Peu performant jusque-là dans les différentes affaires qu'il a eu à juger, le Tribunal pénal international subit un nouvel échec avec le décès de l'ancien président serbe sans que son procès soit achevé, après cinq longues années d'interminables audiences. Alors que l'une des premières expériences du tribunal international du procès de Nuremberg, qui a jugé les dirigeants nazis au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, s'était déroulée en une année seulement, le Tribunal pénal international n'a pas réussi à rendre sa sentence dans l'affaire Slobodan Milosevic. La mort en détention de ce dernier constitue une véritable gifle pour cette instance judiciaire, qui peine à mener à bout ses procès. En effet, outre cette affaire, celle du génocide du Rwanda est toujours au stade des balbutiements. Selon Janet Anderson, de l'Institute of War and Peace Reporting, “sans le procès Milosevic, cette cour a perdu la possibilité de trouver une réponse à la question : qui est responsable de ce qui s'est passé dans les Balkans ?” Elle ajoutera : “C'est un coup majeur, non seulement pour les victimes ou le procureur mais aussi pour le tribunal qui doit maintenant vivre avec cette frustration énorme, et pour la justice internationale parce que de nombreuses questions n'ont pas de réponse.” Pour justifier le retard dans le traitement du dossier, les magistrats du TPI avançaient l'argument du refus de Slobodan Milosevic d'accepter d'être défendu par des avocats et surtout son état de santé fragile. En février, le procès était entré dans sa cinquième année. Une des raisons de sa durée était la santé de l'ancien président yougoslave, qui a contraint à près d'une vingtaine de suspensions d'audience. En effet, le planning de la cour avait été modifié en conséquence, et elle ne siégeait que trois demi-journées par semaine pour donner à Milosevic, qui assurait lui-même sa défense, le temps de se reposer. Lors de sa dernière audience, le 1er mars, Milosevic avait l'air en bonne santé. La dernière suspension de séance remonte au 23 février. Les résultats des examens médicaux d'alors n'ont pas été communiqués. Outre cela, il est reproché au TPI d'avoir recouru à un très vaste acte d'accusation, qui a été à l'origine de toute cette perte de temps. “Un acte d'accusation plus resserré, notamment sur le nettoyage ethnique dont il était indubitablement responsable, aurait été bien meilleur”, a indiqué David Owen, un ancien émissaire dans les Balkans. Il ne fait aucun doute que le décès de Slobodan Milosevic, plusieurs mois avant que le verdict ne soit rendu, a mis en relief la lenteur de la procédure. Des doutes sont émis sur la possibilité que le procès ait réellement pris fin avant la fin de l'année en cours, comme l'affirmaient les responsables du TPI, parce que si l'accusation avait fait citer près de 290 témoins, Milosevic, qui dirigeait seul sa défense et toisait ses juges, entendait faire comparaître 1 600 témoins. Reste à savoir, maintenant, si les responsables du Tribunal pénal international tireront les conclusions qui s'imposent de la mort en détention de Slobodan Milosevic, et qu'ils prendront les mesures adéquates afin que les procès qui suivront soient mieux gérés. K. ABDELKAMEL