Pour cet avocat, les droits des conjoints dans la dissolution de leur union sont toujours illégaux. Les hommes ont toujours facilité à obtenir le divorce en dépit de l'introduction de dispositions dissuasives comme l'octroi d'un logement ou d'un droit de bail à la femme ayant la garde des enfants. Liberté : Comment évaluez-vous l'étendue des changements intervenus dans la gestion des affaires familiales, notamment le divorce depuis l'amendement du code de la famille ? Adlène Bouchaïb : Dans les cas de divorce, il n'y a pas de changement notable. Quand l'homme demande le divorce, il l'obtient automatiquement alors que la femme doit prouver qu'elle a subi des préjudices pour avoir l'accord du juge. Les dispositions en vigueur avant l'amendement du code de la famille fixaient les conditions à cinq (défaut de paiement de la pension alimentaire, refus du mari de partager la couche conjugale, son infirmité, sa condamnation à la prison ou son absence pendant plus d'un an). Deux autres raisons (un préjudice légalement reconnu ou une faute morale gravement répréhensible) ont été rajoutées à la loi. Mais dans la pratique, rien n'a changé. Pourquoi les choses sont restées en l'état ? Considérant que la femme ne peut pas obtenir le divorce sans l'accord du juge, celui-ci doit être convaincu de la gravité du préjudice qu'elle a subi (des violences notamment) pour mériter sa liberté. Ce qui relève exclusivement de son libre arbitre. Avez-vous noté une résistance des magistrats à appliquer les modifications de loi ? D'une part, il y a des règles que le juge doit respecter. D'autre part, il jouit d'un pouvoir discrétionnaire qui l'autorise à prendre les décisions qu'il veut. Cependant, certains font preuve de flexibilité. Par exemple, il y a des femmes qui arrivent à obtenir des dommages et intérêts si elles considèrent qu'elles ont fait l'objet d'un divorce abusif. Dans le cas du kholaâ, les femmes achètent plus facilement leur liberté. Même si beaucoup refusent de payer. L'octroi d'un logement à la mère divorcée, ayant la garde de ses enfants, est-il systématisé ? Cette disposition est appliquée. Cependant, comme il est rare que les maris aient plus d'un logement, les juges donnent à la femme un droit de bail dont le montant toutefois est dérisoire. Il est fixé entre 3 000 et 5 000 dinars. La valeur de la pension alimentaire est également insignifiante. Dans tout ça, le plus important étant que les mères en instance de divorce peuvent bénéficier désormais de mesures d'urgence (comme le logement) en vertu d'ordonnances sur pied de requête. Cette célérité a-t-elle un effet dissuasif sur les maris demandeurs de divorce ? Pas du tout. Le nombre des divorces a augmenté. Nous avons de plus en plus d'affaires. Les problèmes sociaux poussent toujours les couples devant les portes des tribunaux. Il est noté dans certains tribunaux une augmentation du nombre d'affaires liées à la reconnaissance des mariages par la fatiha. Les conditions entourant la polygamie (dont l'accord de la première épouse devant le juge) ont-elle encouragé les unions religieuses ? C'est vrai. Néanmoins, le problème se pose pour la reconnaissance des enfants issus de ce genre de mariage. Propos recueillis par W. L.