plusieurs projets pour les cérémonies d'ouverture et de clôture parvenant d'entreprises et d'artistes algériens et étrangers. Après l'échéance du délai (16 janvier 2022), une commission multisectorielle a été créée afin d'évaluer les dossiers et d'entretenir avec les porteurs de projets qui ont été reçus le 26 janvier dernier à Oran pour qu'ils visitent le nouveau complexe sportif, lieu où vont se dérouler les cérémonies. Face à la commission élargie composée d'une vingtaine de personnes (commission spécialisée et commission multisectorielle), les porteurs de projets ont présenté, successivement et à huis clos, les maquettes et les visuels de leurs projets : 12 heures d'échanges, de questions et de réponses. Le lendemain et après avoir passé en revue les treize projets de spectacles candidats, ladite commission s'est exprimée dans le cadre de la consultation sur le choix des porteurs de projets prenant en considération les éléments que j'ai définis dans la question précédente : l'originalité du contenu, le professionnalisme, l'expertise en matière d'organisation de grands spectacles, l'expérience internationale et la maîtrise des technologies nouvelles. Les spectacles seront-ils assurés seulement par des artistes algériens ? En majeure partie oui ; d'ailleurs certains aspects artistiques et techniques des spectacles seront assurés à 100% par des Algériens. D'autres verront l'implication également d'artistes méditerranéens afin de rester dans la thématique des Jeux. Quant aux solutions techniques qu'on ne maîtrise pas, notamment les nouvelles technologies de spectacle et l'art digital en grandes dimensions, elles seront assurées par les meilleurs spécialistes du monde avec lesquels nous mettrons nos jeunes talentueux pour qu'ils y participent et se forment auprès de ces spécialistes de renommée internationale. Tout au long des JM seront organisées différentes activités culturelles. Est-il possible de dévoiler les grandes lignes de la programmation ? Effectivement, nous sommes en train de finaliser le programme culturel qui sera dévoilé en détail le 15 mars, à J-100 de l'événement. Cependant, je peux vous dire que nous n'avons omis aucune expression artistique ou touristique dans la programmation de ces activités culturelles qui vont devancer et accompagner les JMO22. De façon sommaire, il va y avoir trois festivals de musique et de danse, des journées de théâtre méditerranéen, du théâtre de rue, un cycle cinématographique méditerranéen, une résidence artistique de plasticiens méditerranéens avec exposition, une BD collective et un recueil littéraire méditerranéens, des ateliers ludiques pour enfants, des expositions d'artisanats, des circuits touristiques guidés, des expositions thématiques artistiques, historiques et anthropologiques aux différents musées, etc. Ce riche programme sera surtout mis à la disposition des habitants d'Oran et des wilayas de l'Ouest algérien. Ces manifestations vont-elles impliquer tous les porteurs de projets ou seulement ceux de la région ? Quand il s'agit de choix artistique, le facture de région n'entre pas dans notre grille d'évaluation ; nous cherchons la compétence, la qualité, l'expérience et l'originalité des projets, qu'importe que le candidat soit d'Oran, d'Adrar ou d'Annaba, voire qu'il soit de la diaspora algérienne. Cet événement sportif se déroule certes à Oran, mais c'est l'Algérie qui l'organise et la programmation culturelle doit être la vitrine de cet événement. On ne peut se permettre l'amateurisme ou la complaisance dans ce genre de situation. Cela dit, Oran est une ville très riche par sa culture, ses talents, ses intellectuels et ses artistes avérés, et je peux vous rassurer que les meilleurs, les professionnels, ceux qui exprimeront la volonté de participer à la construction de ce grand puzzle, qui est le programme culturel des JMO22, auront leur place méritée tout naturellement. Le ministère de la Culture et des Arts prévoit également d'accompagner les JM à travers un "programme dense et varié". Y aura-t-il une collaboration entre vos deux entités ? Tout à fait. Nous travaillons en coordination et en concertation directe avec le ministère de la Culture et des Arts. Une bonne partie de la programmation culturelle a été proposée par eux, et nous, nous l'adaptons selon nos besoins et selon notre vision des choses. D'ailleurs, plusieurs programmes seront assurés ou coorganisés par les différents établissements sous tutelle du ministère (Onci, Oref, TNA, TRO, CNCA, CADC, AARC, OGEBC...) en partenariat avec le comité d'organisation des JM à travers la commission que je préside. Nous avons fait pareil avec le ministère du Tourisme et de l'Artisanat et ses différentes structures locales à Oran. Nous sommes à quatre mois du lancement des Jeux méditerranéens. Pensez-vous avoir le temps de tout finaliser ? Sur les plans artistique et technique des spectacles ou celui de l'organisation des activités culturelles, je peux dire oui. Le planning rétrospectif que j'ai mis dès mon installation est jusqu'à aujourd'hui respecté au jour près. Nous avançons comme il se doit, et si nous continuons de la sorte, nous serons au rendez-vous le jour J. La seule appréhension qui m'angoisse, ce sont les délais des procédures administratives et financières dans l'établissement des marchés, l'importation du matériel ou l'octroi des autorisations. Toutefois je reste optimiste, car cet événement est porté par l'Algérie à travers ses plus hautes instances et nous demandons qu'on nous laisse faire notre travail dans les temps et dans les moyens. Comme le dit le chorégraphe et compositeur québécois Michel Conte : "Le talent ne suffit pas, il faut lui annexer le temps et l'argent."