Ce pays doit à l'essor de cinq grandes entreprises privées son haut niveau d'industrialisation et un revenu par habitant comparable à celui de certains pays européens. En ce deuxième jour de mars, le jour se lève sur Séoul. Sur la capitale sud-coréenne souffle une légère brise glaciale. D'aucuns disent que c'est à travers les qualités intrinsèques de son aéroport qu'on mesure le degré de développement d'un pays. Edifié il y a à peine 4 ans, le Incheon, nom attribué à cette infrastructure, est ultramoderne. Le niveau d'évolution de ce pays est confirmé par l'autre œuvre d'art esquissée constituée des lignes domestiques, le Kimpo. Cette féerie est en elle-même un meilleur accueil réservé par l'Etat coréen à ses hôtes. Deux précieux bijoux par lesquels il séduit ses visiteurs dès leur arrivée. Au sortir de l'aéroport, un autre spectacle s'impose au regard. L'autoroute offre à la vue une image inédite. Entre deux véhicules de la marque Hyundai, circule un troisième modèle… Hyundai ! Même si Kia, l'autre symbole de l'industrie automobile coréenne, dément parfois, à coups d'apparition furtive, cette affirmation. Ce cas précis renseigne, certes, sur le niveau du patriotisme économique exprimé par les citoyens sud-coréens pour leur pays. Mais cela n'empêche pas ce dernier de s'ouvrir sur le monde après avoir assumé, pendant des décades, le surnom de “royaume ermite”. La rareté de ses ressources énergétiques semble ne jamais être un handicap majeur ou un frein à son essor. Bien au contraire, ses gouvernants et gouvernés ont compris concurremment la nécessité de compter sur d'autres atouts, d'autres acquis... Si la nature n'a pas trop souri à la Corée, l'évolution de sa technologie a, en revanche, pu lui rendre le sourire. “Toi qui brilles de ton aspect extérieur, quel serait ton for intérieur ?” disait un dicton. L'on serait tenté par curiosité, pas trop maladive, de disséquer atout par atout le saut quantitatif, mais surtout qualitatif exécuté avec brio par la Corée vers un haut niveau de développement. Ici, tout le monde s'accorde à dire que l'une des sources principales de cette évolution réside dans les ressources humaines. C'est l'un des investissements les plus importants consentis puis excellemment consolidés par le pays. Les concepteurs de la politique sud-coréenne croient dur comme fer que le monde, la nature, l'univers s'édifient autour d'un seul élément : l'homme. Ils sont dès lors allés vite en besogne. Et les résultats ne font que confirmer l'efficacité et le bon sens d'orientation imprimés à la stratégie globale de cette nation. C'est dire que l'or noir ne peut pas être l'unique source créatrice et nourricière du… billet vert. La réalisation des infrastructures routières, autoroutières, portuaires et aéroportuaires semble être un problème déjà résolu ici. Ceci constitue également l'une des armes avec lesquelles la Corée du Sud se défend contre la concurrence et développe davantage son commerce intérieur et extérieur. Hyundai : un chiffre d'affaires de 57,2 milliards de dollars en 2004, presque l'équivalent du PIB de l'Algérie Entre les routes et les véhicules de Hyundai, une histoire d'amour est donc née. Une complicité caractérise leurs rapports. Si les routes offrent des conditions adéquates pour la circulation de ces véhicules, le constructeur automobile sud-coréen, quant à lui, propose des véhicules moins bruyants, économiques et écologiques de surcroît. Petit à petit, Hyundai est devenu un grand groupe de renommée mondiale. Hyundai Motor Company (HMC), une division du groupe multidisciplinaire spécialisé dans l'industrie automobile, est parmi les premiers producteurs au monde. Hyundai signifie “moderne” dans le coréen. Le “H” incliné et stylisé symbolise les deux partenaires, en l'occurrence la compagnie et le client se serrant la main. C'est Chung Ju-yung qui a fondé Hyundai Engineering et Construction Company en 1947. HMC a été créée plus tard en 1967. Le premier modèle de la compagnie, le Cortina, a été créé en coopération avec Ford Motor Company en 1968. En 1975, le Poney, la première voiture coréenne, a été produite, basée sur la technologie japonaise de Mitsubishi. En 1986, Hyundai a commencé à vendre des voitures aux Etats-Unis et à produire des modèles avec sa propre technologie en 1988 en fabriquant la Sonata. La maison mère a investi fortement dans la qualité, la conception, la fabrication et la recherche à long terme de ses véhicules. En 2004, les ventes de Hyundai Motor Company ont atteint 57,2 milliards de dollars US en Corée du Sud (à comparer avec le PIB de l'Algérie : environ 80 milliards de dollars). Ce résultat lui confère la seconde place dans le classement des plus grandes entreprises du pays. Les ventes mondiales en 2005 ont atteint 2 533 695 unités, soit une hausse de 11% par rapport à l'année précédente. Près de 77% de la production sont exportés. Pour l'année en cours, Hyundai envisage de réaliser un volume de ventes mondiales de 2,7 millions d'unités. Des véhicules à moteur de Hyundai sont vendus dans 193 pays par environ 5 000 agences et des show-rooms. À Ulsan, l'usine se présente comme une ville dans une ville. Sa superficie avoisine les 5 millions de m2. Plus de 1,6 million de voitures y sont produites chaque année par les 34 000 travailleurs. En 2004, HMC a exporté quelque 10 millions de voitures. Dans cette vaste unité, Hyundai fabrique 13 modèles de véhicules. Les modèles Sonata et Azera sont produits dans l'autre usine de Asan, dont la capacité de production est de 300 000 unités/an. Plus de 4 000 personnes sont employées dans cette usine. Le volet recherche et développement