“Ecrire contre la violence du silence, de l'injustice, de l'indifférence et de l'oubli.” À l'initiative du cercle culturel Igelfan de Bouzguène, et dans le cadre du programme culturel entamé depuis l'inauguration de la bibliothèque municipale, une éminente romancière, Maïssa Bey, a rallié la région Nath Yedjar à partir de Sid Bel Abbès pour animer une journée littéraire et présenter son œuvre aux lecteurs de la localité. Maïssa Bey, de son vrai nom Samia Benameur est née en 1950 à Ksar El Boukhari. Elle a été depuis sa petite enfance, avant même d'entrer à l'école, une lectrice boulimique. Elle avait appris à lire grâce à son père, instituteur de profession, et à sa mère qui avait reçu aussi un peu d'instruction, étant fille de cadi, titulaire à l'époque du prestigieux certificat d'études primaires. Les livres lui ont permis de se replier dans un monde qui la protégeait d'une réalité difficile à vivre. Elle a effectué des études universitaires et a enseigné le français avant de devenir conseillère pédagogique à Sidi Bel Abbès, où elle réside actuellement. Elle est également cofondatrice et présidente d'une association de femmes, Parole et écriture, au sein de laquelle elle anime des ateliers d'écriture et de lecture. “Cette association, nous dit Maïssa Bey, revendique le droit à la parole et les femmes n'ont pas ce droit, du moins, dans les espaces publics. Je m'occupais des ateliers d'écriture dans le contexte culturel, pour les femmes qui ont envie d'écrire. Je ramenais des livres de France et je faisais des lectures, des mises en espace de textes d'auteurs algériens et autres et, en même temps, des ateliers d'écriture avec une revue. Les activités de l'Association ont permis, grâce au programme Meda de la Communauté européenne, d'ouvrir une bibliothèque à Sidi Bel Abbès avec comme ambition de relancer et de réactiver la culture du livre, qui a totalement ou en partie disparu en Algérie. Nous avons réussi car, grâce aux espaces, aux rayonnages et à l'accueil, beaucoup d'enfants viennent consulter, lire, voir, toucher… des livres d'une très grande beauté.” Maïssa Bey, qui avait perdu son père mort des suites de la torture que lui ont infligée des militaires français, venus le chercher à la maison et emmené devant elle, était marquée à jamais de cette séparation brusque et brutale. Elle était vouée à l'écriture. Aujourd'hui, Maïssa a atteint sa vitesse de croisière. Elle est de ces romancières les plus attachantes de cette nouvelle génération d'écrivaines algériennes des années 1990. Empruntant les voies diverses de la narration de la nouvelle au roman, elle se singularise par une écriture offrant des silhouettes et… esquisse les multiples facettes de l'Algérie actuelle avec son style propre et sa pudeur provocatrice. Elle a longtemps cherché une écriture telle que celle qu'elle aurait envie de lire elle-même. Elle cherche les mots justes pour exprimer des situations où l'être accepte d'aller au plus périlleux de lui-même. Maïssa Bey traque les non-dits et les contraint de faire entendre le cri et apaiser la douleur. Maïssa Bey nous présente succinctement sa biographie qui se révèle d'une richesse et d'une beauté exemplaires. Au commencement était la mer, son premier roman. C'est le récit de l'Algérie des années noires, à travers les scènes de vie amoureuse d'une jeune fille. Mais Alger est défigurée par la haine, les chars et les ninjas. Comment alors mener une vie amoureuse dans un pays en guerre civile. Nouvelle d'Algérie, adapté au théâtre en France et en Algérie. C'est une histoire courte. Cette fille-là. C'est une histoire dramatique qui se déroule dans un asile à Sidi Bel Abbès. Un hospice pour malades mentaux. Une jeune fille, qui refuse de grandir, recherche désespérément la trace de ses origines. En quête de son identité, elle compose toute seule son roman familial. Dans l'asile tout était permis pour le personnel... normal, les jeunes filles n'avaient personne... Surtout ne te retourne pas. Profondément ébranlée par le séisme qui s'est produit à Boumerdès, une femme décide de rejoindre le groupe des victimes à l'épicentre même du séisme. Elle découvre le désastre et perd la mémoire. Sous le jasmin, la nuit. L'Algérie se bat continuellement dans des contradictions, celles qui entravent les femmes. Une héroïne se bat pour son identité, sa vie, sa liberté... Entendez-vous dans les montagnes. Livre évocateur de la mort de son père lors de la guerre d'Algérie. Au détour d'un voyage en train, en France, trois personnages et un dialogue s'instaure. On parle de la guerre d'Algérie. Les destins vont se croiser douloureusement. Elle pense à son père, torturé et tué par des Français. En face, le vieil homme rongé lui-même par son passé à Boghari. L'ancien bidasse se rappelle l'ancien instituteur qu'il a croisé avant sa mort. Un question taraude la jeune fille : serait-il le bourreau de son père ? C. NATH OUKACI