L'effet d'annonce de la visite aux USA, les 12 et 13 avril, du chef de la diplomatie algérienne, Mohamed Bedjaoui, ne s'est pas encore estompé, que le général major Gaïd Ahmed Salah s'y est rendu, à son tour, hier, pour une visite officielle de 3 jours. Cette première visite d'un chef d'état-major de l'Armée algérienne aux USA s'est faite à l'invitation du général d'armée Peter Pace, président du comité des chefs d'état-major interarmées et “s'inscrit dans le cadre des perspectives de développement des relations de coopération entre les armées des deux pays, et permet d'examiner les questions d'intérêt commun”, précise un communiqué du MDN. Il va sans dire que la question de la fourniture d'un armement US à l'Algérie sera au menu des discussions que s'échangeront les deux hommes forts des armées des deux pays. La réticence affichée jusqu'ici par les Américains à doter l'Armée algérienne d'un matériel militaire sophistiqué pour les besoins d'une lutte antiterroriste féroce, semble céder, peu à peu, le pas devant les impératifs de la géostratégie. Certes, depuis le 11 septembre 2001, les relations algéro-américaines ont connu un réchauffement certain. Mais, pas plus. L'Algérie a beau proposer son aide en matière de lutte antiterroriste, elle a beau prendre part à différentes manœuvres militaires entreprises dans le cadre de l'OTAN ou s'investir totalement dans le plan Sahel, les Américains se sont toujours montrés intraitables sur ce registre. Ce qui semble n'être plus le cas depuis quelques mois comme le prouvent les déclarations de Donald Rumsfeld et David Welch de passage à Alger. Il est vrai que depuis, les Russes ont arraché un mirobolant contrat d'armement de 4 à 7 milliards de dollars avec l'Algérie qui a servi de rampe de lancement, après une éclipse de plus de 15 ans, en Méditerranée. Ce qui n'est pas sans déranger les plans des Américains. Mais il n'y a pas que ça qui a poussé l'Administration américaine — elle est aussi marquée par la dichotomie politiques/militaires — à revenir à de meilleurs sentiments. Il est connu qu'en matière de conduite de la politique étrangère US, les généraux de l'Armée américaine ne sont pas toujours sur la même longueur d'ondes que les politiques du Département d'Etat. Est-il besoin de relever que si beaucoup de responsables militaires US, à l'image du général Charles Wald, mais aussi le chef du Pentagone lui-même ont effectué nombre de visites en Algérie, ce n'est pas le cas de la secrétaire d'Etat, Condoleezza Rice qui n'a pas foulé à ce jour le sol algérien alors qu'elle s'est rendue à trois reprises en Egypte. Certaines mauvaises langues prêtent à Collin Powell, le prédécesseur de Condoleezza Rice, de s'être opposé de tout son poids à la visite de l'ex-chef d'état-major algérien, Mohamed Lamari, aux USA. C'est dire que les objectifs du Pentagone et ceux du Département d'Etat ne se recoupent pas toujours. Pragmatiques et connus pour être les porte-voix du complexe militaro-industriel US, ces militaires ne sont pas trop agréés par cet embargo imposé à l'Algérie. Ne s'embarrassant pas trop des questions des droits de l'Homme, de la démocratisation des pays en développement ou peut-être même de l'usage qui serait fait de ces armes, ils ont toujours eu pour souci majeur de trouver des débouchés à l'industrie militaire américaine. Si jusque-là leurs thèses n'ont pas toujours prévalu, le contrat d'armement signé entre l'Algérie et la Russie semble leur avoir fourni l'argument massue pour infléchir la décision dans le sens de l'ouverture du marché de l'armement américain à des pays comme l'Algérie avec une cagnotte de 61 milliards de dollars. L'autre question que ne manquera pas d'évoquer le général major Gaïd Ahmed Salah avec ses vis-à-vis américains est celle de la formation des officiers algériens en USA. Le chemin a été déblayé par le général major Mohamed Senhadji, secrétaire général du MDN qui, à la tête d'une forte délégation, s'était rendu en mai 2005 aux Etats-Unis. Pour des considérations hautement stratégiques, les Américains semblent miser beaucoup sur ce volet formation. L'essentiel des hauts gradés de l'Armée algérienne étant formés dans des écoles militaires russes ou françaises, les Américains semblent vouloir renverser cette tendance en ouvrant présentement les portes de leurs écoles à de jeunes officiers algériens qui seront appelés demain à assumer des hautes responsabilités dans la hiérarchie militaire. Surtout que dans leur stratégie, ils comptent faire de l'Algérie un pays pivot en Afrique du Nord. Arab Chih