Le patron du Pentagone a été reçu, hier, par le président de la République Abdelaziz/personname / Bouteflika, le Chef du gouvernement et le ministre délégué à la Défense/personname / nationale. La lutte contre le terrorisme et la coopération militaire ont été au centre des entretiens. “Etat actuel des relations de coopération militaire et leurs perspectives”. Les services du ministère de la défense nationale (MDN) n'auraient pas pu trouver formule plus laconique pour expliquer l'objet de la visite de Donald Rumsfeld hier à Alger. Lui-même n'a pas été plus expansif, se contentant d'affirmer sur le seuil de la présidence de la république qu'il “apprécie hautement, et à sa juste valeur, la coopération avec l'Algérie dans le domaine de la lutte contre le terrorisme parce que c'est important pour les deux pays (…) Nous cherchons à la renforcer”. Sur le même ton mais sans plus de détails, il a estimé que sa visite est “extrêmement utile et intéressante”. Le secrétaire d'état américain à la défense venait de sortir d'une audience avec le chef de l'état, ultime rendez-vous d'un séjour éclair de quelques heures. Le chef du pentagone a passé un peu plus de 6 heures à Alger. Son avion a atterri à l'aéroport Houari-Boumediene à 9h30. Il venait de Tunis, sa première escale dans un périple maghrébin qu'il doit achever à Rabat aujourd'hui. Des indiscrétions font dire qu'il n'a pas passé la nuit sur le territoire tunisien mais ailleurs, vraisemblablement en Europe où il était il y a quelques jours, en Sicile précisément, pour une rencontre des ministres de la défense de l'Alliance Nord- Atlantique (OTAN). C'est la première fois que Donald Rumsfeld se rend en Algérie en qualité de ministre de la défense. Les égards dus à son rang au sein de la plus grande puissance mondiale ont été nombreux. Le collaborateur de George Walker Bush a été reçu par le président Bouteflika, qui est aussi ministre de la défense, son chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia ainsi que par le ministre délégué à la défense, Abdelmalek Guenaïzia qu'il a eu à rencontrer en Sicile et qui l'a accueilli sur le tarmac de l'aéroport. Si rien n'a filtré sur le contenu des discussions bilatérales, les journalistes ont été néanmoins conviés au siège du MDN pour assister à l'arrivée et au départ de l'envoyé de Washington. “Nous l'aurons au moins aperçu”, a plaisanté un journaliste en décelant la silhouette du secrétaire d'Etat au milieu de la cohue des photographes. Tapis rouge, fanfare, revue des troupes, gardes du corps, quand un personnage de l'envergure de Rumsfeld se déplace à Alger, rien n'est laissé au hasard. Partisan d'une alliance mondiale contre le terrorisme, il milite afin que les Etats-Unis puissent avoir des soutiens partout dans le monde et intervenir directement en cas de besoin. “L'Algérie les intéresse car elle a une longue expérience dans le domaine de la lutte contre le terrorisme”, confie une source proche du MDN. Cet intérêt a été exprimé ouvertement et à plusieurs reprises par les officiels US qui se sont succédé en Algérie depuis quelques années. La contrepartie étant dans le renforcement des capacités militaires locales grâce notamment à l'aide à la formation des officiers, la vente d'armes et la fourniture d'équipement satellitaire d'écoute et de repérage des groupes armés, à l'instar du GSPC (Groupe salafiste pour la prédication et le combat) dans le sud du pays. À ce propos, une rumeur persistante relayée par des médias locaux et étrangers fait état, depuis au moins deux ans, de la création d'une base militaire américaine dans le Sahara algérien. Mais rien ne permet de vérifier une telle information. Au cours de leurs déplacements respectifs à Alger, les responsables de l'Administration US, dont l'ex- secrétaire d'Etat aux affaires étrangères, Colin Powell, se sont abstenus de faire des commentaires sur l'existence d'une quelconque base. La coopération militaire étant frappée du sceau de la confidentialité, tout est convenu dans la discrétion totale à l'instar du séjour très récent du directeur du bureau fédéral d'investigations (FBI). Il y a quelques jours pourtant, Donald Rumsfeld a dévoilé une partie du secret en faisant valoir, au cours d'une conférence de presse, que “les Etats-Unis n'épargneront aucun effort et emploieront tous les moyens qu'il faut pour aider et assister les pays amis qui luttent contre le terrorisme au niveau de leurs frontières”. La persistance de poches terroristes, sous l'égide d'Al-Qaïda en Afrique subsaharienne et dans le Sahel, dans des territoires qui échappent au contrôle des Etats comme au Tchad, rend indispensable une présence militaire américaine durable. C'est du moins la conviction de Washington. Agir seule ou en collaboration avec les pays de la région est sa stratégie. Avec l'Algérie, le partenariat a pris forme à travers les manœuvres communes de la Marine algérienne et de la Navy. En Tunisie comme au Maroc — considérés par le chef du pentagone comme des amis de longue date —, l'investissement US est total. Samedi à Tunis, Donald Rumsfeld a discuté avec ses hôtes d'un accord devant offrir un cadre légal à la présence de ses troupes chez notre voisin, avec comme objectif officiel de participer à des manœuvres et des activités militaires. Actuellement, la Tunisie a droit à une assistance militaire estimée à 10,5 millions de dollars. SAMIA LOKMANE