Sorti en février 2005, Mar Adentro est bien plus qu'un film sur l'euthanasie, le cliché, dans ce cas, se serait imposé de lui-même. Pour son premier festival du cinéma européen d'Alger, l'Europe a donc choisi de poser cette question épineuse, restée sans réponse : a-t-on le droit d'aider une personne à mettre un terme à une vie qu'elle juge indigne ? Doit-on permettre de concrétiser cette définition officielle de l'euthanasie qui est “ce geste ou l'omission du geste qui provoque délibérément la mort du malade qui souffre de façon insupportable ou vit une dégradation insoutenable” ? Et ce n'est pas l'Espagnol Alejandro Amenabar qui y répondra dans son quatrième et dernier film. Mar Adentro, sorti en février 2005, est bien plus qu'un film sur l'euthanasie, le cliché, dans ce cas, se serait imposé de lui-même. Tiré d'une histoire vraie, celle de Ramon Sampedro, devenu tétraplégique suite à un accident en mer. Pendant presque trente ans, n'ayant d'ouverture sur le monde que la fenêtre de sa chambre, Ramon Sampedro (Javier Bardem) tente de convaincre et son entourage immédiat et les autorités de son pays, l'Espagne, de le laisser mourir “dans la dignité”. La mort devient alors un but suprême à atteindre, le seul attendu d'une vie. Il en tirera un livre et un recueil de poèmes. C'est autour de l'ambiguïté de cette volonté de mourir que se déroulent les deux heures du film. Cloué dans son lit, Ramon devient le centre de gravité de tout un univers avec son cortège d'intrigues. “Comment peut-on avoir les yeux pleins de vie et vouloir mourir ?”, comme l'interroge Rosa, une femme aussi perdue dans la vie que le paralysé. Mais, en posant au malade cette question, c'est elle-même qui s'interroge sur sa propre vie. À l'image des autres personnages, tout aussi taraudés par des sujets existentiels, telle Julia, l'avocate qui s'enfonce, elle aussi, dans la spirale de la dépendance, et surtout sa belle-sœur qui, en bonne paysanne qu'elle est, le soigne avec dévouement mais ne s'oppose pas, du moins de manière franche, à son projet de mort. Faire de la mort un sujet sur le sens de la vie, c'est peut-être en cela que Alejandro Amenabar a réussi à éviter les clichés. La mort devient dans ce film, qui a obtenu l'oscar du meilleur film étranger l'année de sa sortie, prétexte d'amour et dénonciation de la position de l'Eglise qui est “favorable à la peine de mort mais refuse le droit de choisir la mort !” Des clichés il n'y en a donc pas. Comme qui dirait, ni pour ni contre, bien au contraire… D'ailleurs, aurait-il pu oser répondre à une question aussi périlleuse que l'euthanasie ? Périlleuse a également été l'interprétation de Javier Bardem. Âgé de trente-cinq ans, cet acteur athlétique, ancien joueur de rugby, a su se mettre dans la peau d'un sexagénaire tétraplégique, privé de l'usage de son corps. Il ne lui reste alors que les yeux pour jouer et “le sourire pour pleurer”. Prouesse d'autant plus admirable pour celui qui ,en jouant aux côtés de Pénélope Cruz, en 1992, son premier grand rôle dans Jambon Jambon, de José Juan Bigas Luna, est devenu un sex-symbol dans son pays. Lauréat du Goya du meilleur acteur en 1995, il reçoit le Prix du public du meilleur acteur du cinéma européen en 1997. Pour ceux qui souhaitent avoir leur dose d'émotion, ce film sera projeté une seconde fois, vendredi 27 janvier à 19 heures (100 DA l'accès) à la salle Ibn-Zeydoun de Riadh El Feth. Car la vie, malgré tout, suit son cours avec ou sans le geste ou l'omission du geste… S. B.