La célébration du 1er Novembre dégage un goût d'une épopée qui n'est pas menée à terme. Hier, à Guelma, M. Lamine Khan, responsable de la santé durant la Révolution, membre du GPRA et du Conseil de la Révolution algérienne a dit tout haut ce que plusieurs cadres de la Révolution ne cessent de chuchoter tout bas. Plus d'un demi-siècle après, le soulèvement “fondateur” de l'Etat algérien moderne reste amputé de sa dimension sociale et démocratique. Un fait aggravé par l'incapacité du système scolaire et universitaire à perpétuer le message novembriste. Il faut dire que certaines déviations ne sont pas “porteuses” pour la pérennité de la culture patriotique. C'est à ce niveau, celui de corriger le tir, que se situe la mission de tous ceux qui ont une responsabilité morale sur l'héritage révolutionnaire. Ainsi, hier, lors du 2e colloque national portant sur la Révolution algérienne dans la mémoire des générations, tenu à l'université du 8-Mai-45, à Guelma, Lamine Khan a reconnu qu'“une grande partie de la jeunesse algérienne ignore l'histoire de son pays”. D'emblée, il lancera qu'en matière d'enseignement de l'histoire “beaucoup reste à faire pour que les générations futures n'oublient jamais ce qui est arrivé à leurs ancêtres par la faute de ceux qui voulaient, à coup de massacres et de tueries, nous amener vers une soi-disant civilisation”. En clair, pour le médecin de Collo, la philosophie du plus fort des Occidentaux est basée sur les guerres. Revenant sur l'importance des sacrifices du peuple algérien, il dira qu'en 1960, “nous étions en Chine, avec Lakhdar Bentobal, Ali Boumendjel et Mohamed Seddik Benyahia, nous avons parlé à des responsables de Pékin d'un million de martyrs. Si au départ ils n'ont pas bronché, ils ont par la suite compris l'importance de notre sacrifice lorsqu'on leur a dit que la population algérienne était estimée à 9 millions de personnes”. “Alors je leur ai expliqué que notre million, par rapport à votre démographie vaut 60 millions”. Evoquant les querelles internes durant la guerre de Libération nationale, il dira que “la discipline et la discrétion ont toujours prévalu”. Et d'ajouter : “Des responsables de la Révolution ne s'entendaient pas mais arrivaient toujours à se supporter.” Il citera l'exemple de Krim Belkacem, Ben Tobal et Boussouf, qui, à un certain moment, n'ayant plus confiance entre eux, sont allés voir Benyoucef Benkhedda, alors ministre du GPRA, pour arbitrage ; ce qu'il a fait dans la discrétion et le conflit n'a été médiatisé qu'après l'Indépendance. Enchaînant dans le même ordre, il situe la Révolution algérienne en 10 étapes distinctes. Le 1er Novembre et la réunion des 22, ensuite le 20 Août, qui a donné un nouveau souffle à la Révolution, l'inscription de la question algérienne à l'ordre du jour de l'Assemblée générale de l'ONU, ce qui a été sur le plan diplomatique, une victoire, la communauté internationale intervient alors dans une affaire considérée jusque-là par la France comme une affaire intérieure. Poursuivant, la chronologie des faits, M. Khan parlera également de la grève des étudiants de mai 1956 qu'il considère comme une défaite à la France coloniale qui voulait les utiliser comme instruments de sa domination. Cette année de 1956, sera aussi celle du congrès de la Soummam, qui a été très important sur le plan organisationnel. La sixième étape est marquée par les évènements qui ont eu lieu en France en août 1958, des actions militaires organisées par le FLN qui ont ciblé des objectifs militaires et économiques, changeant la position de certaines gens, notamment les communistes. En septembre 1958, c'est la proclamation du GPRA, lequel va être reconnu par beaucoup de nations. Un fait qui rétablira la souveraineté internationale de l'Algérie détruite après 1830. La Chine, l'Indonésie et le Pakistan ont reconnu le GPRA. Les évènements de décembre 1960. Les deux dernières étapes et les accords d'Evian signés le 18 mars et le cessez-le-feu intervenu le 19 mars 1962 à 12h, puis le référendum de l'Algérie et la reconnaissance de la France, c'était le 3 juillet 1962. Pour l'ancien secrétaire général de l'Opep et de l'Onudi, “l'Algérie a obtenu son indépendance, mais on est encore loin d'une bonne partie de ce qui a été contenu dans la déclaration du 1er Novembre, comme l'égalité sociale ou la démocratie dans le cadre des principes islamiques”. Enfin M. Khan rappellera que l'histoire n'a pas changé, hier comme aujourd'hui, ce que l'on doit retenir c'est qu'il faut que “tu sois fort, surtout lorsque tu es en possession d'un objet que les autres convoitent”. B. Nacer