Malgré des conditions atmosphériques, tous les élus APW et APC des différents partis politiques, engagés directement ou indirectement dans les sénatoriales, ont envahi le centre des œuvres sociales de la wilaya de Tizi Ouzou, depuis les premières heures de la matinée, pour prendre part au scrutin. Durant toute la journée, la sérénité était de mise et l'ambiance plutôt bon enfant entre élus de diverses tendances politiques, qui multipliaient même les échanges d'amabilité, voire même des taquineries de bon aloi sous le regard fort amusé des magistrats, des scrutateurs ou encore de nombreux curieux venus assister à cette rude empoignade électorale au moment même où tous les élus du FFS, qui avaient décrété le boycott total pour ces sénatoriales, étaient en conclave dans la maison de la culture Mouloud-Mammeri toute proche comme pour tourner carrément le dos à ce qu'ils considèrent comme un non-événement, tout en ne prêtant aucune équivoque quant aux éventuelles tentations de vote suspectées ou imaginées ici et là. On dénombre exactement 436 électeurs présents sur un total de 656 élus APW/APC que compte la wilaya de Tizi Ouzou, ce qui laissait supposer 220 absents, soit les 203 élus du FFS qui ont confirmé totalement le boycott déjà annoncé de leur parti, auxquels il fallait ajouter donc 17 autres absents d'autres partis politiques retenus apparemment par des cas de force majeure. Devant un parterre impressionnant de magistrats chargés du déroulement de l'opération, le dépouillement de la première urne, comptant pour le scrutin de remplacement du défunt sénateur du FFS, Ahmed Aït Ahmed donna lieu à une course poursuite très serrée entre le candidat du FLN, Ali Lanasri, et son vis-à-vis du RCD, Mohand-Akli Semmoud, alors qu'un troisième poursuivant, Belhadj Ahmed du RND pointait quelque peu le nez à l'horizon comme pour rappeler la présence et la représentativité du parti d'Ouyahia dans cette explication pas comme les autres. Finalement, c'est Lanasri du FLN qui l'emportera de justesse avec deux voix d'écart seulement sur Semmoud du RCD (176 voix contre 174), alors que Belhadj scrorait à 64 voix pour la 3e position. C'était déjà le délire pour les militants du FLN au moment où leurs homologues du RCD regrettaient amèrement l'absence de pas moins de... quatre de leurs élus retenus chez eux pour des cas de force majeure et qui auraient pu renverser l'ordre déjà établi. Après une courte pause où les félicitations, les regrets et les commentaires avaient largement envahi la grande salle embuée de fumée de cigarettes à la mesure de la tension qui montait crescendo dans chaque camp, la seconde opération de dépouillement donnait l'air d'une grande finale tant attendue avec un certain goût de dualité et de revanche entre le FLN et le RCD. Dès la lecture des premiers bulletins, la grosse bagarre entre Rachid Arabi du RCD et Slimane Kerrouche du FLN se confirma d'emblée, et l'on assista à un bras de fer impitoyable, alors que le candidat du RND, Slacel Mokrane suivait très loin derrière. Puis le verdict tomba : Arabi du RCD devançait finalement Kerrouche du FLN de 14 voix, soit 199 voix pour le RCD et 185 pour le FLN alors que Slacel du RND pointait à la 3e place avec seulement 35 voix dans la cagnotte comme pour révéler, en fait, que si les 15 élus du PT, quelques indépendants avaient donné leurs voix au FLN, par contre une quarantaine d'élus du RND et quelques indépendants ont donné plutôt leur préférence au parti de Saïd Sadi. Du coup, ce fut alors l'euphorie dans le camp du RCD qui fêta bruyamment cette victoire au moment même où quelques militants du FLN pointaient déjà un doigt accusateur contre le RND accusé de tous les maux pour avoir “trahi l'alliance sacrée” au profit du RCD. C'est dire que ce scrutin mémorable risque de faire couler encore beaucoup d'encre et de salive dans les jours à venir, même si, au fond des choses, le RCD et le FLN ont fini par se partager le pactole dans un bel esprit de démocratie, alors que le RND a eu certainement le mérite de faire valoir sa présence et son arbitrage dans une Kabylie toujours imprévisible où le boycott du FFS a quelque peu faussé les calculs. M. HOCINE