Deux-cent cinquante députés étaient invités, hier, au siège de l'Assemblée populaire nationale, à assister au discours de Joseph Borell Fontelles, président du Parlement européen. Mais quelques-uns seulement ont consenti à l'écouter. Intervenant dans sa langue natale, l'espagnol, l'hôte d'Alger a priorisé les axes de son discours. De la lutte antiterroriste aux caricatures blasphématoires contre le Prophète, il a surfé sur un certain nombre de chapitres qui lient le destin de l'Algérie et de l'UE comme l'accord d'association ou l'immigration. Dans une quinzaine de jours, le Conseil de coopération algéro-Union européenne se tiendra pour la première fois à Bruxelles. Cette rencontre a pour objectif de lancer le travail des commissions techniques chargées de suivre l'application des termes du partenariat en matière de réformes économiques, de liberté commerciale, de la modernisation des infrastructures, du contrôle de l'émigration et de la circulation des personnes ainsi que de l'aide à l'éducation et à la recherche universitaire. M. Borell affiche un enthousiasme sans mesure quant à la réussite de tous ces chantiers. “Notre accord d'association ouvre des perspectives importantes”, promet-il. Selon lui, les craintes exprimées intra-muros, notamment par les chefs d'entreprise ou les syndicats sur les “effets néfastes” de ce pacte “sont aujourd'hui dépassés”. “Je suis sûr que ce partenariat sera positif”, s'est-il encore exprimé. Ses arguments étant donné que les recettes fiscales engendrées par les flux d'investissement compenseront les 20 millions d'euros de pertes sur les taxes douanières comptabilisées dans un délai de six mois, entre le 1er septembre et le 31 décembre 2005. Redoublant d'optimisme, le Parlementaire bruxellois estime que l'Algérie a les atouts qu'il faut pour susciter les convoitises des hommes d'affaires. Outre son potentiel humain qui fait d'elle “une bombe démographique”, soit un énorme marché de consommation, son opulence reposée sur un matelas de devises bien rembourré font d'elle un eldorado pour les buisnessmen du Vieux Continent. “Il y a dix ans, votre pays était au bord de la banqueroute et avait des difficultés à honorer ses engagements internationaux”, note M. Borrel dans une vague réminiscence. Ses souvenirs lui font évoquer aussi les années de terrorisme que l'Algérie a traversées. “Qui mieux que l'Algérie peut savoir ce que coûte le terrorisme et à quel point, il mine les bases de la société”, admet-il. Cette expérience dramatique hisse aujourd'hui notre pays au rang de partenaire privilégié dans la lutte contre l'islamisme armé. Le jugement est unanime. Le président du Parlement européen le partage. “L'Algérie est l'un des partenaires les plus éminents dans la lutte contre le terrorisme de part et d'autre de la Méditerranée et dans le monde”, observe-t-il flatteur. L'éloge s'achève dans une critique sèche à l'endroit des Etats-Unis, car, selon lui “le terrorisme n'a pas commencé le 11 septembre 2001 avec l'attaque contre les tours jumelles de New York”. Concernant les caricatures du Prophète, M. Borell a indiqué que : “C'est une anecdote qui a pris des dimensions importantes. Je comprends la réaction suscitée dans le monde musulman”, acquiesce-t-il Néanmoins, il considère que certaines manifestations de colère étaient exagérées, car instrumentalisées par les islamistes. En outre, M. Borrel estime condamnable que des journalistes en Algérie et en Egypte soient mis en prison pour avoir publié et commenté les caricatures. De cela, il en parlera avec Farouk Ksentini, président de la Commission consultative des droits de l'Homme ainsi que des directeurs de journaux, qu'il doit rencontrer sans doute aujourd'hui, à la fin de sa visite, après l'épuisement de ses rendez-vous avec les officiels qui sont, dans l'ordre, le locataire du Palais d'El-Mouradia, les présidents des deux Chambres du Parlement dont les chefs des groupes parlementaires et du Chef du gouvernement. Samia Lokmane