est l'un des principaux atouts sur lesquels Hyundai fonde sa stratégie. À Namyang, plus de 7 000 ingénieurs et techniciens assurent la conception et autres travaux de recherche. Les cinq usines du constructeur sud-coréen produisent 5 600 véhicules/jour. Une nouvelle usine qui vient de démarrer ses activités au nord des Etats-Unis assurera également une production de 400 000 unités. Un chantier naval, le plus important du monde, à Ulsan D'autres usines sont, en outre, implantées en Chine et en l'Inde. À Ulsan, Hyundai dispose d'un quai. Et sur un vaste espace, des centaines de véhicules sont parqués et n'attendent que leur transfert dans le navire qui venait d'accoster pour l'exportation. L'assemblage des véhicules de Hyundai Motor Company (HMC) s'effectue dans 15 pays. Plus de 51 000 employés sont recensés. La capacité de production globale est estimée à 3,4 millions d'unités/an. Plus de 35 milliards de dollars US ont été réalisés dans les ventes en 2005. HMC exporte vers 198 pays. L'usine Jeonju, spécialisée dans les véhicules lourds, notamment les bus et les camions, produit annuellement 125 000 unités dont 107 600 camions et 17 400 bus. L'usine de Asan, faut-il le préciser, est dotée du système PDI qui ne permet aucune erreur. Le contrôle de la production se fait ainsi en temps réel. En 2005, HMC a exporté quelque 4 500 bus et camions vers l'Algérie. À compter du mois de mai prochain, HMC créera une autre usine en Alabama. Après avoir conquis la terre — en réduisant de plus en plus les distances qui séparent les Sud-Coréens aux différentes régions, grâce à ses véhicules —, Hyundai est partie à la conquête de la mer. Les chantiers navals résument l'autre activité investie pleinement par Hyundai. De par ses installations, il est devenu l'un des plus grands constructeurs de navires au monde. À l'entrée du chantier naval de Hyundai Heavy Industries (HHI), une bannière portant la mention “Global leader” annonce déjà la couleur. Ici, tout est immense. Les hommes activent comme des fourmis casquées. Ils évoluent au cœur d'une forêt de grues et de montagnes d'acier. Situé dans la ville d'Ulsan, au sud-est de Séoul, ce chantier de 700 hectares est le plus important au monde. Inauguré en 1972, alors que la Corée n'avait aucune expérience en matière de construction navale, il détient, aujourd'hui, 15% des parts de marché et a franchi le cap des mille navires construits en 2002. Une soixantaine supplémentaire a vu le jour en 2003 et le carnet de commandes continue à grossir avec une centaine d'autres projets. Plus de 26 000 salariés travaillent sur ces 6 chantiers en pleine activité. Ces derniers tournent à plein régime et construisent plus de 70 navires/an. Il faut, selon un des responsables, entre 8 et 10 mois pour construire un navire. Des traders (bateaux commerciaux), des méthaniers… sont ainsi réalisés pour plusieurs pays. Certains d'entre eux atteignent parfois 630 mètres de long. Ulsan, où est implantée aussi Hyundai Motor Company, la filiale automobile, est surnommée “Hyundai city”. Segment téléphonie mobile de Samsung : Un projet d'usine en Algérie à l'étude On y trouve près de 16 000 logements, 5 centres culturels, un hôpital, trois crèches, des écoles, un collège, une université, un club de foot et des supermarchés portant la griffe Hyundai. Les performances de HHI trouvent leur origine certes, dans les prix compétitifs pratiqués sur le marché mondial, mais la quarantaine de quais dont elle dispose y sont également pour beaucoup. La Corée du Sud accorde beaucoup d'intérêt au transport maritime. Ses ports sont un atout considérable. C'est ainsi que le projet du nouveau port de Busan a vu le jour. Les travaux sont lancés depuis 1995 et seront achevés en 2011. Le coût d'investissement est de l'ordre de 9,2 milliards de dollars US. Il est prévu la construction de 30 terminaux à conteneurs. Neuf des 30 terminaux sont gérés par une entreprise privée de Dubaï (Dubaï Port World), neuf autres appartiennent à l'autorité portuaire de Busan. Si celle-ci a construit 8 terminaux, les 22 autres sont l'œuvre du privé. Trois terminaux sont déjà opérationnels et trois autres le seront l'année prochaine. Ce qui confère au projet un état d'avancement des travaux estimé à 10%. Avec le nouveau port, les infrastructures peuvent traiter 30 containers en une heure. De jour comme de nuit, Séoul se présente comme une ville qui brille de mille feux. Les insignes luminaires qui rayonnent tout au long des rues et ruelles ajoutent plus de charme aux buildings conçus à l'américaine. La capitale évoque réellement celles des pays très avancés. La Corée du Sud est aussi un pays qui avance à une cadence accélérée. Une avancée boostée par la recherche et le développement en permanence. Les télécommunications demeurent un secteur qui a largement bénéficié de la recherche. La fierté de la Corée du Sud c'est aussi l'autre géant des télécoms : Samsung. Si “Sam” veut dire le chiffre trois en coréen, “Sung” signifie étoiles. Ces stars résument trois qualités : grand, fort, éternel. Samsung dispose de huit usines en Corée et 123 autres dans le monde répartis sur 55 pays. Cinq grandes sections composent ce groupe. Il s'agit du média numérique, de l'électroménager, des semi-conducteurs, LCD… Plus de 128 000 personnes sont employées par cette firme. Son chiffre d'affaires a atteint 55 milliards de dollars US en 2005. Le volume des exportations est de l'ordre de 46,3 milliards de dollars US, soit 16,3% de la production. Un projet de création d'une usine en Algérie est actuellement à l'étude au sein de la direction du groupe dans le segment téléphonie mobile. B. K.