En six volets, le cinéaste Sid-Ali Mazif se propose de retracer, caméra en main, l'évolution de la place qu'occupent les femmes dans la société en Algérie. En allant à la rencontre de femmes de différentes générations, ayant différents profils, il a recueilli les témoignages de celles qui ont tant à dire. Le premier documentaire, consacré au portrait de Taous Ben Abdessalem, “doyenne du tapis de Aït Hichem” sera projeté aujourd'hui à la médiathèque de la rue Pichon à Alger Le portrait de cette centenaire, dépositaire d'un savoir aussi vieux que les montagnes de sa Kabylie qui l'ont vue naître, inaugure le parcours des femmes algériennes sur une trente années, parsemé de victoires remportées sur les inégalités mais surtout de luttes qui restent à mener. Comme celui de Nassima Hablal, née en 1928 à Alger, qui a connu les prisons de la France coloniale en Algérie et en France. Son portrait est une manière de souligner son refus de l'oppression. D'une durée variant de quarante-cinq à cinquante-deux minutes, les autres documentaires retracent, dans un second court métrage, l'histoire du mouvement féministe en Algérie, suivie d'une enquête sur le bilan du travail effectué par des associations féminines à partir des années 1990. Sid-Ali Mazif a donc donné la parole aux représentantes de Rachda, de SOS Femmes en détresse, de Rafd et de l'association Fadhma N'soumer. Et puisqu'il s'agit de femmes, l'auteur du film Leïla et les autres (1977) ne pouvait ne pas aborder la violence faite contre elles. S'appuyant sur des témoignages de victimes de viol et différentes formes de maltraitances, Sid-Ali Mazif conclut que “le plus fréquemment, ces violences s'inscrivent dans la famille mais elles s'observent également dans la vie publique ou sur les lieux de travail”. Mais la famille commence par le mariage qui, selon le cinéaste, est de plus en plus inaccessible pour beaucoup de femmes, même diplômées, une fois dépassée la trentaine. Les raisons de ce célibat forcé sont évoquées dans un autre court métrage. Les hommes ne seraient-ils plus l'avenir des femmes ? Mais, reconnaît Mazif, le parcours des femmes algériennes comporte, cependant, quelques victoires comme celles de la scolarisation généralisée des filles, la plus grande participation féminine dans le monde du travail mais qui reste circonscrite dans des secteurs précis comme ceux de l'enseignement, la santé et la justice. C'est dire que des espaces entiers restent à conquérir. Cet aspect sera abordé lors de La femme et le marché du travail, documentaire dans lequel le réalisateur s'interroge : “Si l'école est nécessaire, est-elle suffisante à l'émancipation de la femme.” Si le premier portrait est déjà réalisé, les autres sont en cours de tournage et s'étalera, selon le réalisateur, sur une année. Cette série de documentaires est produite par Procom International, créée en 1994 par des anciens du Caic. Cette société a déjà mis “dans la boîte”, entre autres, le long métrage Mimouna du même réalisateur, un documentaire intitulé Fatima et la mer et participé à l'exposition universelle de Lisbonne en 1998 avec Bougie, terre d'exil. Aujourd'hui donc, celle qui n'est peut-être pas loin d'être la doyenne des Algériennes, Nana Taous, parlera d'une vie riche en événements. S. B.