Le Pentagone a rendu publics, vendredi, pour la première fois, le nom et la nationalité de la plupart des centaines de prisonniers du centre de détention militaire américain de Guantanamo, après en avoir reçu l'ordre par un juge fédéral de New York. Le Pentagone n'a pas diffusé une liste proprement dite des noms des quelque 490 prisonniers toujours détenus à Guantanamo, sur l'île de Cuba, mais a publié environ 5 000 pages de scripts d'auditions concernant leur statut d'“ennemi combattant” où apparaissent ces informations. Cette publication est le résultat d'une requête déposée auprès de la justice par l'agence de presse américaine Associated Press. Les noms et les nationalités des détenus étaient jusque-là masqués dans ces documents qui avaient déjà été publiés en juin 2005. Seuls les noms des détenus qui sont passés par le processus d'examen du statut d'“ennemi combattant” ont été publiés. Les détenus qui ont refusé de comparaître devant les commissions examinant leur statut n'ont pas leur nom révélé. Le camp de Guantanamo a été ouvert en janvier 2002. Les détenus, originaires d'une trentaine de pays, ont été capturés pour la plupart en Afghanistan à l'automne 2001. Leurs conditions d'incarcération et le maintien en détention indéfinie de suspects non inculpés ne cessent de susciter la controverse dans le monde. Selon un porte-parole du Pentagone, Bryan Whitman, l'identité des détenus était jusque-là gardée secrète pour éviter des représailles contre eux ou contre leurs familles dans leur pays d'origine. Des organisations de défense des droits de l'homme ont contesté ces arguments et accusé l'Administration Bush de refuser de rendre publics les noms des détenus pour empêcher des avocats de les défendre. Le juge fédéral de New York, Jed Rakoff, avait ordonné le 24 janvier au département de la Défense de publier ces noms d'ici à vendredi, dans le cadre d'une procédure judiciaire lancée par Associated Press qui s'interrogeait sur le statut d'“ennemi combattant” attribué aux prisonniers. Il avait estimé que la justification du gouvernement n'était pas suffisamment solide. En février, un rapport de l'Onu sur Guantanamo a appelé à fermer sans tarder le camp et à juger rapidement les prisonniers ou bien à les libérer. Cet appel avait été relayé par le secrétaire général de l'organisation, Kofi Annan, et par des capitales européennes, dont Londres et Rome.