En son deuxième jour à Alger, le président du Parlement européen, Josep Borrell Fontelles, a prononcé une allocution devant quelques membres de l'Assemblée populaire nationale (APN), dans laquelle il est revenu sur les « vertus » de la charte pour la paix et la réconciliation nationale, les avantages de l'accord d'association entre l'Algérie et l'UE, le partenariat dans la lutte antiterroriste et les « regrettables » caricatures blasphématoires de l'Islam. Il trouve que l'Algérie est « l'un des partenaires les plus éminents et incontournables de l'Europe dans la lutte contre le terrorisme ». Il a exprimé le besoin de l'Europe de l'expérience algérienne dans ce domaine. « Nous devons coopérer et conjuguer nos efforts dans notre guerre contre le terrorisme. L'Algérie est le pays qui comprend le mieux à quel point ce terrorisme sape les bases d'une société. » Saluant l'Algérie pour avoir pu surmonter sa crise, M. Borrell estime que les dispositions de la charte pour la paix et la réconciliation nationale constituent « un pas essentiel pour le retour de l'Algérie à une vie normale », rappelant au passage qu'« il ne peut y avoir de démocratie et de développement sans une société pacifiée ». Pour lui, le terrorisme n'est nullement dû au « choc des civilisations », mais il s'agit plutôt d'« une guerre contre la civilisation elle-même dans son sens le plus large, contre la démocratie et la tolérance ». « Dans sa lutte antiterroriste, indique-t-il, le Parlement européen refuse d'appliquer la règle de deux poids deux mesures. Nous n'acceptons pas de faire des exceptions ou de toucher aux principes de la démocratie et aux libertés au nom de cette lutte. » M. Borrell fait allusion aux pratiques américaines au nom, justement, de cette lutte antiterroriste. Plus direct, M. Borrell précisera que l'institution législative européenne a demandé de fermer la prison de Guantanamo et a lancé, par ailleurs, une enquête sur les prisons secrètes de la CIA implantées sur le sol européen. Avec le retour de la paix en Algérie, le premier responsable du Parlement européen pense qu'il va y avoir un retour d'investissements étrangers au pays. Pour lui, l'entrée en vigueur de l'accord d'association est de nature à impulser la machine productive nationale, grâce à de nouveaux investissements européens. « Vous ne devez pas douter de la portée de cet accord pour l'Algérie. Certes, la levée de certaines barrières douanières a engendré une perte pour l'Etat de près de 20 millions d'euros. Mais soyez-sûr que cette légère perte sera compensée grâce aux investissements. Vous avez les moyens d'attirer et de convaincre les opérateurs européens pour investir dans votre pays », a-t-il lancé à l'adresse des parlementaires algériens avant de les rassurer que l'économie algérienne est en « bonne santé ». Reconnaissant que le processus de Barcelone n'a pas été au niveau souhaité, M. Borrell -dont le mandat à la tête du Parlement européen expirera fin 2006- a insisté sur la nécessité de redynamiser ce processus dans l'intérêt des deux rives de la Méditerranée. Il attache cependant tout son intérêt à la prochaine réunion de coopération de l'Algérie et l'Union européenne qui se tiendra le 12 mars à Bruxelles. Il considère que cette rencontre permettra de donner un nouveau souffle à la coopération algéro-européenne. Il reconnaît qu'il y a beaucoup de manquements et d'insuffisance dans l'application de l'accord d'association avec l'UE, mais il se dit convaincu que, grâce à la volonté des deux parties, celui-ci connaîtra un nouvel élan. Pour lui, « l'Europe a trop regardé vers l'Est, il est temps qu'elle regarde vers la rive sud ». Selon lui, l'UE a aussi besoin de l'Algérie dans la lutte contre l'immigration clandestine, tout en indiquant que le vieux continent aura toujours besoin de la main-d'œuvre de la rive sud de la Méditerranée. M. Borrell est arrivé, rappelle-t-on, lundi à Alger pour une visite officielle de trois jours, à l'invitation des présidents des deux chambres parlementaires. Il a signé avec le président de l'APN, Amar Saâdani, un protocole-cadre de coopération parlementaire. Le président de l'UE a rencontré hier le président du Conseil de la nation, Abdelkader Bensalah, avant d'être reçu par le président Bouteflika. Il s'est également entretenu avec Farouk Ksentini, président de la commission nationale des droits de l'homme et les directeurs des quotidiens Al Khabar et El Watan, MM. Ali Djerri et Omar Belhouchet. Un entretien auquel a été convié un représentant du journal public El Moudjahid. En outre, il est prévu que M. Borell soit reçu aujourd'hui par le chef du gouvernement Ahmed Ouyahia et le ministre des Affaires étrangères Mohamed Bedjaoui. Une rencontre avec le secrétaire général de l'UGTA et les responsables des confédérations patronales est aussi programmée.