Les agents commerciaux d'Air Algérie et son personnel de bord sont réputés pour leur compétence et leur vigilance. C'est ainsi qu'à chacun des vols vers Bamako, ils rappellent aux voyageurs, à plusieurs reprises et dans toutes les langues, la destination et l'itinéraire du vol. Outre le continent, ils précisent le nom des villes desservies : Bamako, Dakar, Niamey, Ouagadougou. Malgré toutes ces précautions, un beau jour, un passager, un des nôtres, plutôt âgé, se retrouva par erreur, allez savoir comment, dans l'avion en partance vers l'Afrique subsaharienne. Ce n'est qu'une demi-heure après le décollage que notre brave homme, qui jetait un coup d'œil à travers le hublot, se rendit compte que quelque chose n'allait pas. Alors, prenant à témoin les passagers, il s'écria : “Mais on s'est trompé de chemin ! Je ne vois pas la mer, je ne vois que du sable. Mais où allons-nous ?” Aussitôt, stewards et hôtesses affluèrent vers lui et le réprimandèrent : “Nous avons fait plusieurs appels ! Mais où étiez-vous donc ? Pourquoi n'écoutez-vous pas ?” Le pauvre homme, lui, ne cessait de répéter : “Moi, je vais à Marseille. Je vais à Marseille pour ma pension !” Informé de la situation, le commandant de bord, agacé, y mit un point final en déclarant : “Tant pis pour lui ! Il fera tout le voyage avec nous. Cela lui servira de leçon !” Peu à peu, l'atmosphère se détendit et le vol reprit son cours normal. Notre voyageur ne dit plus rien, s'efforçant d'accepter son sort avec philosophie. Le personnel de bord, tout en vaquant à ses occupations, lui manifestait des signes d'attention pour le réconforter. Une hôtesse lui proposa à plusieurs reprises des rafraîchissements et même un double repas. Lorsqu'un steward passait près de son siège, il l'interpellait, échangeait quelques mots avec lui, lui rappelant, à l'occasion, l'itinéraire du vol. Il fallait bien que notre homme finisse par admettre son erreur et qu'il comprenne qu'après Bamako, l'avion se rendait dans d'autres villes et qu'il ne retournerait à Alger que deux jours plus tard. Cependant, une petite complication apparut lorsque le personnel s'aperçut que le voyageur n'avait de visa pour aucun des pays desservis. Qu'à cela ne tienne, il passerait la nuit dans l'avion. Alors, ils le choyèrent davantage : outre la nourriture et les boissons, ils lui aménagèrent un bon lit et un steward alla même jusqu'à lui proposer un pyjama. À chacune des escales, les membres du personnel quittaient l'avion et, impatients de le retrouver, lui ramenaient un petit cadeau. Après ce long voyage, de retour à Alger, l'heureux voyageur rencontra le commandant de bord et lui déclara, sur un ton sérieux et solennel : “J'aimerais bien travailler avec vous. Gardien d'avion, c'est vraiment un boulot qui me plaît ! Vous pouvez me faire confiance.” Ami Saïd, de Tahya ya didou, n'est pas loin. B. K. [email protected]